VIH : « Une découverte majeure et un potentiel thérapeutique énorme »

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    VIH : « Une découverte majeure et un potentiel thérapeutique énorme »
Publié le , mis à jour
Destination Santé

C’est une découverte très importante qui vient d’être publiée dans le Journal of clinical investigation, et elle est française : la société de biotechnologie spécialisée en immunothérapie Diaccurate, fondée en 2014 par le Pr Jacques Thèze et le Dr Philippe Pouletty, Directeur de Truffle Capital a mis en évidence le mécanisme expliquant comment le système immunitaire des personnes porteuses du VIH se paralysait, avant de s’affaiblir et de se fragiliser face à de multiples pathologies jusqu’au dernier stade, le Sida. Cette découverte ouvre la voie à une nouvelle thérapeutique, qui pourrait également être opérante dans le traitement de certains cancers. 

Destination Santé : Le virus du VIH a été découvert il y a 37 ans. Qu’avez-vous compris de nouveau?

Pr Jacques Thèze : Rappelons que dans le Sida, il y a deux étapes. D’abord, le virus du VIH touche le patient, avec une infection qui ressemble à une grippe passagère sans gravité. Ce qui est grave, c’est ce qui arrive après : une immunodéficience très profonde qui fait que les patients peuvent mourir d’une infection comme une pneunomie, ou d’un cancer type lymphome. C’est cette immunodéficience qui n’était pas comprise, et particulièrement le fait qu’après la phase chronique, seul un tout petit nombre de cellules étaient infectées : environ 1 sur 1000. C’est ce mystère que j’ai éclairci avec l’équipe de Diaccurate et Truffle Capital : on a trouvé dans le plasma des patients virémiques une enzyme susceptible d’attaquer les lymphocytes les plus importants du système immunitaire, les lymphocytes CD4.

D.S : Comment fonctionne ce mécanisme ?

Pr J.T. : Le virus envoie un tout petit bout de lui-même sur les lymphocytes, qui deviennent extrêmement sensibles à cette enzyme. C’est une enzyme digestive, normale, physiologique, et qui tout d’un coup devient pathogénique lorsqu’un petit bout du virus s’est fixé aux lymphocytes CD4. C’est cette enzyme qui fait que les patients vont devenir immunodéficients, et qu’ils vont mourir d’une autre infection ou du cancer. 

D.S : Cette découverte s’accompagne d’une nouvelle indication thérapeutique. De quoi s’agit-il ?

Pr J.T. : Nous avons caractérisé un inhibiteur de cette enzyme qui vient du pancréas. C’est un anticorps monoclonal humanisé. Chez la souris, nous avons pu montrer qu’il traite l’immunodéficience générée par cette enzyme. Nous avons donc là un candidat-médicament très sérieux : il va permettre au système immunitaire de redevenir fonctionnel, de se restaurer. On peut donc espérer réduire les trithérapies, les aménager, et, à long terme, peut-être, obtenir une rémission. Car les  trithérapies soignent le virus mais ne permettent pas au système immunitaire de se reconstituer. Il faut que les patients les prennent à vie, et c’est parfois problématique. 

D.S : Quelles sont les prochaines étapes ?

Pr J.T. : Nous avons fait une découverte majeure, qui contient un potentiel thérapeutique énorme, mais je préfère rester prudent : nous devons d’abord poursuivre des recherches de développement, sur l’animal puis sur l’humain. Nous pouvons simplement dire que nous sommes dans des stratégies très prometteuses de rémission du VIH, et pas seulement : nous avons retrouvé le même mécanisme dans certains cancers. Cela ouvre aussi des perspectives très prometteuses, après avoir fait la preuve que notre système est bien applicable à cette maladie.

A noter : Plus de 37 millions de personnes vivent avec le VIH dans le monde. En France, 6 000 nouveaux cas se déclarent chaque année.

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