Firmi : la vie sous le grand chapiteau de Stéphan Gistau

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  • Cette grande famille du cirque que Stéphan Gistau a fait sienne.Repro CPA
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  • Le Firminois n’a pas vu le temps passer.   Photo J.B.
    Le Firminois n’a pas vu le temps passer. Photo J.B.
Publié le
Joel Born

Voilà près de trente ans que le Firminois Stéphan Gistau vit de sa passion pour le cirque. Cette passion qui ne l’a jamais quitté depuis son adolescence. Rencontre avec un mec loyal.

"Le cirque, c’est un esprit d’équipe, de la polyvalence, de l’entraide, de la tolérance, de la discipline…

Certains se souviennent encore de ses toutes premières expositions d’adolescent sur le cirque. Depuis, le môme Gistau a bien grandi mais le Firminois de 46 ans a toujours le regard tourné vers cette piste aux étoiles qu’il n’a depuis l’adolescence pratiquement jamais quittée. Stéphan se souvient encore de ses premières sensations d’enfant lorsqu’il se retrouvait avec ses parents, sous le grand chapiteau du cirque Pinder Jean Richard, place du Méthanol, à Decazeville. " L’odeur ocre des fauves m’attirait déjà et j’adorais quand le convoi du cirque arrivait en ville avec tous ses camions. Une passion c’est dur à expliquer, mais la première fois que j’ai vu un cirque, un truc s’est passé. "

Près de 30 ans de cirque

Stéphan Gistau l’avoue : "Je n’ai pas la notion du temps qui passe. D’ailleurs je n’ai jamais eu de montre, mais avec ça, je suis très ponctuel." Les pieds sur terre, mais la tête toujours dans les étoiles, voilà près de trente ans que le quadragénaire aveyronnais mène une vie d’itinérance. Collectionneur à ses débuts, il a vite franchi le pas, effectuant son premier stage dès l’âge de 17 ans avec un dresseur de tigres de chez Bouglione. "C’est là que j’ai appris le respect des animaux." Peu de temps après, alors qu’il a tout juste 18 ans, il se retrouve propulsé sur la piste du cirque Pinder Jean Richard, dans la peau de Monsieur Loyal. "Je me suis vite senti imprégné et je n’ai jamais arrêté ou presque. Ça s’est fait naturellement."

Bonne gueule, le jeune Gistau avait assurément le physique de l’emploi et le sens du spectacle. Bouglione, Pinder- Jean Richard, Medrano, Amar (18 ans) dont il est directeur artistique, le Cirque sur l’eau, le spectacle des Mille et une nuits d’Aladin au cirque de Noël de Bordeaux. Stéphan en a vécu des expériences. Il a même créé son agence artistique, au milieu des années 90, avec Marc Brugel de Vaureilles. Quand on lui parle de carrière, il préfère évoquer un parcours avec des hauts et des bas, des échecs et de fortes déceptions. "C’est la notion de partage qui m’intéresse. Je suis un homme de passion, de partage, pas d’argent, insiste-t-il, et je suis content d’avoir mis le pied à l’étrier à pas mal de jeunes, dans le domaine du cirque et du spectacle vivant."

Le costume de Monsieur Loyal

Endosser le costume de Monsieur Loyal n’est pas toujours facile. "Tu portes le spectacle sur tes épaules. Parfois j’ai vécu des drames, des accidents mortels… Sur une grosse saison on pouvait faire pas loin de 500 représentations, en 320 jours de tournée, dans 100 à 150 villes, avec parfois quatre représentations par jour. Il faut avoir une bonne hygiène de vie mais le cirque est un milieu assez sain." Et si vous le taquinez, en lui demandant s’il est toujours un mec loyal, il vous répondra tout simplement : "ça dépend des heures et des journées… mais quand je vois comment le monde évolue, je me dis que je reste assez droit…"

