Tatouages : pourquoi l'Europe interdit l'usage de plusieurs encres de couleurs dès 2022 ?
L'Union européenne a décidé d'interdire plusieurs encres de tatouage de couleur, une partie dès 2022, l'autre en 2023. Les syndicats de tatoueurs français s'insurgent contre cette mesure, qu'ils jugent sans fondement. Vers le retour de tatouages en noir et blanc ?
La mesure a fait l'effet d'une bombe dans le monde du tatoueurs et des tatoués, à l'heure où environ un Français sur cinq est déjà passé sous l'aiguille, pour se faire "graver" un coeur ou un diable sur la peau.
D'ici quelques mois en effet, à partir du 4 janvier 2022 précisément, plusieurs encres de tatouages de couleur vont devenir interdites à l'utilisation en France, révèle La Dépêche. Ainsi en a décidé l'Union européenne, qui a abaissé drastiquement le seuil autorisé de centaines de substances contenues dans les encres, rendant de fait 25 pigments utilisés par les tatoueurs en dehors des clous européens. Le rouge, l'orange, le jaune, et plusieurs couleurs dérivées (rose, chair...) sont concernés.
Pire, au 4 janvier 2023, les pigments Blue 15:3 et Green 7, naturellement utilisés pour le bleu et le vert, seront à leur tour interdits. À la louche, cela représente environ 40% de la gamme de couleurs en moins pour les tatoueurs dès 2022, une portion qui passera à "au moins 60%" en 2023 si la loi européenne en reste là.
"Mutations génétiques"
En cause, la présence de substances potentiellement toxiques dans la composition des encres, selon l’Agence européenne des produits chimiques. Ces substances sont susceptibles, d'après l'agence, de "provoquer des cancers ou des mutations génétiques".
Pour les tatoueurs, le coup est rude à encaisser. "L'ensemble de la profession vit cette décision comme une injustice totale", déclare Philippe Delas, alias Feel, tatoueur toulousain membre du syndicat national des artistes tatoueurs (Snat). Injustice, car le sentiment que cette décision a été prise "sans vraiment avancer de preuves scientifiques des dangers potentiels pour la santé", est bien ancrée parmi les professionnels. "Le fait de tatouer ne date pas d'hier, rappelle Feel. Si c'était si dangereux que ça, on le saurait depuis le temps : il n'y a aucun lien démontré entre les encres que l'on utilise chez les professionnels et d'éventuels cancers. Les encres ont énormément évolué en plus, dans le bon sens."
Le Snat a lancé en conséquence une pétition sur le site du Parlement européen.
"Exagéré"
Isabelle Rousseau, membre du bureau du syndicat de dermatologie français, ne cache pas une certaine forme d'incrédulité face à la décision de l'Union européenne d'interdire une grande gamme de pigments dans les encres de tatouage. "C'est un peu exagéré", résume-t-elle, avant de détailler : "Il n'y a pas vraiment de preuves scientifiques qui justifient une telle mesure. Tout ce qu'on sait, c'est qu'il y a un vague risque possible de cancer de la vessie 30 ans après un tatouage pour certaines couleurs, et encore... En ce qui me concerne, je n'ai jamais rencontre de cas de patients de ce genre."
Pour elle, on est véritablement face à un principe de précaution poussé à l'extrême et qui n'est "pas justifié".
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