Violences conjugales: un confinement à risque

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    Violences conjugales: un confinement à risque
Publié le , mis à jour
Destination Santé

Depuis plus d’une semaine, la France vit au ralenti, au rythme du confinement. Et parfois, de la violence. Les femmes victimes de violences conjugales sont rendues encore plus vulnérables par cette situation alertent associations, police, gendarmerie et justice. Le gouvernement demande une action coordonnée au niveau européen.

« Ça retarde tout. Quand vous décidez de partir, vous êtes dans une dynamique. Là, tout est arrêté ». Yvonne Guichard préside depuis 6 ans l’Abri Côtier, association de bénévoles qui vient en aide aux femmes victimes de violences conjugales. Basée à Concarneau (Finistère), l’association fait partie de la fédération nationale Solidarité Femmes, qui gère le numéro gratuit 39 19*. Elle est l’une des rares à tenir standard ouvert 7j/7, 24h/24. Et depuis une semaine, sa présidente constate : « on n’a pas eu beaucoup d’appels ».

La raison est évidente : « si une femme est confinée avec son mari violent, il est plus difficile pour elle de s’isoler. » Et donc, d’appeler à l’aide. Une situation largement partagée, selon la secrétaire d’Etat à l’Egalité entre les femmes et les hommes. Avec son homologue italienne, Marlène Schiappa a envoyé un courrier à la commissaire européenne à l’Egalité : elles dressent « le même constat de baisse drastique du volume d’appels des femmes aux numéros d’écoute ». Et demandent « quelles modalités seront mises en œuvre pour que l’Union européenne appuie (…) les dispositifs pour les femmes victimes de violences ».

« Tout est plus compliqué »

En attendant, sur le terrain, les associations se débrouillent comme elles peuvent. A l’Abri Côtier où les bénévoles sont presque toutes retraitées, les accompagnements en tête à tête pour les démarches administratives ou la recherche d’hébergement d’urgence sont limités au strict minimum : « on privilégie le téléphone. On doit faire attention, on est des personnes à risque ». Et quand il faut aller chercher un « téléphone grave danger » au tribunal, on envoie les plus jeunes.

Parmi les rares femmes qui ont appelé depuis le début du confinement, « une personne a refusé de donner son identité. Ça n’arrive jamais ». Et une autre, déjà suivie par l’association, qui venait de rejoindre un hébergement d’urgence. Elle s’est retrouvée « coupée de toutes relations sociales, dans un isolement absolu. Selon les villes, la prise en charge peut être compliquée, car depuis le début du confinement, tout est plus compliqué. Et encore, ici, ça va ». 

Contentieux prioritaires

Ailleurs aussi, on s’organise. A Angers, par exemple, SOS Femmes 49 a créé une adresse mail spécifique : urgence.covid19@sosfemmes49.fr. A Nantes, le centre d’accueil et de prise en charge globale Citad’Elles est fermé, sauf pour les situations d’urgence, mais reste accessible par téléphone. A Nancy, Metz et dans le territoire de Belfort, mais aussi à Nice, Alès, Lille ou Paris, les associations peuvent être jointes grâce un numéro de téléphone portable. Pas besoin de se cacher pour parler, un SMS suffit.

Mais après ? Une fois les situations connues, « y a-t-il toujours des effectifs de police et de gendarmerie pour s’occuper de ces sujets ? », se demande Yvonne Guichard.  « Y a-t-il des instructions précises pour l’éviction du conjoint violent ? » Oui, a répondu le ministère de la Justice dans un communiqué, alors que les tribunaux tournent eux aussi au ralenti : les comparutions ou audiences relatives aux mesures de protection urgentes de victimes font partie des contentieux prioritaires. L’éviction du domicile familial et l’interdiction d’entrer en contact avec la victime peuvent être prononcées. Car « il est primordial de faire cesser la cohabitation, lorsque celle-ci est dangereuse ».

A savoir : La plateforme gouvernementale « Arrêtons les violences » reste active pendant la période du confinement. Elle regroupe les numéros à appeler et permet le signalement en ligne. Autre solution : télécharger l’application App-Elles, qui permet de déclencher un appel discret vers 3 proches de confiance, des numéros d’urgence et sur la plateforme de signalement du ministère de l’Intérieur. Elle permet aussi une géolocalisation immédiate.

* Le 39 19 est le numéro national de référence d’écoute téléphonique à destination des femmes victimes de violence. Il oriente les personnes concernées vers les dispositifs d’accompagnement locaux.

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