Millau. Nicolas Michaud, compositeur VFX, talent brut des effets spéciaux

Abonnés
  • Dans son appartement qui lui fait office de studio, le Millavois peaufine chaque plan pour obtenir un rendu le plus réaliste possible.	DR
    Dans son appartement qui lui fait office de studio, le Millavois peaufine chaque plan pour obtenir un rendu le plus réaliste possible. DR
Publié le
Aurélien Delbouis

Bac en poche, le Millavois s’est exporté au Québec voilà cinq ans par passion pour le 7e art. Aujourd’hui compositeur VFX chez Folks, ce jeune talent des effets spéciaux redonne vie aux fonds bleus - ou verts - dans une industrie en pleine expansion. Rencontre.

Montréal, son Mont Royal, sa ville souterraine, sa poutine, son équipe de hockey et depuis peu son industrie cinématographique… Si l’on doit à Georges Méliès l’apparition des effets spéciaux aux premières heures du XXe siècle, c’est bien dans la plus francophone des villes américaines que l’industrie des effets visuels – ou VFX, noms que l’on préfère désormais à effets spéciaux – a pris racine.

C’est là que nous avons retrouvé Nicolas Michaud. Millavois de 24 ans, venu sur les rives du Saint-Laurent pour vivre sa passion pour le 7e art. "En arrivant ici, comme tout élève qui débarque dans une école de cinéma, je rêvais de devenir réalisateur, mais j’ai rapidement changé de cap."

Après trois années d’étude option Arts et technologies des médias (ATM) à Jonquière, petite ville "du bout du monde" située à cinq heures de Montréal, il préfère finalement le travail de postproduction et embrasse le métier de compositeur VFX ou compositeur numérique.

"Ce qui, attention, n’a rien à voir avec un compositeur de musique, annonce le jeune homme. J’interviens en réalité en fin de chaîne. Une fois les acteurs filmés devant un fond bleu, mon rôle consiste à incruster un arrière-plan en 3D et à le rendre vivant." Le résultat doit être impeccable, "photo-réaliste" précise ce magicien de l’image.

 

Son nom au générique

"L’ensemble doit fonctionner. Il faut vraiment y croire, veiller à tous les petits détails, à enlever chaque petit bout de bleu : la partie la plus fastidieuse ! Je dois aussi reproduire les ombres, l’effet du vent dans les feuilles, pour que le tout semble totalement réaliste." Un travail minutieux pour des scènes qui à l’écran durent généralement moins d’une seconde. "Une dizaine, grand maximum, reconnaît Nicolas. En fonction des attentes, je peux donc passer six heures pour un plan ou une semaine si le travail est plus complexe, demande d’intégrer davantage d’animations."

Frustrant d’avoir à peine le temps d’apprécier son travail sur écran ? "Oh non, s’amuse le Millavois, c’est vrai qu’au cinéma, quand tu veux montrer ton travail à tes parents, tu n’as pas le temps d’annoncer le plan qu’il est souvent déjà trop tard. Mais tu sais, personnellement, tout le travail que tu as engagé pour être fier de ce plan. C’est aussi plutôt cool d’avoir son nom au générique d’un film… même si la liste est de plus en plus longue."

Depuis Méliès, le champ des effets visuels au cinéma s’est considérablement développé. Rares sont les productions françaises ou américaines à ne pas faire appel à cette béquille technologique. Effet de ralenti ou d’accéléré, simulation de feu ou de pluie, effet de brume… Des créatures de films de science-fiction au cinéma fantastique en passant par la télévision, la publicité ou les séries, les effets spéciaux sont aujourd’hui partout. Et prennent une ampleur que l’on ne soupçonne pas.

Sur un film à gros budget de type superhéros, les effets visuels représentent aujourd’hui de 30 à 40 % du coût total de la production qui tutoie allègrement les 100 millions de dollars…

"Les choses rentrent dans l’ordre"

Considérée comme la nouvelle plaque tournante de cette industrie florissante, la ville de Montréal et ses nombreux studios VFX ont ainsi généré près d’un demi-milliard de dollars de chiffre d’affaires en 2018. Et si la crise sanitaire a mis à l’arrêt de nombreux projets, rien ne semble en mesure aujourd’hui de stopper plus longtemps l’appétit des réalisateurs pour les effets visuels.

"La période un peu plus creuse est derrière nous. Et malgré les effets de la crise sanitaire, les choses commencent à rentrer dans l’ordre. Les gens ont, je crois, plus que jamais besoin d’être divertis", anticipe le Millavois. Comme beaucoup d’autres talents, Nicolas vient d’ailleurs signer un nouveau contrat chez Folks VFX, le studio qui a notamment travaillé sur Mrs America, Fargo, La Belle et la bête avec Léa Seydoux et Vincent Cassel. Plus récemment sur Premier Contact, superproduction signée du réalisateur Denis Villeneuve, très attendu en fin d’année avec la sortie de Dune, nouvelle adaptation du best-seller mythique de Frank Herbert.

"Encore des choses à faire ici"

L’Aveyronnais de Montréal, qui a notamment travaillé sur Jumanji II, Crawl, Shazam ! ou sur des séries telles que Better Call Saul, El Camino ou Watchmen ne compte donc pas rentrer au pays dans l’immédiat. "Je me demande toujours ce qu’aurait pu être ma vie si j’étais resté en France, où il y a d’ailleurs pas mal de studios : Les Minions par exemple sont produits à Paris… mais je suis plutôt bien ici. Professionnellement, les choses avancent bien. On me fait de plus en plus confiance et je viens à peine d’obtenir ma ‘résidence permanente’après 26 mois d’attente… Je compte aussi demander la citoyenneté canadienne d’ici deux ans. J’ai encore tellement de choses à faire ici." Sans "spoiler" la suite, le retour en France n’est pas pour tout de suite.

 

Cet article est réservé aux abonnés
Accédez immédiatement à cet article
2 semaines offertes
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?