LGV, économie, présidentielle, rôle des Régions : Carole Delga évoque ses priorités

  • La présidente de la Région Carole Delga. La présidente de la Région Carole Delga.
    La présidente de la Région Carole Delga. DDM - Nathalie Saint-Affre
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Propos recueillis par Eric Berger, Frédérique Michalak et Vincent Coste

Principaux chantiers de son début de deuxième mandat de présidente de la Région Occitanie, urgence climatique, aide aux entreprises, lignes à grande vitesse, élection présidentielle, décentralisation, ou mise en place d’un revenu écologique jeune : Carole Delga est sur tous les fronts pour sa rentrée politique, et avant le congrès des Régions de France qu’elle accueillera à Montpellier. La présidente de la Région a accordé une interview au groupe La Dépêche.

Quelles sont vos priorités pour ce début de mandat ?
Carole Delga: Le mot d’ordre c’est anticiper pour ne pas subir. Je suis attachée au volontarisme politique pour ne pas être la proie des changements exigés par l’urgence climatique et l’urgence sociale. Les citoyens ne doivent pas avoir l’impression de subir les mutations, d’être exclus.70 % des Français pensent que l’avenir de leurs enfants sera moins bon que leur vie actuelle. Il y a de plus en plus un sentiment d’insécurisation, d’anxiété.
Nous voulons que chaque habitant d’Occitanie trouve sa place. Les politiques régionales, ça doit être de donner un espoir, poser les fondations d’un nouveau modèle de développement qui concilie écologie et économie. 2020-2021 est un vrai tournant. Pour les entreprises, nous sommes passés à 400 millions d’euros d’aide pour le maintien de l’emploi, la modernisation, la transition écologique. Nous avons ainsi aidé 60 000 entreprises sur les cinq premières années. Nous investissons aussi de manière forte pour l’éducation : sur la formation, la recherche. Nous sommes la première région de France en recherche publique et privée. Dans les moments de difficulté, il ne faut surtout pas désinvestir.

Sur le plan économique, sommes-nous en sortie de crise ?
Oui, l’économie reprend. Il y a des perspectives de croissance. Mais il y a une vraie difficulté sur le manque de main-d’œuvre. C’est pourquoi on va mettre en place le revenu écologique jeune qui sera voté fin octobre. C’est un dispositif d’aide pour les jeunes pour aller vers les formations qui correspondent au pacte vert, aux enjeux environnementaux, climatiques, énergétiques. Il sera expérimenté pour 1 500 jeunes. La rémunération dépendra de la durée de leur formation. L’objectif est de les amener vers des métiers en tension, des métiers verts comme la rénovation énergétique, les énergies renouvelables, la question de la biodiversité.

Quel est votre rôle exact auprès d’Anne Hidalgo pour la présidentielle ?
Je suis chargée de la structuration territoriale, des relais sur le territoire pour faire remonter des idées et en tester certaines. Je m’occupe aussi des contacts avec EELV, le PCF, le PRG, Arnaud Montebourg.

Pas avec Jean-Luc Mélenchon ?
Non. En tout cas je ne participerai pas aux discussions avec lui. Il se fait le relais de thèses complotistes, il a franchi la ligne rouge, on n’a pas la même conception de la société.

Cette présidentielle, c’est une élection pour remettre le PS en selle ?
C’est une élection pour trouver une véritable alternative à la présidence de Macron.
Mais personne n’envisage la victoire de la gauche…
C’est dans 6 mois et 6 mois, en politique, c’est une éternité.
Reste qu’après vos succès électoraux, vous pourriez être associée à une défaite
Il y a toujours une part de risque quand on se présente ou qu’on est dans une équipe. Mais il faut être cohérent avec ses convictions, l’important est d’être fidèle et constant, je le suis. La politique c’est violent et quand je pars dans un combat, je m’attends toujours au pire. J’ai la cuirasse.

La présidence de la Région, celle des Régions de France, la campagne d’Hidalgo… Comment conciliez-vous toutes ces fonctions ?
En travaillant encore plus, en ce moment c’est six jours et demi sur sept.

Votre nom a circulé pour être candidate, Cambadélis vous cite comme faisant partie de la relève du PS, pensez-vous à 2027 ?
Non, je n’y pense pas en me douchant, mais je pense aux problèmes des gens et à l’Occitanie. Je ne tire pas de grands plans sur la comète.

Si Emmanuel Macron est réélu et qu’il vous appelle au gouvernement ?
Je n’irai pas. Je ne partage pas son projet pour la France. Aujourd’hui il est un homme de droite qui croit que la France est un pays qui avance par les élites. On n’a pas la même vision et on ne m’achètera pas avec un maroquin.

