Les relations de voisinage avantagent "les plus dotés"

  • Les voisins ont fait davantage attention aux plus âgés pendant le confinement mais les relations de voisinage continuent de bénéficier aux "plus dotés".
    Les voisins ont fait davantage attention aux plus âgés pendant le confinement mais les relations de voisinage continuent de bénéficier aux "plus dotés". Daisy Daisy / Shutterstock
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Relaxnews

(AFP) - Les voisins ont fait davantage attention aux plus âgés pendant le confinement mais les relations de voisinage continuent de bénéficier aux "plus dotés", selon la sociologue de l'Ined Joanie Cayouette-Remblière, co-auteur d'une étude parue mercredi.

Votre étude ne bat-elle pas en brèche l'idée d'une solidarité de quartier forte dans les milieux populaires ?

"François Héran (sociologue et démographe, ndlr) avait déjà montré dans un article de 1988, intitulé +La sociabilité une pratique culturelle+, que la sociabilité évoluait de la même manière qu'une pratique culturelle sélective, en fonction du niveau de diplôme, des revenus, des positions socio-professionnelles. Dans notre étude sur les relations de voisinage, on note un réel désavantage des catégories populaires qui vont être celles, quel que soit le quartier, qui vont le moins voisiner par rapport à leurs voisins de catégories plus aisées. Et les quartiers populaires sont ceux où les relations de voisinage sont les moins variées, les moins approfondies.

La solidarité s'imbrique dans tout un ensemble de relations de voisinage qui la dépassent: relations de convivialité, le fait de s'inviter à manger, à prendre le café ou juste à discuter chez soi, relations basées sur les enfants. Cela ne veut pas dire que les catégories populaires sont moins solidaires mais elles développent moins l'ensemble des relations avec les voisins, dont des échanges de services dans un sens ou dans l'autre."

La crise sanitaire a-t-elle changé quelque chose ?

"Au cours du premier confinement, on a observé avec surprise, parce que cela détonait par rapport aux discours politique et médiatique ambiants, une stabilité du volume d'échanges de services. La proportion du nombre de personnes engagées dans des échanges de services dans le voisinage est restée stable. Cette stabilité s'explique par un jeu d'entrées et de départs dans les échanges de services: d'un côté certaines personnes se sont mises à rendre davantage de services. Les tranches 60-74 ans qui avancent dans le cycle de vie sans être les plus âgées sont le plus entrées dans les relations de voisinage au cours du premier confinement. Elles ont remplacé les familles avec enfants, qui se sont complètement refermées sur elles-mêmes du fait d'une surcharge de l'autorité parentale avec les enfants à la maison, alors qu'elles sont normalement au centre des relations de quartier.

Il y a eu une stabilité du poids de la position sociale: en temps de crise comme en temps ordinaire, ce sont les plus dotés qui vont le plus donner et recevoir des services dans leur voisinage. Les services rendus pendant le premier confinement s'inscrivent dans la lignée de relations qui étaient établies bien avant.

Les relations de voisinage entre générations ont-elles changé ?

"Les personnes au-dessus de 75 ans déclarent une augmentation des services reçus au cours du premier confinement, qui n'est pas contrebalancée par des services qu'elles pouvaient rendre. On a une asymétrie dans la relation que l'on observe très rarement. Ces personnes ont été mises en situation de vulnérabilité, devant recevoir sans pouvoir rendre, alors que l'enquête parue ce mercredi montre qu'en règle générale il y a symétrie des relations de voisinage - quand on reçoit, on rend - à l'avantage des plus dotés."

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