Au cinéma comme à la télévision, les réalisatrices encore très minoritaires

  • La réalisatrice autrichienne Jessica Hausner
    La réalisatrice autrichienne Jessica Hausner Laurent EMMANUEL / AFP
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Relaxnews

(AFP) - Si au cinéma près de 30% des films sont réalisés par des femmes, à la télévision, seulement 8% des fictions comptent des réalisatrices, des disparités qui pourraient être réglées avec l'instauration de quotas.

Sur le grand écran, avec 27% de films réalisés par des femmes, la France fait figure de bonne élève même si 27% "c'est un chiffre compliqué car c'est moyen", pas bas au point de susciter une réaction mais encore loin de la parité, estime l'actrice et productrice Julie Gayet, présente au festival des créations télévisuelles de Luchon pour présenter son documentaire "Filmmakers", sur les conditions de travail des réalisatrices à travers le monde.

Il s'agit du troisième volet d'une trilogie documentaire dans laquelle Julie Gayet s'est intéressée aux réalisatrices en France.

Celles-ci y discutent du regard féminin, des obstacles sociétaux et de leur travail en confiant des anecdotes parfois cocasses, parfois amères. La réalisatrice autrichienne Jessica Hausner raconte ainsi qu'on la prenait pour la scripte sur les plateaux, tandis que l'Espagnole Isabel Coixet rapporte que le jour où elle a ressenti la plus grande différence avec un homme, c'est quand "au milieu d'une scène intense et dramatique, tournée sous une pluie battante sur une plateforme pétrolière", elle a reçu un appel de son mari "paniqué par la panne de la machine à laver".

Julie Gayet, engagée dans le collectif "50/50 pour 2020", créé dans le sillage de l'affaire Weinstein pour promouvoir la parité dans le monde du cinéma hexagonal, dénonce aussi les disparités salariales, qui touchent tous les métiers du cinéma.

"La profession de coiffeuse et maquilleuse est exercée à 80% par des femmes et pourtant, elles sont payées 15 à 20% de moins que les hommes" qui négocient mieux, assure-t-elle.

- "On n'est pas extrémistes " -
Pour la télévision, les chiffres avancés par Laurence Bachman, productrice et coprésidente de l'association Pour les femmes dans les médias, sont accablants : 18% des fictions sont coréalisées par une femme, 8% réalisées uniquement par une femme et 88% des créateurs de séries sont des hommes.

"On est tous en train de réfléchir à un système de quotas. Pour le cinéma, une incitation financière a été mise en place, mais l'industrie de la télévision et des séries est bien plus grosse. On défend des quotas car on se rend compte que si on ne fait pas des choses radicales, rien ne change", glisse la productrice et réalisatrice, saluant l'initiative de Delphine Ernotte, patronne de France Télévisions, qui a décidé d'instaurer des quotas de réalisatrices.

Reconnaissant qu'en France le sujet est "tabou" car on craint d'affecter la créativité, Laurence Bachman dit travailler à des quotas de 30% : "on n'est pas extrémistes, on est plein de bon sens et on fait avec la réalité".

L'association travaille en outre avec l'Ina à une étude qui mesurera la place des femmes dans les fictions et dont les résultats, attendus prochainement, dressent un constat "pas très favorable", selon Agnès Chauveau directrice des contenus de l'Ina.

"La télévision a pris un retard abyssal, c'est peut-être lié au fait que c'était une affaire d'hommes à sa création", avance-t-elle.

Les progrès doivent aussi être faits devant la caméra, ont souligné les professionnelles en dénonçant des castings à 70% masculins. La comédienne Nadège Beausson-Diagne, qui a cosigné le livre "Noire n'est pas mon métier", a rappelé qu'il ne fallait pas oublier la diversité dans ce combat.

Ces propositions étaient présentées dans le cadre d'un débat organisé par le 22e festival de Luchon, qui met la question de la place des femmes à l'honneur cette année dans sa sélection de documentaires: il présente ainsi "La rue est à nous", qui revient sur l'agression et la gifle reçue en pleine rue à Paris par l'étudiante Marie Laguerre, ou encore un documentaire historique, "Les filles de l'escadron bleu" sur de jeunes Françaises chargées de rapatrier leur compatriotes après guerre (les deux sur France 3).

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