Villefranche-de-Panat. On a vu le spectacle, "Non mais t’as vu ma tête" et c’est bien vu !

Quel spectacle, toutes ces binettes, salle des fêtes, une salle qu’on aurait dû rebaptiser, pour la circonstance, salle des têtes, tant les portraits nombreux y faisaient figure de décor. Présenté dans le cadre des Échappées de la Maison du Peuple de Millau, ce gala était l’heureux aboutissement d’une formation de tout un mois pour les enfants des deux écoles, avec l’artiste Daf. C’était aussi la conclusion d’un atelier "modelages masque en terre". Alors, ce vendredi, on retirait le masque et l’on sortait à découvert. De la Compagnie Lucamoros, sur une mise en scène de Brigitte Gonzalez, Pierre Biebuyck, l’acteur principal, maladroit à l’extrême, grand échalas planté sur ses mimiques, se retrouve très vite au centre du jeu et du temps. Le temps est son fil rouge.

Il brosse à grands coups de rouleau (et en arrosant copieusement son costume) un autoportrait évolutif et cruel : d’abord une tête ronde de bébé, qu’il retouche jusqu’à faire apparaître sous ses coups de pinceaux le jeune garçon qu’il a été. Puis son visage d’aujourd’hui s’illumine mais pas longtemps. L’heure court, pressée par le temps toujours impatient. Le portrait continue de vieillir dès qu’il a le dos tourné et c’est poignant : rides de plus en plus marquées, perte de dents, d’éclats, jusqu’à le métamorphoser, à son corps défendant, en un vieillard tout rabougri, déchu, déçu, apeuré.

Eh oui, quotidiennement, le temps nous vole quelque chose ! Il suffit de lui tourner le dos juste en vivant un peu ou en aimant beaucoup, passionnément, à la folie… Il nous vole alors quelques cheveux ou une maman qu’il a usée à l’envi…

Un spectacle d’une cruelle beauté !

Ce portrait, cet art en quelques traits, au sens propre ou barbouillé, comme au sens figuré, pourrait aussi nous faire la peau !