Rodez. Adrien Séguret : "J’ai appris à aimer ce travail de l'ombre"

Pour qui s’intéresse aux sports outdoor, la réputation d’Adrien Séguret n’est plus à faire. Passé par le cyclisme, le raid aventure et le trail, lui qui avait pris l’habitude de jouer les premiers rôles, a laissé derrière lui la compétition pour se consacrer pleinement au coaching. "Un rôle de l’ombre" complètement assumé qui l’occupe désormais "7 jours sur 7, 24 heures sur 24."

Installé à Annecy avec sa femme Anne-Lise Rousset, une des meilleures traileuses de sa génération, Adrien n’est heureusement pas du genre à procrastiner. C’est même plutôt le contraire, reconnaît cet "accro au sport" qui cumule autant de casquettes que d’envies. "Le programme est plutôt chargé, c’est vrai, mais je ne me plains pas. Pour moi, c’est avant tout un métier passion. Dans ces conditions, tu ne comptes pas tes heures… Il y a tellement de beaux projets, j’ai parfois du mal à refuser."

En plus de la vingtaine d’athlètes qui goûtent quasi quotidiennement aux programmes d’entraînement sur mesure de cet esthète de la performance, le quadra a pris en main le club local, l’ASPTT d’Annecy : un simple hors-d’œuvre dans un menu franchement copieux.

Relève du trail tricolore

Manager du team TSL Odlo quand il ne forme pas lui-même des entraîneurs pour la Fédération française d’Athlétisme (FFA), Adrien vient aussi de créer avec trois préparateurs sportifs, un podologue et un kiné-ostéopathe, l’Annecy Trail Running, le centre de formation du team Scott qui accompagne la relève du trail tricolore.

"En arrivant ici, j’en avais un peu marre de voir des jeunes à fort potentiel courir un peu n’importe comment. Sans méthode. Avec des potes, on en a parlé, avant, finalement, de créer Annecy Trail Running qui doit permettre aux jeunes d’accéder au plus haut niveau sans négliger les à-côtés : la santé, la nutrition, la récupération, le repos… Des données essentielles à la performance sur le long terme."

Pour quelle finalité ? "Intégrer l’équipe élite du team Scott. Permettre aussi à nos vingt jeunes de se montrer, d’être en capacité de briller en course pour pouvoir intéresser d’autres équipes."

Une fabrique de champions perturbée par la crise du Covid-19. "J’aimerais maintenant pouvoir valider cette préparation sur des courses. Mettre en valeur le travail effectué. Pour l’instant hélas, la plupart des rendez-vous sont annulés. Certains juniors ne participeront peut-être jamais à une course dans cette catégorie… C’est dur. Pour un sportif de haut niveau qui s’entraîne une à deux fois par jour, la période est mentalement très difficile à vivre."

Homme de l’ombre

Si l’avenir reste incertain, le coach a coché malgré tout quelques dates sur son agenda 2021. Pour lui – il devrait s’aligner au départ du marathon de Francfort pour servir de lièvre à une de ses élèves – mais surtout pour ses athlètes. Recordman de la traversée des Vosges cet été (203 km pour 7 400 m D + avalés en un peu moins de 27 heures), le traileur Maxime Grenot sera très attendu sur le mythique UTMB annoncé fin août.

"J’attends aussi beaucoup de Benjamin Roubiol, une pépite, de Clément Molliet, le champion de France en titre, de Damien Lambert, Arnaud Bonin". Des trésors du trail français que l’Aveyronnais suit comme le lait sur le feu. "Ce qui me fait rêver dans le métier d’entraîneur c’est de faire briller l’athlète, le coéquipier, comme le fait un numéro 9 ou un 10 en rugby. J’ai appris à aimer ce travail de l’ombre. Avoir sa petite part dans une victoire reste très gratifiant."

Le mental aussi

Savoir s’adapter au tempérament de son athlète et tout mettre en œuvre pour optimiser chacune de ses qualités : voilà pour la "recette Séguret". La recette du succès, confirme Victor Santos, président du Vélo Club Rodez qui observe le parcours de l’Aveyronnais depuis ses premiers tours de roue dans la préfecture.

"Adrien sait où il va. Il a du vécu, une véritable expérience du haut niveau. Il est très perfectionniste, carré. Il sait tirer le meilleur des athlètes sans pour autant s’enflammer. Pas étonnant que sa voix porte."

"Le côté mental compte énormément dans la performance, poursuit Adrien. Il faut savoir actionner les bons leviers. Très différents d’un athlète à l’autre. Chacun est unique. Chez certains, je sais qu’il faut les piquer. Leur proposer des séances qui ne vont surtout pas les mettre en valeur. Le mental, l’ego va faire la différence. Avec d’autres, c’est le clash assuré."