Pédocriminalité dans l'Eglise : il y a 21 ans à Rodez, le procès de l’abbé Maurel...
En février 2000 le procès de l'abbé Maurel, ancien directeur du collège privé catholique Saint-Pierre de Mur-de-Barrez, accusé de viols sur mineurs, se tient à Rodez. Une affaire de pédocriminalité dans l'Eglise qui soulignait aussi le poids de l'omerta.
Jean-Marc Sauvé, le président de la Commission indépendante sur les abus de l’Eglise (Ciase) qui a remis hier un rapport accablant recensant entre 216 000 et 330 000 victimes de violences ou d’agressions sexuelles perpétrées entre 1950 et 2020.
Ce rapport de 485 pages dit aussi tout de l’omerta qui a longtemps prévalu au sein de l’Eglise pour couvrir les affaires de pédocriminalité, rappelle La Dépêche du Midi. Cette chape de plomb, ceux qui ont assisté au procès de l’abbé Maurel en février 2000 devant la cour d’assises de l’Aveyron – affaire citée dans le rapport Sauvé – ont pu en mesurer tout le poids. Directeur du collège privé catholique Saint-Pierre de Mur-de-Barrez depuis près de 40 ans, Jean-Lucien Maurel avait été dénoncé en 1996 par deux lettres anonymes l’accusant d’avoir commis des violences sexuelles sur des pensionnaires.
En mars 1997, le témoignage d’un garçon de quinze ans affirmant avoir été violé au cours d’un voyage de fin d’année aux Etats-Unis conduira l’abbé Maurel à être placé en garde à vue. L’enquête mettra au jour d’autres témoignages d’adolescents se disant victimes. Sept personnes âgées de 30 à 50 ans, reconnaissent qu’à l’époque où elles étaient au collège Saint-Pierre, Jean- Lucien Maurel avait eu à leur encontre des pratiques condamnables.
Un procès hors normes... dans une grange
Le prêtre crie à la cabale, réclame des examens médicaux, nie en bloc, tandis que le village, en proie à toutes les rumeurs, se divise violemment en deux clans. En novembre 1998, l’abbé Maurel, en détention préventive depuis mars 1997, est renvoyé devant la cour d’assises de l’Aveyron. Le tribunal étant en travaux, le procès se tient le 23 février 2000 dans une grange du Parc Saint-Joseph réaménagée pour l’occasion.
Les audiences se déroulent dans un climat de tension extrême, avivé par l’intérêt médiatique de ce procès hors normes qui doit entendre plus de cent témoins et mobilise des ténors du barreau, Me Gilbert Collard pour l’abbé, Me Jean Chevais pour L’Enfant bleu.
Les audiences se tiennent souvent à huis clos. Où les adolescents victimes s’avancent à la barre, soutenus du regard par leurs parents. Ils racontent leur calvaire, avec réserve, émotion et parfois agressivité contre l’ancien directeur de collège. Ils disent tout de l’ampleur de l’omerta, du traumatisme qui a bouleversé leur vie à jamais, et des souffrances qu’ils ont endurées en silence. Face à l’un des témoignages bouleversants lui demandant «Ouvrez votre cœur enfin, soulagez-vous» , l’accusé est déstabilisé et baisse le regard.
L’abbé Maurel a été condamné à 10 ans de réclusion criminelle pour viols et agressions sexuelles sur trois mineurs de 10 à 13 ans. Il a été libéré le 5 octobre 2005 après avoir bénéficié de permissions pendant deux ans. Cette libération anticipée avait provoqué la colère des victimes.
Retiré à Rodez, l’abbé Maurel est resté prêtre sans ministère, pouvant célébrer des messes en privé. Il n’a jamais été défroqué.
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