Sévérac d'Aveyron. Jean-Pierre Henri Azéma : "Sauver la mémoire des hommes"

  • Jean-Pierre Azéma et les prémices de la restauration de son moulin, près de Sévérac-le-Château.	C.C.
    Jean-Pierre Azéma et les prémices de la restauration de son moulin, près de Sévérac-le-Château. C.C.
  • Devant son moulin du XVIe siècle et sa meule d’époque. La bâtisse sera le point de départ, en 1982, de sa passion pour les moulins. 	C.C.
    Devant son moulin du XVIe siècle et sa meule d’époque. La bâtisse sera le point de départ, en 1982, de sa passion pour les moulins. C.C.
  • Jean-Pierre Henri Azéma : "Sauver la mémoire des hommes"
    Jean-Pierre Henri Azéma : "Sauver la mémoire des hommes"
Publié le
Christophe Cathala

Docteur en géographie, consultant indépendant, expert, conférencier et auteur de nombreux ouvrages de référence, créateur de l’association rouergate des amis des moulins, cet Aveyronnais passionné de patrimoine industriel conduit un vrai devoir de transmission.

Un géographe sait toujours garder les pieds sur terre même quand les moulins lui font tourner la tête, au point d’y consacrer sa vie de chercheur au travers d’une centaine d’articles scientifiques et d’une douzaine d’ouvrages de référence. Et les moulins ne sont qu’un aspect des quarante années d’études que Jean-Pierre Henri Azéma aura à ce jour dédié au patrimoine, celui des techniques et de l’industrie, de l’eau et de l’environnement sur tous les terrains d’investigations possibles, de l’Aveyron à l’Europe entière. Il a 22 ans en 1982, quand ses parents héritent un moulin du XVIe siècle, assoupi sur un chenal de dérivation de la rivière Aveyron, à quelques encablures de Sévérac-le-Château. La vénérable bâtisse, que son arrière-grand-père Jean Baptiste Gaches-Dides avait achetée en 1852, est alors ruinée. Il va s’employer avec ses deux sœurs aînées à le rénover dans les règles de l’art, à remonter sa mécanique. Un gamin du voisinage contemple un jour les travaux : " A quoi ça sert un moulin ?, me dit-il. Ce sera le déclic ", confie celui qui, à l’époque est doctorant en géographie, et se passionne… pour les arbres.

Les moulins s’affirmeront quand, pour payer ses études, il court les travaux de recherche pour sa maîtrise. Le groupe d’études et de programmation de la DDE de l’Aveyron lui propose de se pencher sur les chaussées du Rance. " Personne d’autre ne s’y était jamais intéressé. L’Abbé Aliès, maire de Belmont me les fera découvrir, je vais alors faire 600 km à pied et à vélo pour arpenter les méandres de la rivière et sa cinquantaine de chaussées, de Muratel jusqu’à Plaisance. Je vais donc me confronter aux chaussées avant de m’intéresser aux moulins, dont nul ne profitait guère ! " Il est vrai qu’entre les deux il n’y a qu’un pas à franchir. Et parce qu’il s’est " fait rattraper par l’histoire de ma famille ", son moulin de Sévérac sera donc le fil conducteur d’une carrière d’expert vouée au patrimoine, celui relie la main de l’homme à son environnement.

Une passion, toujours aussi vivace aujourd’hui pour ce géographe, hydraulicien et… juriste. Car remonter un moulin n’est pas un long fleuve tranquille, il faut des documents attestant de l’histoire du lieu, des registres portant trace de sa présence avant la Révolution, des preuves en tout genre réclamées par les Eaux et Forêts… Une jungle administrative qui le mènera à pousser la porte des Archives départementales et à rencontrer leur conservateur, Jean Delmas.

Il en naîtra en 1985 une thèse sur les moulins de l’Aveyron, qui fait toujours autorité aujourd’hui. Dans ce sillage, Jean-Pierre Henri Azéma crée en 1987 l’Aram, Association rouergate des amis des moulins affiliée à une fédération dont il sera 25 ans durant le vice-président. Un repaire de passionnés convaincus de transmettre aux générations futures une part d’histoire économique, industrielle et humaine, à travers conférences, études et ouvrages de référence. " Ce qui m’intéresse en tant que géographe, c’est l’humain, c’est sauver la mémoire des hommes. Mon souci, c’est la communication, la transmission de cette mémoire. Le savoir, on le multiplie en l’offrant dans un livre, en recueillant les témoignages. Et ce sont les sujets des livres qui viennent à moi ".

Il reste en ce domaine toujours à faire, mais Jean-Pierre Henri Azéma a sans aucun doute déjà accompli l’essentiel de sa mission.

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