L’Aveyron "sinistré" à cause du campagnol terrestre
Au-delà de l’Aveyron, c’est l’ensemble du Massif central qui est touché actuellement par une pullulation dévastatrice.
On est en plein dans le pic", résume isabelle Sicard, animatrice pour la fédération départementale du groupement de défense contre les organismes nuisibles (FDGDON) en Aveyron. Il suffit de monter sur le plateau de l’Aubrac qui en est infecté. Et le Sud-Aveyron n’est pas en reste. Entretien avec Johan Bouges, éleveur à La Terrisse, commune d’Argences-en-Aubrac et responsable du FDGDON.
Où en est la situation face à cette nouvelle pullulation ?
Il s’agit d’une pullulation exceptionnelle qui a envahi tout le Massif central. On y distingue trois types de campagnols, terrestre, des champs et Provençal qui s’attaquent à trois cultures : prairie, arboriculture et céréales. Il y a donc une très grosse inquiétude. La Haute-Loire était même sinistrée avant l’hiver. L’Aveyron est sinistré maintenant. On ne peut que limiter la casse aujourd’hui, cela va se jouer dans quelques semaines avec le printemps.
Quelles en sont les raisons ?
Les scientifiques ne s’accordent pas. Ces pullulations sont plus fréquentes et plus fortes. Il faut avoir beaucoup d’humilité par rapport à cette problématique car elle est ancienne, l’Aubrac en recensait déjà en 1910. Ce qui est avéré, c’est que les pratiques agricoles ne sont pas en cause. Nous assistons à une mutation d’espèces ainsi qu’à l’augmentation de prédateurs tels que renard et chat. L’argument principal retenu est le dérèglement climatique. Cette pullulation est très forte car elle intervient après trois années de sécheresse.
Est-ce que les conséquences peuvent nuire à l’être humain ?
Le campagnol est vecteur de maladie, il est donc un danger pour la santé humaine par les zoonoses (maladies ou infections qui se transmettent des animaux vertébrés à l’homme, les pathogènes peuvent être des bactéries, des virus ou des parasites, NDLR). D’autant que le Massif central est un château d’eau. Cela peut impacter les sources et demande donc une surveillance accrue. Cela amène aussi un risque de ravinement car les campagnols creusent des galeries souterraines. Ces pullulations de plus en plus rapprochées détruisent les paysages, or c’est un champ d’attractivité en termes d’image, notamment pour le tourisme sur l’Aubrac. Le problème n’est donc pas spécifique à l’agriculture mais environnemental. Tout est lié, l’humain et la biodiversité, il concerne tout le monde.
Quelles sont les solutions ?
Il y a encore une petite fenêtre de tir. Le particulier peut installer des piégeages, faire du labour, mettre des appâts. Il existe aussi un produit, le Ratron (lire par ailleurs) qui est efficace et peu rémanent. Actuellement nous assistons à un raz-de-marée. Ce n’est pas seulement l’Aveyron mais le Massif central qui est touché car le campagnol ne s’arrête pas à la frontière. La lutte doit donc être collective. Il faut sensibiliser et mobiliser. Cela passe par un contrat de lutte.
De quoi s’agit-il ?
Il s’agit d’un engagement quinquennal de 110 € par an auprès du FDGDON pour aider. Cette cotisation est notre seule ressource. Je précise bien que nous ne sommes pas une assurance pour les pertes. Pour les indemnisations, il existe le fonds national agricole de mutualisation sanitaire et environnemental (FMSE). Concernant les contrats de lutte, nous étions à dix dossiers en Aveyron fin janvier, nous en sommes à quarante actuellement. À titre comparatif, le Cantal en est à 700 contrats de lutte. Il faut donc mobiliser. En parallèle, on s’appuie sur la recherche et la science avec le service interdépartemental pour l’animation du Massif central (Sidam) qui est un organisme inter-établissement du réseau des chambres d’agriculture du Massif central. Il faut des moyens et ne pas avoir peur de la science. Quand on constate en quel temps record un vaccin a été trouvé contre la Covid-19, je crois fermement à la science qui peut trouver une réponse.
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