Rodez. Laurent Paul, directeur de Pôle Emploi : "L’Aveyron est préservé par rapport à d’autres territoires"

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  • Laurent Paul a pris ses fonctions de directeur de Pôle emploi en Aveyron et dans le Tarn à l’automne 2020.
    Laurent Paul a pris ses fonctions de directeur de Pôle emploi en Aveyron et dans le Tarn à l’automne 2020.
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Propos recueillis par Guilhem Richaud

Depuis l’automne, Laurent Paul est responsable de Pôle emploi en Aveyron et dans le Tarn. Alors que la crise sanitaire a d’importantes conséquences économiques, il fait le point sur la situation du département, qui résiste plutôt bien.

Vous avez pris vos fonctions de directeur de Pôle emploi dans l’Aveyron à l’automne. Avec votre regard extérieur, quelle vision portez-vous sur l’état de l’emploi sur le territoire qui a pas mal de spécificités ?

J’ai d’abord trouvé un territoire dynamique. C’est d’ailleurs vrai aussi pour le Tarn dont je m’occupe également. Il y a un atout important : le multisectoriel. Quasiment tous les secteurs d’activité sont représentés sans qu’il y en ait vraiment un de dominant. Du coup, la crise sanitaire et économique n’a pas eu d’effets aussi massifs que ce que j’ai pu connaître dans l’Hérault, avec une zone littorale et touristique très touchée ou ce qu’on peut avoir en Haute-Garonne dans le domaine de l’industrie. L’Aveyron est plutôt préservé par rapport à d’autres territoires beaucoup plus marqués par le chômage et les destructions d’emplois. J’ai également découvert une certaine solidarité dans la population, mais aussi entre employeurs que j’ai moins connu ailleurs. On a vu des patrons aller rencontrer des collègues en difficulté pour voir s’il y avait la possibilité de les aider notamment via de la prise en charge temporaire de main-d’œuvre pour éviter des licenciements.

L’Aveyron a un taux de chômage bas, qui a un peu augmenté avec la crise, mais qui reste convenable au regard de la situation nationale et régionale. Mais cela cache quand même des disparités…

Il y en a. Elles ne sont pas énormes, mais elles existent. En Aveyron, aujourd’hui, on est à 6,8 % de taux de chômage. Il s’agit d’une augmentation de près d’un point en un an, mais on n’est pas, il faut le reconnaître, dans une situation tendue comme on peut l’être sur d’autres territoires.

Le paradoxe, c’est que les chefs d’entreprise de plusieurs secteurs disent avoir du mal à recruter. C’est un effet que vous remarquez aussi ?

Sur les douze derniers mois (données arrêtées fin mars, NDLR), on a un volume d’offres qui baisse de 7 %, en intégrant la période d’arrêt quasi-total du premier confinement en 2020. Sur la région, sur la même période, on est sur une diminution de 27 %. Il y a trois secteurs pour lesquels on a vraiment une hausse significative des demandes : la santé (+17 %), les services à la personne (+ 14 %) et la construction (+11 %). On a deux secteurs à l’inverse qui impactent la baisse globale d’offres : sans surprise, le commerce (-6 % d’offres) et l’hôtellerie-restauration (-40 %).

Comment arriver à faire le lien entre l’offre et la demande ?

Aujourd’hui, on travaille dans plusieurs directions, au-delà de l’offre de service globale de Pôle emploi. On a essayé, en premier lieu, d’agir sur les jeunes, dans le cadre du plan 1 jeune, une solution. On a mis en place, sur le département de l’Aveyron, des portefeuilles dédiés, avec un conseiller référent, qui ne s’occupe que des jeunes, qui les suit de l’identification du besoin jusqu’à la reprise d’emploi. Aujourd’hui, on accompagne 750 jeunes dans le cadre de ce plan. Pour les demandeurs d’emploi qui ont également des freins que l’on appelle périphériques (problèmes de santé, de logement…), on a passé une convention avec le conseil départemental. Ils bénéficient d’un double accompagnement, par le conseil départemental pour la partie sociale et par Pôle emploi pour la recherche et le développement des compétences. Ce sont deux publics particuliers pour lesquels on a des actions plus lourdes car ce sont eux les plus marqués.

On doit aussi préparer demain et travailler sur l’adéquation entre ce que recherchent les demandeurs d’emploi, leurs qualifications, et ce qu’attend le marché du travail local. L’un des freins sur le territoire, qui est moins présent dans d’autres départements, c’est que la mobilité est très réduite. Soit parce qu’elle n’est pas présente, car il n’y a pas les infrastructures, soit parce qu’on a des gens qui aspirent peu à bouger. Il faut qu’on puisse allier les compétences et la mobilité. Notre enjeu, c’est de faire découvrir à un maximum de demandeurs quelles seront les opportunités de demain. On travaille beaucoup sur l’attractivité des métiers avec les entreprises et les branches. L’intérêt c’est de montrer, souvent aux jeunes, que les métiers ont évolué. On essaie de déconstruire les a priori sur des métiers qui sont dévalorisés. Notre rôle est de rendre employable les publics qui s’adressent à nous pour que demain ils aient une place dans le marché du travail et qu’ils puissent être recrutés.

Est-ce que vos équipes vous remontent une évolution dans les positions des demandeurs d’emploi avec la crise que nous traversons actuellement, avec notamment la possibilité de se réorienter ?

On le sent. C’est marqué à deux titres. On a ceux pour qui la crise a provoqué une vraie réflexion sur des choix de vie. On a les personnes qui aujourd’hui engagent soit une mobilité, soit n’en engage pas car ils considèrent être plus protégés sur leur territoire qu’en allant dans des zones d’attractivité très forte, comme les métropoles.

On a aussi une partie des jeunes, et on le voit dans des flux de migration, qui se disent que sur nos territoires, il n’y a plus trop d’avenir, et que si on veut du boulot et choisir ce qu’on veut faire, il faut partir vers des métropoles.

On note aujourd’hui des mouvements vers Montpellier, Toulouse, ou Clermont-Ferrand. Il y a aussi des évolutions sur des choix professionnels. Certains se sont rendu compte qu’ils étaient sur des secteurs lourdement impactés et sur lesquels ça pourrait durer et ont décidé de se réorienter vers des secteurs moins impactés.

Les pouvoirs publics locaux travaillent depuis longtemps sur l’attractivité afin de développer la démographie, avec pour objectif de faire venir de la population. Est-ce compatible avec votre rôle, qui consiste à trouver du travail pour ceux qui sont déjà sur le territoire

Totalement. On travaille d’ailleurs avec le conseil départemental dans le cadre d’Aveyron recrute. Ce n’est pas incompatible parce que déjà, les perspectives, dès le terme du confinement, sont significatives. Il va y avoir des besoins. On est sur un département qui, il y a quelques années, était pratiquement en plein emploi et voulait donc aller chercher des ressources et des compétences à l’extérieur. Je pense que c’est encore plus important aujourd’hui car il y a des gens qui s’interrogent, dans d’autres régions, sur de nouveaux choix de vie et l’Aveyron offre ces opportunités-là par rapport à son environnement, son climat et sa qualité de vie. C’est important, au moment où beaucoup de gens s’interrogent, d’aller capter ceux qui pourraient être utiles au département parce qu’ils ont des compétences qui sont recherchées.

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