Pol Lemétais, un galeriste à l'état «brut»

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Maillon bien huilé du musée des arts buissonniers de Saint-Sever-du-Moustier, Pol Lemétais est aussi galeriste. Son domaine de prédilection l’art en marge, «outsider», brut qu’il souhaite faire découvrir au plus grand nombre.

La carrière de Pol Lemetais est intimement liée à celle de Saint-Sever-du-Moustier. Dans ce petit village du Sud Aveyron devenu le haut lieu de l’art singulier, c’est là où encore jeune homme, celui qui est aujourd’hui galeriste «nomade» s’est frotté pour la première fois aux arts buissonniers, comprendre les arts en marge, les arts outsiders, les arts bruts.

Objecteur de conscience, lui qui avait déjà pas mal roulé sa bosse dans les friches culturelles de l’ouest parisien, débarque un beau matin dans ce village du bout du monde. Nous sommes au milieu des années 90. Avec quelques camarades, Pol rejoint l’association culturelle locale, les Nouveaux Troubadours, et s’investit dans la localité de 70 âmes.

«L’idée était de faire vivre la culture autour d’un petit lieu culturel à peine naissant. Mais très vite, on s’est demandé comment vivre ici, au village, en envisageant les manques, les besoins. En imaginant les initiatives à mettre en œuvre pour permettre à quiconque de vivre ici à l’année.» S’en suivra une foule de petites choses et une implication plus poussée autour de l’association dont ils commencent à mesurer le potentiel. Après quelques expositions d’artistes locaux dans la petite salle communale de la place, c’est une rencontre – «déterminante»- qui va accélérer les choses.

«Nous avions pour habitude d’inviter chaque été des artistes à Saint-Sever. L’un d’entre eux, Jean-Michel Chesne, s’intéressait déjà beaucoup à l’art brut, à l’art singulier, populaire. Il nous a proposé d’exposer sa collection plutôt que son travail. Tout ça a donné la première exposition ‘Un monde de brut» en 1995: un carton! Avec les ans, ce «petit centre culturel» saisonnier se mû ainsi en un musée des arts buissonniers. Permanent cette fois.

Pourquoi buissonniers ? « Parce qu’en marge, au bord de la route, juste à côté du chemin, développe Pol. Par analogie, il y a aussi cette notion de buisson-ardent, tout à la fois épineux mais foisonnant… Pas forcément facile d’accès. Il y a enfin cette notion d’école buissonnière.»

« Couteau suisse »

Rouage bien huilé des Nouveaux Troubadours, Pol Lemetais a pourtant voulu pousser son expérience de l’art outsider un peu plus loin, en créant une galerie dédiée à ce courant si particulier et à ses artistes qu’il représente aujourd’hui dans le monde entier. «En voyant la réaction des gens, ici, devant les œuvres exposées au musée, j’ai très vite eu envie de les montrer ailleurs. D’aller au-devant des gens, des collectionneurs. De les faire vivre tout simplement.»

Clairement éloignée du monde associatif, l’activité de galeriste «nomade» l’occupe aujourd’hui la moitié de son temps. «J’avais envie de prendre des risques, de représenter certains artistes que je connaissais, d’autres que j’ai rencontrés depuis» Pour Pol, le début d’une «grande aventure» qui le conduit régulièrement sur les grandes foires d’arts d’Europe et à New York, une fois par an.

«C’est dans ce type d’événements que tout se passe finalement. Loin des murs des galeries.» Depuis ses bureaux à Saint-Sever, son «dépôt» déjà bien garni des œuvres de l’artiste Paul Amar, le quadragénaire qui pourrait très prochainement ouvrir une galerie éponyme dans la Ville rose, savoure le chemin parcouru.

«Je suis content d’avoir pu réaliser mon projet de départ. À savoir, vivre ici au village tout en ayant une activité qui me permet d’être relié au monde!» La contrepartie, des kilomètres de bitumes à avaler tous les ans et des lombaires qui se signalent de plus en plus souvent.

«Être galeriste, c’est aussi être capable de savoir tout faire. Des discours à l’accrochage en passant par le transport et la manutention.» Reste pour Pol Lemetais la satisfaction de faire changer le regard des gens sur ses œuvres et ses artistes. «Il y a entre le musée des Arts buissonniers et la galerie, une complémentarité que j’apprécie.

Organiser une exposition nous permet de faire découvrir le travail de tel ou tel artiste. Mais les foires auxquelles je participe, tout ce que je fais à côté, va permettre de les faire vivre. C’est aussi pour ça que je fais ce que je fais!» 

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