Climat: des 149 propositions des Citoyens aux mesures adoptées

  • Le gouvernement assure avoir repris la quasi-totalité des 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat.
    Le gouvernement assure avoir repris la quasi-totalité des 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Christophe ARCHAMBAULT / AFP
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Relaxnews

(AFP) - Vraiment "sans filtre" comme le promettait Emmanuel Macron ? Le gouvernement assure avoir repris la quasi-totalité des 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat, une lecture rejetée avec force par les défenseurs de la planète qui dénoncent des mesures "dénaturées" ou abandonnées. Revue de détail.

Trois "jokers"

Dès le début, Emmanuel Macron a écarté 3 propositions: limitation de la vitesse à 110km/h sur autoroute, instauration d'une taxe de 4% sur les dividendes, et réforme du préambule de la Constitution.

Référendum constitutionnel

Le président a en revanche promis un référendum pour intégrer la protection de l'environnement dans l'article 1 de la Constitution. Mais le texte arrivé à l'Assemblée doit d'abord être adopté dans les mêmes termes par les deux chambres, perspective incertaine.

Transports

Les transports représentent plus de 30% des émissions de gaz à effet de serre en France.

- La CCC recommandait l'interdiction des vols intérieurs s'il existe une alternative ferroviaire directe de moins de 4 heures. Une idée reprise par le projet de loi Climat, qui passe toutefois cette condition à 2h30, avec exception des vols en correspondance. Soit au mieux 10% du trafic métropolitain, selon le Haut Conseil pour le climat (HCC).

- Dans un contexte de crise sans précédent du secteur aérien, le renforcement de l'écotaxe sur les billets d'avion n'a pas été retenu, l'exécutif renvoyant au niveau européen la question de la réduction des émissions du transport aérien.

- La CCC souhaitait la création d'un malus au poids des véhicules, de 10 euros par kilo au-delà de 1.400 kg. La loi de finances 2021 a bien créé ce malus, en relevant le seuil à 1.800 kg, ce qui exclut 98% des voitures vendues en France, dont la quasi-totalité des modèles français.

- Côté malus "CO2", les Citoyens plaidaient pour que cette taxe liée aux émissions des véhicules se déclenche à partir de 123gCO2/km. Un seuil retenu par la loi de finance, mais avec un renforcement progressif sur trois ans.

- La CCC suggérait d'interdire tous les centres-villes aux véhicules les plus polluants. Le projet de loi Climat prévoit l'instauration obligatoire de zones à faible émission (ZFE) limitant la circulation de certains véhicules d'ici 2025 dans les agglomérations de plus de 150.000 habitants.

- Une des 149 propositions fixait un calendrier vers la fin de la commercialisation des véhicules thermiques en 2040, avec des étapes en 2025 et 2030. La loi Climat reprend l'idée d'un objectif intermédiaire, en 2030 seulement et moins ambitieux.

- Sur le ferroviaire, la CCC réclamait une baisse de la TVA sur les billets de train de 10 à 5,5%, pas retenue, et un plan massif d'investissement dans les infrastructures (1,1 milliard d'euros par an jusqu'en 2027). Le plan de relance prévoit 4,7 milliards en la matière, répond le gouvernement. Un chiffre contesté par le Réseau action climat, qui compte seulement 650 millions d'euros de nouveaux crédits d'investissement.

- Les Citoyens demandaient une hausse du fonds vélo de 50 à 200 millions d'euros par an. Le plan de relance prévoit 200 millions d'euros mais sur deux ans.

Logement/urbanisation

- Alors que le logement représente environ 20% des émissions, la Convention prônait la rénovation énergétique obligatoire des bâtiments d'ici à 2040.

Le gouvernement n'a pas retenu l'obligation généralisée: la loi Climat prévoit l'interdiction de location des "passoires thermiques" en 2028, sans poser d'obligation aux propriétaires occupants. Il existe aujourd'hui 4,8 millions de logements "passoires" (classés F et G), dont moins de la moitié en location, sur un total de 29 millions de logements en France.

- Comme demandé par les Citoyens, le gouvernement a interdit, par voie règlementaire, les terrasses chauffées, mais après la fin de l'hiver 2021 à cause de la crise sanitaire.

