Sur le viaduc de Millau, les agriculteurs défendent leur avenir

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  • Gilbert Pailhas, éleveur en bovin viande et ovin lait pour Roquefort à Paulhe.
    Gilbert Pailhas, éleveur en bovin viande et ovin lait pour Roquefort à Paulhe. CP - Philippe Henry
  • Une trentaine de tracteurs a emprunté le viaduc de Millau, hier sur les coups de midi.
    Une trentaine de tracteurs a emprunté le viaduc de Millau, hier sur les coups de midi. CP - Philippe Henry
  • Sur le viaduc de Millau,  les agriculteurs défendent leur avenir
    Sur le viaduc de Millau, les agriculteurs défendent leur avenir CP - Philippe Henry
Publié le
Philippe Henry

Gilbert Pailhas, éleveur à Paulhe, a pris part au cortège qui a traversé le viaduc de Millau. À bord de son tracteur, il a parcouru les 2,5 kilomètres de bitume pour protester contre la prochaine réforme de la PAC mais également mettre en avant les difficultés qu’il rencontre, comme d’autres, sur le prix payé aux producteurs.
 

Venu de Paulhe, à quelques encablures de viaduc de Millau, Gilbert Pailhas n’est pas du genre à manifester à la moindre occasion.

Pourtant, mercredi matin, il a tenu à prendre son tracteur pour rejoindre le cortège appelé à défiler sur le viaduc de Millau, à l’appel de la FDSEA et des JA. Car, les négociations autour de la prochaine Politique agricole commune, la PAC, l’inquiète. Des craintes qu’il partage également pour son fils, Romain, 29 ans, qui vient tout juste de s’associer avec son père en Gaec.

"Je veux pouvoir laisser quelque chose de viable à mon fils, confie Gilbert Pailhas. à bientôt 60 ans, il pense à prendre sa retraite. Et cette prochaine réforme de la PAC ne va pas du tout dans le sens d’une agriculture tournée vers l’élevage, comme celle que nous pratiquons ici, en Aveyron."

Avant d’entamer leur défilé sur le viaduc, les agriculteurs se sont retrouvés au pied de l’ouvrage d’art. L’épais brouillard enveloppe encore les alentours et ne laisse entrevoir que les piles du viaduc.

Après quelques minutes de discussions entre les organisateurs de la manifestation pour en présenter les modalités, les moteurs se mettent en route.

Ce mouvement de colère des agriculteurs s’inscrit dans un contexte déjà tendu. Ils s’étaient déjà déplacés en masse en décembre dernier, où près de 200 tracteurs et tout autant d’agriculteurs étaient à Rodez pour protester contre la nouvelle carte des zones vulnérables. Et puis, "la loi Egalim nous a déçus. La présentation était séduisante, mais le contenu n’est pas à la hauteur", lâche Gilbert Pailhas.

"Cela va devenir difficile pour nous"

"Nous manifestons pour que la prochaine réforme de la PAC prenne en compte notre agriculture. Mais ce que nous voulons surtout, c’est vivre de notre métier. Que nos produits soient payés au prix juste", souhaite l’agriculteur de Paulhe.

Si la baisse des "aides couplées", indispensables aux productions d’élevage, se confirme "cela va devenir très difficile pour nous", affirme l’éleveur en ovin lait et bovin viande. Pour d’autres agriculteurs également. La majorité du département est occupée par l’élevage et la production d’herbe, soit 86 % de la surface agricole.

Gilbert Pailhas a embrassé le métier d’agriculture il y a plus de 30 ans, suivant déjà les pas de ses aïeuls. "Nous avons toujours travaillé cette terre, alors que le relief impose beaucoup de contraintes. Il n’y a pas 50 façons d’exploiter les surfaces agricoles" de ce Sud-Aveyron rude et accidenté.

Ainsi, la remise en cause d’une partie de l’Indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) vient aggraver le désarroi des exploitants. "Cette aide peut représenter jusqu’à un tiers de l’aide pour notre exploitation. Elle permet surtout de maintenir des fermes à taille humaine et surtout de maintenir des emplois dans nos campagnes. Sans cela, comment voulez-vous que des agriculteurs actifs se maintiennent dans nos territoires ruraux", conclut Gilbert Pailhas.

Après cette traversée, le tracteur de l’éleveur de Paulhe finit par se ranger aux côtés des autres, sur l’aire du viaduc de Millau. Pour tous, ce coup de force n’est qu’une première étape. "Nous lancerons des actions aussi souvent que nécessaires", finit par lancer au micro Laurent Saint-Affre, président de la FNSEA, devant les agriculteurs rassemblés.

"Tout ce que l’on fait est ignoré"

"On est dans le brouillard et on a besoin de voir le soleil, vite et fort, harangue Dominique Fayel, administrateur à la FNSEA. La ministre de la transition écologique, prône le végétarien dans les cantines, les chèques alimentaires pour étudiants sont réservés aux fruits et légumes… C’est révélateur d’un état d’esprit. Tout ce que l’on fait est ignoré. Et derrière ces gens qui réfléchissent aux alternatives aux produits animaliers, qui y a-t-il ? Des géants du numérique… Que se trame-t-il ?" Et de couper l’herbe sous le pied des tenants de la transition : "Nous avons 40 000 ha d’herbe dans l’Aveyron, que voulez-vous qu’on y mette, sinon des ruminants !"

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