Aurélie Brégier : "Les femmes battues auront du mal à donner l’alerte"
La période de confinement peut être critique pour les femmes victimes de violences conjugales. Aurélie Brégier, directrice du Centre d’information sur les droits des femmes et des familles de l’Aveyron, fait le point.
Craignez-vous que la période de confinement engendre une augmentation de cas de violences conjugales ?
Oui, le huis clos familial est malheureusement propice à cela. D’autant que le confinement pourrait provoquer de la consommation d’alcool, de l’inactivité, du stress, etc. Autant de causes aux violences.
L’autre problème de cette situation, c’est que les femmes battues auront du mal à donner l’alerte. On sait qu’elles agissent en général lorsque leur compagnon et leurs enfants ne sont pas présents. Là, ce sera difficilement le cas.
Avez-vous déjà eu des cas de violence à traiter depuis le début du confinement ?
On en a eu quelques-uns, mais moins que d’habitude. Probablement parce que le meilleur moment pour alerter, c’est quand le conjoint est au travail. On s’attend d’ailleurs à avoir une recrudescence à la fin du confinement.
Est-ce que le CIDFF de l’Aveyron a mis des dispositifs en place pour cette période particulière ?
Nous conservons une permanence téléphonique ouverte (1). Les cas sont transmis à notre référent violence qui rappelle la victime dans la journée, pour voir ce qui est possible de faire à distance. Actuellement, notre accueil de jour se fait uniquement par téléphone. Mais en cas de circonstances exceptionnelles, si on juge qu’il faut recevoir physiquement une victime, on peut le faire, en respectant les mesures sanitaires liées à l’épidémie.
Par ailleurs, nous pouvons toujours faire appel à la police ou à la gendarmerie pour extraire une femme de son domicile, s’il y a un grave danger pour sa vie ou celle de ses enfants.
Comme en ce moment tout le monde est chez soi, les voisins ont aussi un rôle à jouer pour alerter…
Ils peuvent signaler des cas de violence conjugale sur la plateforme de signalement en ligne (2), au 39 19, au 17 ou en nous appelant.
Dans le cas du voisinage, on se rend compte souvent que l’on n’ose pas parler, que l’on n’ose pas dire qu’il y a des cas de violences près de chez nous. J’invite les voisins à signaler lorsqu’ils s’en rendent compte. Cela peut aider à sauver une vie.
Autre conséquence de l’épidémie de coronavirus : la justice fonctionne au ralenti. Est-ce que cela pourrait faire courir un danger supplémentaire pour les victimes ?
A priori non, car les tribunaux continuent de fonctionner pour certains cas prioritaires et les violences faites aux femmes en font partie, toujours avec des comparutions immédiates quand cela est nécessaire.
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