- Dans l'objectif de réduire par deux l'artificialisation des sols, la CCC recommandait des "mesures coercitives" pour stopper les zones commerciales péri-urbaines. Le gel annoncé par le gouvernement concerne les centres commerciaux, mais pas les entrepôts de e-commerce.

Consommation

- Pour aller vers une consommation plus "sobre" et vertueuse, les Citoyens se sont prononcés notamment pour la création d'un "score carbone" obligatoire, sorte de "nutriscore" informant les consommateurs sur l'impact environnemental d'un produit ou d'un service. Idée reprise dans le projet de loi Climat, mais avec une période d'expérimentation. Et sans "aucune garantie qu'un seul bien ou service fasse un jour l'objet de cette obligation", estime le HCC.

- Alors que la Convention demandait l'interdiction de la publicité pour tous les produits les plus polluants, notamment les SUV, le gouvernement vise seulement les énergies fossiles. Dans son avis, le Conseil d'Etat s'interroge sur la portée de cette interdiction, soulignant le "caractère peu fréquent" des publicités "directes" en la matière.

- Les Citoyens demandaient d'imposer une part de vente en vrac dans les magasins, jusqu'à 50% en 2030. Une idée reprise dans le projet de loi Climat, mais à 20% en 2030.

- La CCC demandait la généralisation de la consigne du verre pour 2025, le projet de loi prévoit qu'elle "pourra" l'être mais pas avant 2025.

Economie/travail

- Les Citoyens demandaient un moratoire sur la mise en place de la 5G en attendant l'évaluation de cette technologie sur la santé et l'environnement. Les enchères pour attribuer les premières fréquences ont malgré tout eu lieu en octobre, Emmanuel Macron renvoyant les opposants à la 5G à la "lampe à huile" et aux "Amish".

La "feuille de route" pour limiter l'empreinte du numérique prévoit toutefois de "prendre en compte" les enjeux environnementaux dans l'attribution des prochaines fréquences 5G. Dans le même domaine, le gouvernement met en avant la création d'un indice de réparabilité pour les téléphones ou ordinateurs.

- En matière de déchets, la Convention appelait au recyclage obligatoire de tous les objets en plastique et à l'interdiction des plastiques à usage unique dès 2023. Le gouvernement a élargi la liste des plastiques à usage unique interdits (pailles, couverts, touillettes, boites à sandwich...). L'objectif de recyclage de 100% du plastique est pour 2025 et la sortie des emballages plastique à usage unique pour 2040.

- Les Citoyens appelaient à développer le télétravail, avec un jour minimum par semaine pour les postes éligibles. Alors que le télétravail contraint s'est développé de façon massive face au Covid-19, le gouvernement met en avant un accord interprofessionnel non contraignant conclu en novembre sur ce point.

Alimentation

- Alors que l'alimentation représente plus de 20% des émissions en France, les Citoyens recommandaient de taxer les produits transformés à forte empreinte carbone, notamment pour financer des chèques alimentaires pour les plus démunis, fléchés Amap ou produits bio.

Estimant que l'"esprit" de la première partie de la mesure est d'encourager le frais face aux produits ultra-transformés, le gouvernement met en avant les mesures du plan de relance en faveur des produits frais et locaux. Quant au chèque alimentaire, Emmanuel Macron a promis de le mettre en place.

- La CCC recommandait également un choix végétarien quotidien en restauration collective à partir de 2022. Le projet de loi Climat a retenu une expérimentation de deux ans.

- Au plan international, la Convention réclamait une transformation des aides de la Politique agricole commune (PAC), pour ne plus les baser sur la surface des exploitations. Impossible face aux règles européennes, selon le gouvernement.

Justice

La Convention réclamait la création d'un crime d'écocide passible de 20 ans de prison pour les dommages écologiques graves.

Rapidement, Emmanuel Macron, s'engageant à porter le combat pour la création de ce crime mais au niveau international, a estimé que la formulation de la CCC n'était pas adaptée au droit français.

A la place, le projet de loi Climat prévoit la création d'un "délit" d'écocide pour des faits de pollution de l'air ou de l'eau commis de manière intentionnelle (jusqu'à 10 ans d'emprisonnement). Disposition dénoncée par les ONG et par certains experts qui y voient un affaiblissement du droit de l'environnement. Le Conseil d'Etat a lui pointé des incohérences et des problèmes de gradation des peines, avec des comportements intentionnels similaires sanctionnés de façon différente selon les articles de la loi.

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