L'Anglaise George Eliot entre dans la Pléiade

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    La romancière anglaise du XIXe siècle George Eliot entre jeudi dans la Pléiade Granger/Shutterstock
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(AFP) - Elle avait choisi de s'appeler George, comme la Française George Sand: la romancière anglaise du XIXe siècle George Eliot entre jeudi dans la Pléiade, avec deux chefs-d'oeuvre qui restent méconnus en France.

"Middlemarch, précédé de Le Moulin sur la Floss" est le titre de ce volume de 1.600 pages dans la collection de référence des éditions Gallimard.

Dans le monde francophone, cette autrice n'a pas aujourd'hui la renommée de Jane Austen, des soeurs Brontë ou de Virginia Woolf. Pourtant elle la mériterait.

"Lorsqu'elle mourut, le 22 décembre 1880, George Eliot fut célébrée comme le plus grand romancier anglais contemporain. Mais son oeuvre ne tarda pas à tomber dans le discrédit attaché, au début du XXe siècle, à tout ce qui relevait de l'époque victorienne", explique en préface l'universitaire Alain Jumeau.

Mary Ann Evans était née en 1819, dans la classe moyenne, d'un père qui avait parié sur son intelligence. Elle mit à profit son instruction en devenant une fine lettrée, traduisant le latin, le français et l'allemand.

Or à l'époque, à propos des femmes écrivains régnait un préjugé tenace: incapables de romans profonds et sérieux, elles étaient douées pour les bluettes. Des "Romans stupides écrits par des dames", comme elle avait intitulé un pamphlet antérieur à ses propres fictions. Son pseudonyme androgyne devait lui offrir une critique honnête.

On aurait tort de la réduire à une féministe. D'ailleurs, sa postérité est compliquée auprès de ce mouvement. "Eliot ne mit jamais en scène de femmes accomplies en dehors de leur foyer, des femmes qui auraient bravé les conventions de leur milieu, mais elle a su retracer avec bienveillance et brio leurs défaites au sein d'un monde qui sous-estimait gravement leurs capacités", selon Alain Jumeau.

- Vie non conventionnelle -

"Le Moulin sur la Floss" (1860) est l'histoire, parsemée d'éléments autobiographiques, d'un frère et d'une soeur. Lui réussit dans les affaires, elle souffre de la lourdeur des chaînes auxquelles toute femme est attachée dans une société rurale conservatrice. "L'Allemagne, l'Italie, bien souvent la France me laissent indifférent. Mais deux pages du Moulin sur la Floss me font pleurer", racontait l'anglophile Marcel Proust.

La parution de l'ouvrage fut l'occasion de révéler que derrière le pseudonyme se cachait une femme. Jusque-là, la presse spéculait pour savoir si l'auteur d'un premier roman apprécié par la reine Victoria elle-même, "Adam Bede", était un pasteur ou quelqu'un d'autre.

"Middlemarch", sorti par volumes successifs en 1871 et 1872, fut un événement littéraire européen. Le roman paraissait en même temps (en version originale) à Londres, Paris et Berlin. Mais la traduction attendit longtemps pour cette fresque ambitieuse située dans une ville fictive des Midlands qui rappelle fortement Coventry.

"La plupart de ceux d'entre nous qui choisissent un sujet de prédilection se souviennent d'une certaine heure, un matin ou un soir, où nous sommes montés sur un haut tabouret pour atteindre un volume inexploré, ou bien nous avons écouté, bouche bée, un nouvel orateur, ou bien, faute de livres, nous avons commencé à écouter nos voix intérieures, et nous voyons là la première trace du début de notre amour", écrit-elle. Pour elle, c'était le roman.

Mercredi sort par ailleurs la traduction d'un roman biographique retraçant sa vie non conventionnelle, amoureuse surtout. Dans sa version originale, "Une passion pour George Eliot" de la Britannique Kathy O'Shaughnessy ("In Love With George Eliot", 2019) avait été salué par la critique. Entre autres parce qu'il reste prudent sur les raisons qu'eut son dernier compagnon, de 20 ans son cadet, de se jeter dans le Grand Canal lors de leur voyage de noces à Venise.

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