Millau. Pratique minimaliste de la course à pied : de l’historique Bikila aux influentes terres millavoises

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  • Abebe Bikila,  lors du marathon olympique de 1960.
    Abebe Bikila, lors du marathon olympique de 1960. Repro CP -
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Centre Presse

Courir pieds nus. Voilà une idée saugrenue à l’aune de notre mode de vie moderne, ultra-sophistiqué et en constante évolution technologique. La tendance minimaliste, aussi dénommée "barefooting", préconise ainsi un retour à l’usage de chaussures à drop 0 (différence minimale entre la hauteur sur l’arrière et l’avant) permettant de revenir à un geste naturel.

Interroger cette pratique en faisant appel à l’histoire permet d’évoquer un destin parfois méconnu de la masse des coureurs, celui d’Abebe Bikila. Cet athlète éthiopien déboule un soir d’été 1960 dans la nuit romaine pour coiffer les favoris du marathon et remporter l’or olympique. Signe particulier : il avale la distance reine en battant le pavé pieds nus !

"L’homme aux semelles de vent"

L’épreuve, un des points d’orgue des Jeux organisés dans la Cité Éternelle, se court au crépuscule et verra l’éthiopien triompher contre toute attente. Aux prises avec un des favoris, le marocain Radi, il accélère, dans un dernier effort, à proximité de l’obélisque d’Aksoum pour décrocher son adversaire. Le monument avait été dérobé à l’Éthiopie par les troupes de Mussolini en 1937 : le clin d’œil est manifeste et la petite histoire rejoint alors la grande… Mais pourquoi courait-il pieds nus ? Par habitude, tout simplement ! Il s’entraînait ainsi sur ses terres africaines et avait développé une épaisse corne qui lui servait, en quelque sorte, d’assise naturelle. Aucune des chaussures qui lui avaient été fournies avant l’épreuve olympique ne lui convenait. On est décidément bien loin des débats actuels sur le bénéfice supposé du port de chaussures "augmentées". Quelle leçon tirer de ce portrait, brossé à grands traits ? Tout simplement que l’Histoire est un perpétuel recommencement, y compris dans le domaine de la course pédestre…

Ainsi, on commence à redécouvrir les bienfaits de courir sans trop d’artifices au niveau du renfort ou de l’amorti. Cela permettrait d’ailleurs de gagner en efficacité. Ce que confirme Adrien Attard, podologue à Bozouls : "Courir pieds nus peut permettre d’éveiller des sensations d’attaque sur l’avant du pied limitant les chocs nocifs. Pratiquer sur des durées très courtes est cependant recommandé afin de ne pas se blesser. "

La "frontière" aveyronnaise

La pratique du minimalisme est-elle significative en Aveyron ? Morgane Darchy, spécialiste running chez Endurance Shop à Rodez, parle d’une pratique existante, mais marginale sur le Ruthénois : "Nous avons quelques demandes pour des chaussures minimalistes mais celles-ci demeurent rares : des coureurs avec des niveaux de pratiques hétérogènes, souhaitant revenir à une pratique proche de la nature." Il semble toutefois qu’une différence notable se dégage entre le nord et le sud du département. La demande est en effet bien plus forte dans le Millavois. Guilhem Prax, gérant de la même enseigne à Millau : "On peut dire que la moitié des ventes se portent sur des gammes minimalistes. " Alors, effet de mode ou bien particularisme local lié à la pratique des sports de pleine nature propre à la cité du Gant ? Le spécialiste met surtout en avant une forme de volontarisme à proposer ce type de produits : "Il est prouvé scientifiquement que courir avec un drop 0 entraîne une cadence de foulée supérieure. Ceci permet de prévenir mécaniquement un certain nombre de traumatismes : l’onde de choc baisse quand le pied se porte naturellement vers l’avant. Du coup, nous proposons des chaussures à fort indice minimaliste à tous les coureurs, quel que soit leur niveau de pratique. Cela n’est clairement plus réservé à l’élite ! "

Avant de basculer sur une paire de chaussures répondant à ces critères, essayez de réaliser un exercice pieds nus. Trouvez un terrain plat en herbe ou en synthétique, trottinez une dizaine de minutes environ et prenez conscience de l’importance d’appuis naturels, plus portés sur l’avant-pied. Vous approcherez alors peut-être, sur les hautes terres aveyronnaises, des sensations faisant écho aux exploits de Bikila, "le coureur aux pieds nus" venu des hauts plateaux de la Corne de l’Afrique.

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