Hildur Gudnadottir, l'as musicale du "Joker"

  • Fraîchement auréolée d'un Oscar et d'un Grammy Award, Hildur Gudnadottir reste méconnue du grand public
    Fraîchement auréolée d'un Oscar et d'un Grammy Award, Hildur Gudnadottir reste méconnue du grand public DAVID GANNON / AFP
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Relaxnews

(AFP) - Fraîchement auréolée d'un Oscar et d'un Grammy Award, Hildur Gudnadottir reste méconnue du grand public. Et pourtant: le film "Joker" ou la série "Chernobyl" n'auraient sans doute pas rencontré un tel succès sans ses bandes-son.

"Ma carrière a clairement pris une autre dimension avec ces deux oeuvres qui m'ont donné davantage confiance en moi", explique cette compositrice islandaise de 37 ans lors d'une discussion avec le public, en marge de la Berlinale.

Après le Grammy Award fin janvier pour la série dramatico-historique "Chernobyl", elle a raflé tous les prix pour le thriller psychologique "Joker" réalisé par Todd Phillips: Golden Globe, Bafta britannique, et surtout Oscar de la meilleure musique originale de film.

La native de Reykjavik est devenue la quatrième femme à remporter cette prestigieuse récompense, mettant en lumière l'immense retard à rattraper dans ce domaine.

"Je suis fière de permettre de relancer le débat sur l'équilibre entre les sexes dans cette industrie. Statistiquement, je suis la première femme à remporter tous ces prix! Demandons-nous pourquoi elles ne sont pas plus nombreuses", lance-t-elle.

Presque sans voix lors de la remise de sa récompense le 9 février à Los Angeles (Etats-Unis), la compositrice avait tenu un discours aux tonalités très politiques: "Aux filles, aux femmes, aux mères, à leurs filles qui ressentent la musique bouillonner en elles, faites entendre votre voix, je vous en prie. Nous avons besoin d'entendre vos voix".

- Dialogue musical -
Elevée dans un environnement musical - père compositeur, mère chanteuse d'opéra ("J'ai été conçue dans une école de musique", plaisante-t-elle) et frère chanteur -, Hildur Gudnadottir a débuté le violoncelle à l'âge de 5 ans.

Elle tient sa force de caractère de sa grand-mère: "Communiste, elle fut l'une des premières médecins en Islande. Elle a réussi dans un monde qui n'était pas censé lui être accessible".

Elle lui doit également son attrait pour cette création musicale si particulière où les tonalités sombres et envoûtantes plongent immédiatement l'auditeur dans un univers mystérieux.

"Ma grand-mère m'a fait lire beaucoup de livres de détectives, des polars... cela transparaît dans ma musique, plutôt sombre", explique la compositrice, vivant désormais à Berlin.

"Je considère la musique comme une forme de communication où s'échangent des sentiments. C'est une machine à voyager dans le temps où le créateur dans son moment présent dialogue avec l'auditeur dans le futur", philosophe Mme Gudnadottir.

- "Connectée à la musique" -
Méticuleuse, elle se concentre sur le moindre détail dans ses créations sonores.

Après s'être rendue sur l'ancien site de Tchernobyl pour s'imprégner de l'atmosphère, elle a écouté des heures d'enregistrements d'un réacteur nucléaire lituanien pour en extraire un son particulier qui l'aida à confectionner la bande sonore de "Chernobyl".

"L'idée est qu'on puisse, par l'écoute, carrément ressentir les radiations", s'enthousiasme la musicienne.

Pour le "Joker", son rôle a particulièrement été déterminant.

Le réalisateur Todd Phillips "m'a demandé de composer la bande-son avant de filmer, en me basant seulement sur le scénario", raconte-t-elle. Cette technique, relativement rare, devait permettre à la star Joaquin Phoenix de se l'approprier pour en faire un outil au service de son jeu d'acteur.

"Il m'a fallu entrer moi-même dans la tête du personnage pour comprendre sa transformation", se remémore-t-elle.

"Je n'avais jamais ressenti une telle connexion physique avec une oeuvre auparavant: j'avais déjà en tête le personnage et sa psychologie, Joaquin l'a interprété exactement comme je me l'étais imaginé", s'émerveille la jeune femme.

Résultat: les 17 titres de la bande originale joués au violoncelle, à la fois inquiétants, dissonants et précis, subliment chaque scène pour renforcer la tension et accompagner la plongée dans la folie du personnage.

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