L’historien Matthieu Séguéla, trait d’union entre le Japon et l’Aveyron

  • Échanges entre Pierre Soulages et Matthieu Séguéla.	Crédit Hiroshi Watanabé
    Échanges entre Pierre Soulages et Matthieu Séguéla. Crédit Hiroshi Watanabé Reproduction Centre Presse - Hiroshi Watanabé
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Enseignant chercheur en histoire, installé depuis une vingtaine d’années au Pays du soleil levant, il est aussi un fervent passionné du parcours de Pierre Soulages.

Au Pays du soleil levant, il en est un qui porte en lui un brin d’âme aveyronnaise. Son nom ne laisse d’ailleurs pas de doute sur ses origines. Il s’agit de Matthieu Séguéla. "Le Ségala, c’est la terre de mes ancêtres, une terre de seigle belle et généreuse. Au fil des siècles, une partie de ma famille paternelle a pris racine sur le plateau de l’Aubrac, se partageant entre l’Aveyron et la Lozère" explique-t-il toutefois.

Depuis vingt ans, il vit à dix mille kilomètres de cette terre de ses ancêtres. Il est fonctionnaire détaché au lycée français international de Tokyo et chercheur associé à l’institut français de recherches sur la Japon (MEAE-CNRS). Son parcours ressemble à la quête de ces traits d’union entre le Japon et la France. Il reçut d’ailleurs le prix Shibusawa-Claudel avec la parution de son ouvrage "Clemenceau ou la tentation du Japon". Parmi tous ses traits, il en est un qui le passionne peut-être plus que tous les autres, celui dessiné par Pierre Soulages. "Très tôt, Soulages m’a parlé de son Japon, bien avant que je n’aille y travailler en tant qu’enseignant-chercheur", confie-t-il.

Mais c’est d’abord sous le sceau de l’histoire que Matthieu Séguéla a rencontré Pierre et Colette Soulages. Tous trois ont en commun également la ville de Montpellier où, à plusieurs années d’écart, ils ont effectué leurs études. "Dans sa maison-atelier de Sète où il m’a très gentiment accueilli avec son épouse Colette, Soulages a évoqué ses années d’études et de clandestinité à Montpellier pendant la Seconde Guerre mondiale. J’étais en train de préparer un livre et ce qui m’a le plus touché, c’est qu’il avait lu mon ouvrage Pétain-Franco où je décrivais la rencontre entre les deux dictateurs à Montpellier le 13 février 1941. Or Soulages a été témoin de cet événement historique. Il arrivait de l’Aveyron et en se rendant à son hôtel – Le clocher de Rodez – il a aperçu par hasard le Maréchal et le Caudillo en train de saluer la foule depuis le balcon de la Préfecture héraultaise…" raconte Matthieu Séguéla. "Soulages était consterné…"

C’est en 1994, juste avant l’inauguration des vitraux de Conques que les deux hommes se sont rencontrés. Matthieu Séguéla, chercheur dans l’âme, s’est alors mis en quête de retracer le parcours de Pierre et Colette Soulages lorsque ces derniers se sont rendus pour la première fois à Tokyo. "J’ai commencé à prendre des notes, à mener des recherches sur place et à retrouver des témoins de leur premier voyage à Tokyo et à Kyoto en 1958. Les souvenirs évocateurs de Soulages, les photographies artistiques prises par son épouse sont extraordinaires. Ce sont des témoignages rares d’une époque où ils étaient pionniers dans la découverte d’un autre univers esthétique" confesse Matthieu Séguéla.

Depuis, l’enseignant-chercheur entretient ce lien Aveyronno-japonais qui pourrait être symbolisé par "le fameux jardin de pierre du Ryōan-ji", à Kyoto. Un jardin qui rappelait des souvenirs d’enfance à Pierre Soulages. Pour les 101 ans de l’artiste, Matthieu Séguéla a d’ailleurs mis sur pied une exposition intitulée "Outre nature". "Sous l’égide du doyen des créateurs, cette exposition rassemblait des artistes et artisans de Kyoto et de l’Occitanie, deux territoires jumelés".

Auteur avec Mickaël de Saint-Chéron du livre "Soulages, d’une rive à l’autre", dans lequel ils tracent une sorte de "triangle d’or entre l’art de Soulages, l’Afrique noire et le pays du Soleil levant", Matthieu Séguéla est sans conteste marqué par cette rencontre avec Pierre Soulages. Qui le relie à jamais à la terre de ses ancêtres. "Ces hautes terres où le regard se libère à l’infini. Mais de tous les territoires aveyronnais, j’ai un faible pour le Ségala de Conques. Là, tout s’y mêle : nature, histoire, architecture et art…"

L’historien matthieu séguéla, trait d’union entre le japon et l’aveyron
L’historien matthieu séguéla, trait d’union entre le japon et l’aveyron Reproduction Centre Presse - Reproduction Centre Presse

Le Japon, invité régulier du Musée Soulages

Soulages et définitivement associé au Japon. Dans les sphères culturelles japonaises, on l’associe à un "trésor national vivant", distinction ultime. En 2018, le musée Soulages avait accueilli l’exposition Gutai, fruit d’un travail de collaboration mené le musée de la préfecture du Hyogo – province jumelée au département de l’Aveyron – et le musée Soulages à Rodez. Et qui a abouti prêt d’un ensemble d’une vingtaine de peintures de premier ordre du groupe Gutai. Ce musée, situé à Kobé, dispose d’un des plus grands fonds de peintures Gutai au Japon, avec le musée national à Tokyo.

Une démonstration de calligraphie avec la renommée Yukako Matsui avait enthousiasmé le pblic cette année-là. En 2019, l’artiste japonaise était revenue au musée Soulages ou Matthieu Séguéla, qui fait également partie des Amis du musée, avait donné ue conférence qui avait salle comble. En 2019, une cinquantaine de personnalités japonaises s’était retrouvée à la résidence de l’Ambassade de France, à Tokyo, pour souhaiter un heureux centième anniversaire au peintre de l’Outrenoir. A cette occasion l’ambassadeur de France avait pris la parole aux côtés de Matthieu Séguéla.

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