Chacun est à sa place

Depuis février dernier, le Firminois a retrouvé le cirque Amar, qui appartient à Firmin Bouglione, avec la nouvelle équipe de la famille Caplot. Une quarantaine de personnes, avec des chevaux, quelques fauves et chameaux, pour un nouveau départ. " Dans les grandes villes, le cirque est bien vu. Dans une petite ville, tu bouscules le quotidien et on te marginalise un peu… ", poursuit Stéphan qui déteste l’expression "c’est le cirque !" synonyme d’une belle pagaille. " Rien n’est plus organisé qu’un cirque, avec une grande rigueur. Chacun est à sa place. Ce sont les légionnaires du spectacle et tout ça, sans aide de l’État. Le cirque itinérant classique n’a aucune aide. C’est le spectacle populaire par excellence. Il y a 30 ans, quand j’ai commencé, on disait que le cirque était mort, mais dans les années 90, ça restait quand même le troisième loisir préféré des Français." Le Monsieur Loyal aveyronnais n’en reste pas moins lucide. "Certains confrères se sont perdus. Les gens veulent revenir à l’essentiel. S’il n’y a pas l’âme du cirque, la vraie, c’est mort."

Les temps sont durs

Par deux fois, depuis le début de l’année, la tournée du cirque Amar a été interrompue par la crise sanitaire. Depuis le reconfinement du 30 octobre, la troupe est bloquée à Macon. " C’est quand même dur, ça rompt la dynamique et ça crée de l’incertitude. Le spectacle vivant, ce n’est jamais acquis… " Le cirque Amar va-t-il pouvoir reprendre la route d’ici la fin de l’année. " Cela reste flou, regrette Stéphan, je pense plutôt en janvier. "

Dans tous les cas, le Firminois a trouvé son bonheur sur la piste aux étoiles. "Le cirque, résume-t-il, c’est un esprit d’équipe, de la polyvalence, de l’entraide, de la tolérance, de la discipline. Avec ma caravane, j’ai dormi dans des endroits improbables et j’ai fait plein de rencontres. J’ai des amis partout dans le monde." Quant à son avenir, Stéphan n’y pense pas vraiment.

Le débat sur les animaux crée de vives tensions

"La noblesse du cheval en piste, c’est vraiment l’image du cirque. Mais je suis aussi fasciné par les fauves et les éléphants", confie le Firminois. De tout temps, des animaux ont vécu dans les cirques. Depuis quelques années, le sujet est devenu très polémique et la présentation d’animaux sauvages dans des cirques itinérants devrait être, à terme, interdite.

"C’est injuste pour des gens qui ont sacrifié leur vie pour des animaux qui sont tous nés dans les cirques, déplore Stéphan. Ces animaux je ne les sens pas malheureux et je n’ai jamais vu de maltraitances. Je n’aurais pas pu le supporter. Cela dit, comme pour tout, des abus, il y en a certainement. Ce que je peux dire, c’est que le dresseur est esclave de ses animaux. Celui qui ne le vit pas de l’intérieur ne peut pas le comprendre. L’animal ne pense pas comme un humain. Dans le débat, il y a beaucoup d’ignorance. ça crée des tensions et les gens deviennent agressifs. Tu ne peux pas avoir de discussion."

Les écrivains et le cirque

Dans le nouveau spectacle qu’il a imaginé pour le cirque Amar, Poésie en piste au cœur de l’œuvre, l’Aveyronnais rend hommage aux artistes, écrivains, peintres… qui ont évoqué le cirque : Toulouse-Lautrec, Cocteau, Hemingway, Picasso, Arthur Miller, Fernand Léger et bien d’autres. À Lyon, Stéphan Gistau a fait la rencontre de Jacques Bruyas, le président de l’Union des écrivains Rhône-Alpes Auvergne. Passionné de cirque, lui aussi, il lui a consacré plusieurs ouvrages, associant poètes et écrivains, et mis en scène son clown Zavator, au cirque Amar. Dans le prolongement de cette rencontre, Dominique Bragard est elle aussi tombée sous le charme et a écrit un livre sur le cirque et Monsieur Loyal Stéphan Gistau, dans la collection Les Étoiles du cirque, dirigée par Jacques Bruyas.

L’un des textes de Stéphan a également été repris par le ministère de l’Éducation nationale, dans le cadre du programme du Baccalauréat des Arts du Cirque. Assurément, l’une des plus belles récompenses pour ce Monsieur Loyal, "élégant et subtil, ce personnage d’une grande richesse artistique et humaine, à la fois attachant, entier mais aussi énigmatique", pour reprendre les termes de Firmin Bourdoncle, décrivant sa longue amitié avec ce jeune homme des années 90 qu’il avait remarqué autour de son chapiteau et dont la gentillesse forçait tous les barrages.

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