Aveyron : le village d'Estaing, jardin secret de Giscard

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  • Valéry Giscard d'Estaing dans le village lors de la Saint-Fleuret en 2013.
    Valéry Giscard d'Estaing dans le village lors de la Saint-Fleuret en 2013. repro cpa
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Olivier Courtil

L’ancien président de la République fit du château d’Estaing, l’une de ses demeures en 2005 pour retracer sa carrière politique.

Discret mais pas secret. Valéry Giscard d’Estaing, décédé mercredi soir à l'âge de 94 ans, recevait en personne les visiteurs en son château dont il était propriétaire depuis 2005, lors des Journées européennes du patrimoine. Il faut dire qu’il est l’instigateur de cet événement culturel. Il recevait dans son château Aveyronnais comme il se rendait dîner chez les Français quand il était président. Simplement.

La culture était devenue l’unique sujet abordé publiquement, se refusant à tout commentaire politique. Pour autant, Valéry Giscard d’Estaing contactait à chaque arrivée en terre aveyronnaise Jean-Claude Anglars, sénateur, conseiller départemental et ancien responsable du canton d’Estaing, pour se tenir au fait de l’actualité politique locale. "On échangeait sur la situation du département.Il gardait un œil attentif sur l’actualité. Il a apprécié le travail effectué sur le plan sanitaire avec les Maisons de santé et sur le plan culturel avec la salle multiculturelle du Nayrac.C’était un homme d’estime et de confiance qui avait été touché par l’humanisme et l’engagement social de Simone Anglade."

Son frère a été maire

Estaing était son jardin secret. Celui de son grand œuvre réalisé.Son frère, Olivier, avait tracé la voie en étant maire du village de 1965 à 1977. C’est avec lui que Valéry était devenu acquéreur du château d’Estaing. Mais, dès 1960, l’ex-président de la République s’était rendu à Estaing.Lucienne Bernat-Romieu alias Louisette, mémoire vivante du village, s’en souvient comme si c’était hier. "Il était venu participer au cinquième centenaire de la naissance de l’évêque François d’Estaing en qualité de secrétaire d’État aux finances. C’était une journée flamboyante comme on en a jamais eu d’autres. Je vous remercie pour votre allocution m’avait-il dit après le mot d’accueil et il m’avait félicité pour ce premier son et lumière."

Elle en a gardé une photo où le président lui parle, qui figurera dans son livre qu’elle prépare sur le village. Cette photo a refait surface en 2005 quand Valéry Giscard d’Estaing a organisé une réunion pour informer la population de son projet de rachat. "Je vous dédicacerai la photo", avait-il alors confié. Projet resté lettre morte. Oser approcher, parler comme demander une faveur à un président, est compliqué.

"Il était sympathique, agréable et voulait être près du peuple, il avait envie de parler dans la rue, mais la fonction impressionnait les gens. Il avait toujours une cour autour de lui", dit en ce sens Gérard Vayrou, ancien conseiller municipal et membre de l’association des Amis du château d’Estaing. "Des gens charmants, simple et avenant" sont les mots qui viennent à l’esprit de Marie-José Romieu, veuve de Léon Romieu, maire du village lors de la vente du château au président pour qualifier le couple qu’il formait avec Anne-Aymone. Pour l’ancien maire Jean Pradalier : "Il avait à la fois de l’estime à l’égard de la population et de la distance que requiert sa fonction". Et d’ajouter : "Il était venu inaugurer le quai de l’Amiral, il avait des connaissances historiques et une culture exceptionnelle, une hauteur de vie, c’était un plaisir de l’écouter."

"C’était sa danseuse, il y a laissé des plumes.Le déficit est remboursé par la Fondation qu’il a mise sur pied pour ne pas que ses enfants paient la succession"

Une mémoire vivante comme l’est devenu aujourd’hui son château. À tout prix. Le château d’Estaing est devenu au fil du temps sa (ré) création.  "C’était sa danseuse, il y a laissé des plumes.Le déficit est remboursé par la Fondation qu’il a mise sur pied pour ne pas que ses enfants paient la succession car ils n’étaient pas chauds", confie Gérard Vayrou qui était présent lors de l’achat du château par VGE le 19 avril 2005 à Paris.

Et d’ajouter : "Pour faire face au déficit, il demandait chaque année à augmenter le prix d’entrée. Jacinte, sa fille cadette qui a aussi disparu, était de mon avis et lui répondait : ce n’est pas Versailles quand même !" Le couple présidentiel s’est rendu à plusieurs reprises prendre l’apéritif chez les Vayrou. "Il me demandait si Anne-Aymone, aussi adorable, pouvait venir pour voir la procession de la Saint-Fleuret sur le balcon."

Enterré dans le Loir-et-Cher

Valéry Giscard d’Estaing aurait aimé vivre simplement. Pas aisé quand on a été président. Avec le temps, les mauvais moments s’oublient. Estaing était sa bulle de respiration. C’est à Authon, dans le Loir-et-Cher, où a grandi la famille de Giscard d’Estaing, non loin de Tours où il fut hospitalisé le 15 novembre dernier qu’il sera enterré. Sur un terrain acquis en 2012 jouxtant le cimetière du village, dans un mausolée devenu lieu funéraire pour y rejoindre sa fille cadette Jacinte, à l’âge de 94 ans.

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