Marcillac-Vallon. Marcillac : gros plan sur les caméras de la discorde

Abonnés
  • L’école maternelle Jean-Auzel, l’un des sites marcillacois appelés  à être placé sous téléprotection.
    L’école maternelle Jean-Auzel, l’un des sites marcillacois appelés à être placé sous téléprotection.
Publié le
François Cayla

La cité du Vallon est depuis plusieurs mois le théâtre de polémiques entre les élus favorables à l’installation de caméras sur la commune et un collectif d’opposants. Les uns parlent de protection quand les autres parlent de surveillance.

L’idée remonte au mois d’août 2020. C’est à ce moment-là qu’il est envisagé par la municipalité d’installer des caméras de vidéoprotection, 5 au total, en deux points précis de la commune de Marcillac-Vallon : aux abords de l’école maternelle Jean-Auzel, ainsi que près des containers poubelles du Cambou et de la salle des fêtes. Il s’agirait alors de lutter, d’abord de manière dissuasive, puis éventuellement répressive, contre divers actes d’incivilité (tags, dépôts sauvages, dégradations…).

La décision est entérinée en conseil municipal, à la majorité, le 19 novembre 2020 (13 voix pour, 4 voix contre, 2 abstentions). La préfecture de l’Aveyron a validé le projet à travers un arrêté publié le 7 avril dernier.

"Orientation injustifiée"

Assez rapidement, un vent de protestation s’est levé dans la cité de 1 700 habitants, porté par le "Collectif de réflexion sur la vidéosurveillance à Marcillac-Vallon", composé d’une douzaine d’associations, de quelques syndicats, de la Ligue des Droits de l’homme, de citoyens et de Marcillacois. Car pour ce collectif, " cette orientation est injustifiée ", " prise à la hâte " et " sans concertation avec les habitants ". Et de considérer qu’"installer 5 caméras de vidéosurveillance en le justifiant par des désagréments mineurs pourrait impliquer de graves changements dans le vivre-ensemble. La Ligue des Droits de l’homme juge d’ailleurs ce projet inadapté et même préoccupant".

Pour l’heure, l’installation de caméras sur les sites des dépôts de déchets de Cambou et de la salle des fêtes est en suspens. Le maire de Marcillac, Jean-Philippe Périé, explique qu’"une décision sur ce point sera prise fin juin. Une campagne sur les incivilités a été lancée début janvier pour tenter d’éliminer les problèmes de poubelles. Si cela permet d’améliorer la situation, aucune caméra ne sera installée. Nous verrons donc au 30 juin."

Pour l’école, en revanche, la mairie campe sur ses positions. " La maternelle Jean-Auzel se situe en cul-de-sac, sans visibilité directe, et installer des caméras de vidéoprotection entre notamment dans les préconisations du plan Vigipirate, comme nous l’a indiqué la gendarmerie, explique Jean-Philippe Périé. Les élus au conseil d’école ont demandé aux parents d’élèves ce qu’ils pensaient de ce projet. Pour ceux qui ont répondu, près de 60 % se sont prononcés favorablement."

"Désinformation, chantage"

Et le premier élu marcillacois de se montrer en suivant très énervé quant aux actions du collectif d’opposants. "Le collectif fait de la désinformation et à force de désinformer, les gens n’y comprennent plus rien. Son pouvoir de nuisance est grand. À tel point que certaines personnes viennent aujourd’hui me voir en me disant ne pas vouloir être filmées dans leurs moindres faits et gestes. Mais il ne s’agit pas de ça ! Je le répète, les gens en arrivent à tout mélanger. La vidéoprotection est un enregistrement passif. Il n’y a pas quelqu’un qui regarde en permanence ce qui se passe. On fait appel aux enregistrements, qui sont conservés un mois, uniquement en cas de problème. Et ce sont seulement des gens assermentés qui y ont accès. C’est avant tout un système dissuasif."

Un argumentaire loin d’être suffisant aux yeux du collectif d’opposants qui prône des "alternatives". Ce dernier, qui s’appuie sur une pétition en ligne qui a recueilli plus de 2 000 signatures, dénonce pêle-mêle "le manque de démocratie et de concertation" dans l’attitude de la mairie, "le risque de voir le nombre de caméras augmenter rapidement dans la ville", le "flou dans la notion de délit, qui ne cesse de s’élargir". Tout en menaçant de lancer des recours juridiques pour contester l’installation des caméras. "Nous sommes en train de nous rapprocher d’un avocat dans ce sens", indiquent ses représentants, dont la démarche est, sur ce point, qualifiée de "chantage" par Jean-Philippe Périé.

À travers cette problématique marcillacoise, on sent bien que l’installation de caméras dans le domaine public rejoint désormais un débat de fond éminemment idéologique, voire politique. Et notamment sur la pertinence de doter le milieu rural des mêmes équipements de sécurité que le milieu urbain.

L’installation de caméras dans les villes et les villages d’ici et d’ailleurs interroge certains qui craignent une atteinte à leur liberté. Au-delà de positions parfois idéologiques, il n’est pas inutile de faire un peu de pédagogie pour expliquer les trois types de systèmes mis en pratique de nos jours.

La vidéosurveillance est un dispositif de sécurité qui s’appuie sur une ou plusieurs caméras qui filment en permanence, ou à des moments prédéfinis, les événements se produisant dans un rayon donné à l’intérieur d’un espace privé.

La vidéoprotection couvre un lieu public ou un lieu ouvert au public : restaurants, magasins, voie publique… L’installation d’une vidéoprotection nécessite une autorisation préfectorale. La conservation des images ne peut pas dépasser un mois. La vidéoprotection emploie le même dispositif matériel que la vidéosurveillance, à savoir des caméras et un dispositif d’enregistrement.

Enfin, la télésurveillance est un service de sécurité qui consiste à surveiller un lieu 24 h/24, 7jours/7, depuis un centre de contrôle à distance. Contrairement à la vidéosurveillance et à la vidéoprotection, cela implique une veille permanente d’un service de sécurité et une réaction immédiate en cas d’intrusion.

Trois types de systèmes

Rodez. Millau. Villefranche-de-Rouergue. Decazeville. Laissac, Onet-le-Château. Baraqueville, Rignac. Réquista. Espalion. Saint-Affrique. Nauviale…

Le département de l’Aveyron compte donc de plus en plus de communes qui font appel à la téléprotection et, pour la plupart, sans opposition particulière des habitants. Plusieurs autres étudient le passage à l’acte, à l’image de Luc-la-Primaube. S’il n’existe pas de statistiques faisant un lien entre l’installation de ces dispositifs et une éventuelle baisse de l’activité délinquante et/ou de l’incivilité, les élus sont nombreux à considérer cet apport comme positif.

Certains, à Rodez, à Millau ou à Villefranche, évoquent même des affaires d’atteintes aux biens et aux personnes élucidées grâce aux caméras. C’est le cas aussi à Decazeville. "Aux six caméras déjà en place, quatre supplémentaires viendront s’ajouter prochainement", indique Robert Garcia, adjoint à la sécurité, qui révèle que le dispositif de vidéoprotection a déjà permis de résoudre plusieurs délits, notamment dans le centre-ville decazevillois.

 

Cet article est réservé aux abonnés
Accédez immédiatement à cet article
2 semaines offertes
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?

Les commentaires (1)
Anonyme13114 Il y a 2 années Le 24/05/2021 à 11:18

Les uns veulent protéger les honnêtes gens tandis que les autres veulent protéger les rocailles et les canailles.