Aveyron : l’État au chevet des forêts pour mieux les valoriser

Abonnés
  • Quarante arbres vont être plantés jeudi 25 mars sur l’Aubrac
    Quarante arbres vont être plantés jeudi 25 mars sur l’Aubrac
  • L’État au chevet des forêts pour mieux les valoriser
    L’État au chevet des forêts pour mieux les valoriser
Publié le
Olivier Courtil

Pour la première fois, l’État aide son poumon vert en investissant 150 M€ face au réchauffement climatique. Qu’en est-il en Aveyron ?

"C’est remarquable ! Il faut saluer le plan de relance avec la prise de conscience de l’État", fait remarquer Bernard Loiseau, porte-parole et trésorier du comité des forêts, syndicat de propriétaires privés Français depuis 1912. Cette avancée se formalise dans le cadre du plan de relance pour le reboisement des forêts françaises et de soutien de la filière bois à hauteur de 200 M€ dont 150 M€ pour aider les propriétaires forestiers, publics et privés, à renouveler et à diversifier leurs forêts ainsi que pour soutenir la filière graines et plants. Ce plan vise à couper les arbres malades, varier les essences en accompagnant par un travail de dégagement et en limitant les gibiers. L’objectif vise la plantation de 45 00 hectares de forêts. "La forêt française est sous-exploitée, il n’y a pas assez de coupes. Elle est aussi sous-estimée alors qu’elle génère 400 000 emplois en France pour la construction, papier, emballage", indique Benoît Loiseau.*

En chiffres

280 000 hectares de forêts en Aveyron.

93 % de la surface boisée du département appartient à des forêts privées soit 56 00 propriétaires pour environ 4 ha en moyenne.

32 %, taux de boisement (+1 % entre 2012 et 2016).

 

Écologie et économie ne sont donc pas antinomiques. Reste que le temps presse face au réchauffement climatique. " On est un peu inquiet car la forêt a une grosse capacité de résilience mais elle est victime du réchauffement climatique. " Heureusement les propriétaires forestiers n’ont pas attendu le plan de relance pour agir. Certains pratiquent le prélèvement de 15 % tous les six ans de leurs feuillus pour ne pas appauvrir la forêt. Cette gestion est celle de Pro Silva qui a pour but d’éviter les coupes rases. " C’est la sylviculture paysanne, basée sur une gestion douce, pour accompagner le processus naturel par régénération. Il y a encore l’autre école qui consiste à couper à blanc, ce qui n’est pas notre approche car elle appauvrit la forêt. "

Actuellement beaucoup de coupes sont effectuées, en Aveyron également. Le bois de chauffage est tendance, en augmentation donc, liant l’environnement à l’énergie. "Tous les gestionnaires ont déposé leur dossier de reboisement. Cela concerne les propriétaires qui ont plus de 20 hectares, soit par logique financière, soit pour des problèmes sanitaires avec des arbres touchés par le scolyte."

L’Aveyron potentiellement concerné

L’Aveyron est à la marge puisque la moyenne d’une propriété forestière est de 4 hectares alors qu’une forêt est rentable à partir de 20 hectares. "Sous ce seuil, en Aveyron y compris, les forêts sont parfois laissées à l’abandon, ce qui n’est pas plus mal car cela fait vivre une forêt naturelle avec sa biodiversité. Cela sert aussi pour avoir du bois de chauffage et à la détente. Mais l’Aveyron est potentiellement concerné par le plan de relance avec trois grandes régions forestières, la châtaigneraie à l’Ouest, Millau avec le causse, et la montagne avec le Nord et vers Lacaune." Et la nature, victime du réchauffement climatique, fait que les épicéas ont presque disparu dans le département. D’où la mission d’accompagnement pour aiguiller et favoriser les essences, "pour ne pas mettre les œufs dans le même panier", rappelle Benoît Loiseau. Reste qu’avec 500 adhérents au comité des forêts, cinq en Aveyron, le chemin est encore long. Et si la gestion d’une forêt s’effectue sur du temps long, 30 ans en moyenne, la prise de conscience doit être effective dès à présent. "Les mentalités évoluent", concluant par un message d’espoir le porte-parole du comité des forêts. Des forêts, source d’investissements, bénéficiant d’exonération d’impôts (lire ci-dessous) mais aussi, et surtout, apportant des bienfaits environnementaux pour sauver la planète, mis en lumière justement cette semaine, à travers la journée internationale des Forêts concrétisée par des plantations sur l’Aubrac.

40 arbres plantés jeudi 25 mars sur l’Aubrac

Dans le cadre de la Journée internationale des forêts, qui s’est tenue officiellement le 21 mars, le parc naturel régional (PNR) de l’Aubrac mène une opération de plantation d’arbres ce jeudi en Lozère. Quarante élèves des écoles de St-Germain-du-Teil et La Canourgue sont concernés. Une opération pilote pour sensibiliser la nouvelle génération à la cause environnementale "pour montrer le fruit de leur travail avec aussi un but paysager pour rendre le village plus accueillant", précise Romain Ribière (en photo ci-contre), chargé de mission forêt au PNR de l’Aubrac où la forêt représente un tiers du plateau (90 000 hectares dont 73 000 privés) et le son de cloche identique à l’échelle nationale : "La forêt est sous-exploitée, on ne la valorise pas assez." Il faut dire aussi que la forêt d’Aubrac multiplie les handicaps avec pentes et vallées. Elle est surtout très morcelée. Pour susciter l’attrait et faire prendre conscience de son intérêt, un technicien forestier du centre régional de la propriété forestière (CRPF) vient d’être nommé depuis le début de l’année et intégré au PNR de l’Aubrac. Des aides financières sont aussi prévues pour inciter les propriétaires forestiers à gérer leurs biens. "L’objectif est une aide à hauteur de 70 % pour être effectif en 2022", annonce Romain Ribière, conscient de la nécessité "d’une démarche volontariste."

Ainsi, le PNR, dans le cadre de sa charte forestière, œuvre depuis trois ans sur un plan de gestion. Un projet pilote a été lancé sur une bande boisée résineuse (on en compte 100 km sur l’Aubrac), sur la montagne des Enguilhens, visant à replanter d’autres essences. "L’objectif est d’améliorer la forêt pour produire de la qualité, et pas seulement du bois de chauffage mais du bois d’œuvre pour la construction et l’ameublement, du bois d’industrie pour papier et carton, du bois déchiqueté pour alternative au paillage dans les stabulations." Une déclaration qui fait écho avec le comité des forêts. Varier les essences, chercher les complémentarités pour avoir des espèces plus résilientes, tel est l’enjeu. Pour ce faire, à son niveau, le PNR dispose d’un budget de 70 000-80 000 € par an pour mettre en œuvre une vingtaine de projets. "Le plan de relance cible les épicéas, l’Aveyron est donc peu concerné." En effet, les résineux couvrent 19 % de la surface forestière. L’avenir des forêts passe par l’accompagnement de l’homme. Et dans sa mission de sensibilisation, le PNR travaille aussi avec l’ONF (Office national des forêts) sur les vieilles forêts, âgées de plus de 150 ans. "Un travail qui aborde le pastoralisme, à la fois sur le plan culturel et naturel", conclut Romain Ribière. Passionnant, donc. Essentiel surtout, pour reprendre un terme à la mode.

Cet article est réservé aux abonnés
Accédez immédiatement à cet article
2 semaines offertes
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?