"Il faut reconnaître qu’avec Jean Castex, il y a eu quand même plus d’écoute et d’avancées pour les projets locaux"
"Il faut reconnaître qu’avec Jean Castex, il y a eu quand même plus d’écoute et d’avancées pour les projets locaux" DDM - Nathalie Saint-Affre

Montpellier accueille jeudi le congrès des Régions de France. Vous demanderez à nouveau plus de décentralisation ?
Le président de la République est un centralisateur, c’est une évidence. Après, il faut reconnaître, et je ne dis pas ça parce qu’il est d’Occitanie, qu’avec Jean Castex il y a eu quand même plus d’écoute et plus d’avancées pour les projets locaux. Et toutes régions confondues. Et lors de la campagne, le sujet de la décentralisation va être un sujet majeur. Non pas que ma boulangère m’interroge sur la décentralisation. Par contre, elle m’interroge sur le temps de la décision publique qui est trop longue. Donc il faut rapprocher la décision du citoyen, et pour cela il faut plus de décentralisation. Et nous auditionnerons tous les candidats à la présidentielle sur ce sujet.

Dans quels domaines souhaitez-vous des évolutions ?
Pour l’éducation. En matière d’orientation, on va sortir une loi qui donne aux Régions plus de responsabilités. Dans les faits, ce n’est pas le cas. On a des difficultés extrêmes à mettre en place de vrais dispositifs depuis deux ans. Certes la crise Covid n’a pas aidé, mais quand même… Il faut aller plus loin. Je pense aussi qu’il y a un vrai continuum entre collèges et lycées, c’est à travailler. Et je n’y mets pas les écoles, comme le propose Xavier Bertrand. Il a tort, les écoles, ça doit rester à l’échelon communal.

Et pour la santé ?
Sur la santé, je pense que les Départements doivent avoir plus de pouvoir, parce qu’en France, on est sur un système très curatif. Donc, sur la question des préventions santé, ça doit être le Département. Pour le système hospitalier, ce sont les Régions qui doivent intervenir, parce qu’il n’y a pas dans chaque département une offre hospitalière complète. Et les Régions doivent fixer les places de formation dans les métiers du sanitaire et du social.
Et puis je pense que la Région doit être chef de file sur l’aspect économie, pour les PME, TPE, commerce et artisanat. Après, quand on est par exemple dans des problématiques de redressement, il faut travailler avec l’État. Enfin, même si c’est un autre débat, je suis pour l’autonomie fiscale des collectivités locales.

Lignes à grande vitesse: "ça avance bien"

Les deux projets de LGV (Lignes à grande vitesse) Bordeaux-Toulouse (GPSO) et Montpellier-Perpignan (LNMP) sont sur la bonne voie, confirme Carole Delga : « ça avance bien. Sur LNMP, le tour de table financier est fait. - L’enquête publique débutera en fin d’année. Pour Toulouse-Bordeaux, on réactualise le plan de financement. L’objectif, c’est de le finaliser pour que l’ordonnance (ndlr : de création de la société de projet) soit signée avant le mois d’avril. Il nous faut début octobre l’accord de toutes les collectivités. On y travaille avec le préfet de Région. Quant aux travaux, ils débuteront côté Toulouse pour remonter vers Bordeaux. On envisage de démarrer ceux du nord de Toulouse en 2023. »
Pour Carole Delga, les deux projets associés à celui de LGV Marseille-Nice ouvrent des perspectives : « Cela permettra un rééquilibrage Est-Ouest, de l’Atlantique à la Méditerranée puis l’Italie. Ce n’est pas juste un investissement pour les 10 prochaines années. Il y a un ensemble cohérent et structurant pour les 50 prochaines années. »
La présidente de Région n’oublie pas les trains du quotidien et les « petites » lignes : « La ligne Rive droite du Rhône rouvrira en juin 2022. - Nous sommes partis de loin.- J’avais à l’époque tout le gouvernement contre moi. » Pour la ligne Montréjeau-Luchon (Haute-Garonne), Carole Delga annonce aussi du nouveau : « La SNCF parle de décembre 2023. - Moi, je souhaite dès juin 2023.- Ce ne sera pas l’ouverture commerciale mais les premiers essais du train à hydrogène. » - Pour la ligne Alès-Bessèges (Gard), elle évoque une réouverture en 2024.-
Enfin, sur le dossier rail, Carole Delga confirme le succès de la gratuité du train pour les moins de 26 ans, « avec plus de 4 000 jeunes inscrits ». « Comme quoi la question de la tarification est importante. - C’est un facteur fondamental de la fréquentation » assure la présidente de Région.