Villefranche-de-Rouergue : Aline Bourgade s’interroge sur la mort de son frère

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  • Patrick Bourgade avait 57 ans.
    Patrick Bourgade avait 57 ans. REPRO CPA
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F.D.

Son frère Patrick est décédé le lendemain matin d’une visite aux urgences de La Chartreuse où on lui avait diagnostiqué une occlusion intestinale.

Lorsqu’elle nous reçoit dans sa maison de l’est de Montauban, Aline Bourgade a les traits tirés et les yeux rougis. Son état d’anxiété et de choc trahit les deux nuits blanches qu’elle vient de passer, à ressasser une nuit dramatique : celle du décès de son petit frère Patrick, 57 ans, de 14 printemps son cadet. Une mort dont on ignore toujours la cause exacte, mais dont elle regrette les circonstances, mettant en cause les urgences de l’hôpital de Villefranche-de-Rouergue, en Aveyron.

Tout s’est joué entre lundi et mardi dernier, à Beauregard, un petit village lotois où habite Patrick Bourgade à la frontière avec le Tarn-et-Garonne et l’Aveyron. "Je l’ai eu au téléphone dans la journée, mon frère et ma sœur aussi. Il n’y avait aucun problème, même si apparemment dès le repas de midi, il se plaignait d’une petite douleur dans le ventre", se souvient cette infirmière montalbanaise à la retraite. Elle ne l’inquiète pas plus que ça et il ne montre jamais qu’il est touché. "C’est son tempérament d’agriculteur", explique Aline Bourgade.

Une douleur abdominale persistante

Pourtant, la douleur revient quelques heures plus tard, en fin d’après-midi. "Il va alors consulter son médecin traitant à Caylus qui, à la palpation, s’inquiète vraiment de son état. Patrick, qui n’est pas vraiment douillet, se tord de douleur. Son médecin décide alors d’appeler le Samu et le garde à ses côtés pendant 45 minutes à une heure, reprend Aline. Il est pris en charge vers 19 heures et emmené aux urgences de l’hôpital de Villefranche. Les examens ne montrent rien d’évident. Les médecins pensent que c’est une occlusion intestinale, lui donnent un médicament et le renvoient chez lui."

La douleur semble être calmée. Patrick est ramené à Beauregard par un ami. Sur la route, selon sa sœur, les douleurs reprennent. L’ami en question lui propose de faire marche arrière. "Ça va passer lui répond mon frère", explique Aline Bourgade. Les douleurs ne cesseront pas. Elles persisteront toute la nuit que Patrick passe chez lui à Beauregard avec une amie.

Au petit matin, il n’est pas bien du tout. "Son amie, n’ayant pas de téléphone et n’arrivant pas à déverrouiller celui de mon frère, va chercher de l’aide dans le village. Ils le retrouvent inanimé. L’homme commence alors un massage cardiaque pendant que les secours sont appelés", narre Aline Bourgade, dont la voix tremble de plus en plus. "Mais ils n’ont rien pu faire pour le sauver. Patrick est mort aux alentours de 8 h 30", termine-t-elle, avant de craquer complètement.

"Pourquoi ne pas le garder la nuit en observation ?"

Elle se reprend : "Aujourd’hui, on ne sait toujours pas de quoi est mort mon frère. L’hôpital campe sur ses positions en parlant d’occlusion intestinale, mais on ne meurt pas de ça ! assure l’ancienne infirmière. Pourquoi ne l’ont-ils pas gardé en observation si ses douleurs étaient si intenses ?", s’interroge la septuagénaire, qui se remet à peine du décès de sa mère de 97 ans, voilà trois semaines.

Aline Bourgade pense alors à porter plainte. "J’en ai discuté avec mes trois frères et sœurs. Ce serait s’engager dans des démarches que nous ne sommes pas sûrs de supporter. D’autant que le processus d’inhumation (l’incinération était prévue vendredi) est lancé."

Pourquoi témoigner dans ce cas ? lui demande-t-on. "Je veux qu’il y ait une prise de conscience. Les personnes qui vivent à la campagne ont un premier handicap : les hôpitaux sont parfois très éloignés de leurs domiciles. Si, en plus, ils ne sont pas pris au sérieux lorsqu’ils s’y présentent, c’est la double peine !", tempête Aline Bourgade, qui assure n’avoir rien à reprocher au médecin généraliste caylusien. "Être une petite structure n’est pas une excuse. Les gens de la campagne ont le droit d’être pris en charge sérieusement", termine Aline Bourgade.

« Tous les examens ont été réalisés »

Face à ce récit, l’hôpital de Villefranche a évidemment été sollicité pour réagir. Et c’est par la voix de son directeur, Bertrand Perin, que l’établissement donne sa version des faits. « Nous avons effectivement pris en charge M. Bourgade en début de soirée. D’après nos services, il est arrivé aux urgences avec les pompiers de Caylus. Tous les examens ont été faits en fonction des symptômes décrits par le malade, à savoir des douleurs abdominales », rappelle M. Perin. « C’est un médecin, que j’appellerai senior, qui s’est occupé de M. Bourgade, qui l’a ausculté. J’ai sollicité le responsable du service des urgences qui m’a affirmé qu’il n’aurait pas fait mieux », assure le patron du centre hospitalier, se retranchant par la suite derrière le secret médical. « Un traitement a été dégagé et prescrit. Lorsqu’il s’en va, le patient évalue sa douleur à zéro », relate Bertrand Perin.
C’est une équipe du Smur de Villefranche qui constatera malheureusement le décès de Patrick Bourgade le lendemain matin. « Nous restons à disposition de la famille pour répondre à ses questions », conclut le directeur de la Chartreuse.
 

Sollicité, le médecin de Caylus n’a pas souhaité témoigner.

 

 

 

 

 

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