Serge Cottereau, éloge de la longévité
À 81 ans, le créateur et quadruple vainqueur des 100 kilomètres de millau, installé à saint-affrique, partage sa vie, notamment, entre écriture et course à pied, toujours.
À un âge où bon nombre de personnes n’ont, depuis un bon moment, plus envie de courir, au sens propre comme au sens figuré, Serge Cottereau, lui, continue ; la force de l’habitude. "Je cours un jour sur deux, huit à dix kilomètres, tranquillement. Enfin, je force un peu, mais même en forçant, je ne vais pas très vite", confie, avec humour, celui qui savoure sa "vie tranquille", ainsi qu’il la décrit, du côté de Saint-Affrique.
"Esprit amateur"
Pendant de longues années, cette vie, l’intéressé l’a pourtant menée au pas de course, qu’il a fait varier au fur et à mesure de sa carrière. "Au départ, je faisais du cross-country et surtout du 1 500 mètres, raconte-t-il. Quand j’ai eu 34 ans, j’ai compris que je ne pourrais plus progresser sur 1 500. De plus, j’étais un peu saturé de l’entraînement, très violent, qu’imposait cette distance. Je me suis alors tourné vers des épreuves plus longues, et notamment les 100 kilomètres. J’ai vu qu’une course de ce format était organisée en Suisse et comme ça m’intéressait, je suis allé voir ce que ça donnait. Lorsque je suis arrivé là-bas, je me suis retrouvé avec des participants de tous les niveaux, dans une ambiance fantastique. Les gens avaient vingt-quatre heures pour finir, ce qui fait que certains couraient et d’autres marchaient. C’était vraiment convivial."
De retour en France, séduit par ce qu’il avait pu observer, l’ancien pistard décide de défricher le terrain et d’organiser, "dans [son] coin" une course de cette distance, en 1972.
"J’en ai parlé au président du club de Millau à l’époque, Bernard Vidal, qui s’est tout de suite montré enthousiaste ; il croyait vraiment à ce projet. Au total, on s’est retrouvés à cinq ou six et on s’est lancés", révèle-t-il, lui qui, par courrier, sollicite des coureurs de toute la France pour venir tâter du bitume dans le sud de l’Aveyron. Quelques dizaines d’entre eux répondent à l’appel, un total qui ne cesse d’augmenter lors des éditions suivantes.
"J’ai été surpris de l’engouement, je n’imaginais pas que ça allait prendre comme ça, même si, à cette époque-là, beaucoup de coureurs à pied avaient envie de très longues distances", décrypte celui qui donne à cette course un visage à part, en la dénuant de podium et de récompense différenciée entre les premiers et les derniers.
"Je voulais un esprit amateur, mettre tout le monde sur un pied d’égalité. C’est ma philosophie, ma conception du sport", indique-t-il, avant de se défendre de toute influence soixante-huitarde ("ça n’avait rien à voir du tout avec ça").
"Aberrant, inhumain"
Si le public répond présent, celui qui, en plus d’organiser, court et remporte cette première édition, doit, à l’époque, faire face à l’hostilité du corps médical.
"Les médecins et préparateurs physiques étaient contre, disaient que les coureurs allaient se détruire, que ça allait provoquer de l’arthrose, que c’était aberrant de courir aussi longtemps sur route, pas possible, inhumain. Personnellement, je n’avais pas de crainte. J’étais convaincu que c’était possible. à l’entraînement, je courais une cinquantaine de kilomètres. Je savais que je pouvais encaisser, mais pas que d’autres pouvaient en faire autant", déclare-t-il, avant de développer : "Sur cette distance, le mental compte pour plus de la moitié. Il faut avoir en tête d’arriver, être prêt à se battre envers et contre tout. En cours de route, quasiment tout le monde en bave, avec des douleurs et le doute qui apparaissent. Les gens pensent tous qu’ils ne vont pas finir mais quand ils franchissent la ligne, ils sont tellement heureux ; c’est le plus émouvant".
"Persévérant"
Cette détermination, qu’il tient à relativiser ("Au début, on passait pour des phénomènes, des héros, mais quand je vois des gens qui, au Tibet, par exemple, transportent des charges de 80 kg dans la montagne, ça incite à la modestie"), celui qui s’est lancé, par la suite, dans une carrière d’entraîneur, l’entretient toujours aujourd’hui, au travers de l’écriture, activité à laquelle il s’adonne depuis de nombreuses années et qui l’a conduit à publier tout à la fois des ouvrages consacrés à la course à pied et des romans.
"L’écriture est une autre forme d’accomplissement et se rapproche un peu de ce que j’ai connu en courant les 100 kilomètres, même si c’est plus long, glisse-t-il. On doute, les pages s’enchaînent, il faut les reprendre, les corriger, mais c’est dans mon tempérament d’être persévérant, et même si les romans ne se vendent pas comme des petits pains, je prends un tel plaisir à les rédiger, à voir les idées arriver alors que je ne l’imaginais pas…"
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Le nombre de victoires de Serge Cottereau dans « son » épreuve : en 1972 (7h50’), 1973 (8h07’), 1974 (7h43’) et 1976 (7h25’).
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