Rodez. Charlotte et Paul : "Il y a un gros manque d’équipements en Martinique"

  • Paul et Charlotte doivent rentrer en France au mois de mai : « normalement. ».
    Paul et Charlotte doivent rentrer en France au mois de mai : « normalement. ». Repro CPA
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Aurélien Delbouis

Elle est infirmière, lui kiné. Installés depuis un an et demi sur "l’île aux fleurs", les Ruthénois Charlotte Sarret et Paul Cenraud devaient rentrer en Métropole en début de semaine. L’épidémie de Covid-19 en a décidé autrement. Témoignages.

Le plan initial n’était pas vraiment pas celui-là. En partant exercer un an en Martinique, Charlotte et Paul n’imaginaient pas prolonger l’expérience plus que de raison. "Objectivement, il nous tardait de rentrer, la Martinique est une île superbe mais on en avait fait le tour. On est quand même loin de tout ici", reconnaît Paul, confiné depuis le 13 mars dans le petit pied-à-terre antillais du couple. Kiné de formation, le Ruthénois de 24 ans a, Covid oblige, laissé ses patients depuis cette date. "L’ordre des kinés nous a invités à stopper les activités en cabinet. On n’a pas voulu prendre de risque, on a donc décidé de tout arrêter, même l’activité à domicile. On ne garde que les patients qui ont besoin de soins vitaux et urgents mais ils sont très peu nombreux."

Deux masques par jour

S’il est reste chez lui à compter les jours qui le séparent d’un retour en France, ce n’est pas le cas de sa compagne, Charlotte, 23 ans, qui enchaîne les gardes depuis le début de l’épisode de Covid-19. Et avec la progression du nombre de cas, les choses s’accélèrent dangereusement pour elle. "Je travaille dans un service de rééducation pour personnes amputées. Mais nous venons d’apprendre que notre hôpital allait être réquisitionné pour accueillir des patients Covid."

Surchargé par un nombre de patients en hausse constante sur cette petite île des Caraïbes, l’hôpital de Fort-de-France cherche à libérer de l’espace. "Ils font comme ils peuvent, concède l’infirmière, mais tout ça implique d’adapter en urgence des structures qui ne le sont pas à première vue. Et de former des personnels en moins d’une semaine." Pas franchement rassurant. Inquiétant aussi le manque patent de moyens des personnels de santé : "surtout au niveau des protections, poursuit Charlotte. On a mis beaucoup de temps à recevoir des tests ou des masques. C’était déjà difficile à trouver en Métropole… Donc avant de les recevoir ici…"

Praticiens cubains en renfort

Même constat pour Paul. "Il n’y avait déjà pas de stock de masques avant la crise. Il y a vraiment un gros manque d’équipements en Martinique. C’est encore plus flagrant qu’en Métropole." Avec une commande de 1,5 milliard de masques par la France, les choses semblent évoluer… Trop doucement. "On travaille avec des masques chirurgicaux. Deux par jour, pour des prises de poste de 8 heures, déplore l’infirmière. Sachant que normalement, nous devons les changer toutes les 3 heures…" Pour soulager les équipes, un décret du 1er avril autorise les médecins étrangers à exercer dans les territoires ultramarins. Un plus ? Pas vraiment a critiqué le Dr Jacques Breton, président de l’union régionale des professionnels de santé des médecins libéraux de Guyane. "Nous ne manquons pas de médecins et ils sont encore plus disponibles, du fait de la raréfaction des consultations. Nous manquons de matériel et de plateaux techniques. Toujours nous lancer à la figure les médecins cubains, c’est un réel manque de considération des médecins publics et privés". Dont acte.

Problème d’approvisionnement

Dans ce contexte particulièrement tendu, Charlotte vient de prolonger son contrat. "Je devais quitter la Martinique le 2 avril pour un nouveau poste en Métropole. Le Covid chamboule nos plans mais je préfère me rendre utile ici plutôt que de devoir respecter une "quatorzaine" avant d’exercer à nouveau en France." Demeure aussi le problème du retour. Depuis la suspension des vols entre Fort-de-France et la Métropole, pas évident – sinon impossible – de rentrer en France. "Nos vols ont été annulés du jour au lendemain. Nous avons cherché à rentrer par tous les moyens mais les compagnies aériennes n’ont pas joué le jeu. Les prix des billets ont explosé ! Impossible de joindre le service client. À l’aéroport, notre compagnie m’a même demandé de payer 25 euros pour parler à un conseiller. Honteux", plaide Paul. Dans ces conditions, les deux Ruthénois ont décidé de prendre leur mal en patience. "On n’est pas perdus au bout du monde. On a tout ce qu’il faut. Enfin presque", plaisante le kiné pour qui les "faire les courses" s’apparente à un parcours du combattant. "On vit dans petit village de campagne. Les supérettes ont beaucoup de mal à être approvisionnées. Il nous reste Fort-de-France, à une heure de route, avec des rayons vides ou trois yaourts qui te coûtent un bras ! Mais on s’adapte." Avec 128 cas avérés lundi soir, 15 personnes en réanimation et 3 décès, la Martinique est "durement frappée" et "connaît chaque jour une aggravation" du bilan sanitaire lié au coronavirus, déplore le préfet Stanislas Cazelle.

Couvre-feu décrété mercredi

Après Mayotte et la Guyane, l’ensemble de la Martinique et de la Guadeloupe sont placées à depuis mercredi soir sous couvre-feu entre 20 heures et 5 heures, pour faire respecter les mesures de confinement destinées à lutter contre l’épidémie de coronavirus. « Les regroupements en fin de journée me préoccupent le plus », a déclaré lors d’une conférence de presse le préfet de Martinique Stanislas Cazelle, qui a aussi décidé de « fermer tous les commerces alimentaires au plus tard à 19 heures ». « Il y a trop de personnes qui vont faire leurs courses trois fois par semaine », « trop de personnes qui continuent à aller trop souvent dans les magasins » pour y retrouver des connaissances, a-t-il encore déploré.
 

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