Aveyron : RAGT Semences, une croissance mondiale

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RICHAUD Guilhem

France, Europe, Russie, Chine, Canada, Brésil, Australie, Nouvelle-Zélande… Si RAGT Semences, entreprise centenaire, est devenue une multinationale, avec des activités dans 48 pays à travers la planète, ses actionnaires ont toujours souhaité conserver un véritable ancrage local. C’est le cas avec RAGT Plateau Central, qui rayonne principalement sur la zone Massif central, mais également avec le siège de Rodez, où subsistent une grande partie de la production ainsi que les activités de support et de direction. Le tout au service d’une entreprise désormais internationale.
 

Comment continuer à se développer, sans renier ses valeurs ? C’est le défi face auquel se retrouve, année après année, RAGT. L’entreprise familiale aveyronnaise centenaire, dont le siège reste basé à Bourran, à Rodez, rayonne désormais bien au-delà de l’Aveyron. Sa filiale RAGT Semences a conquis, au fil des ans, les marchés français, puis européens, et désormais mondiaux. "On a beau être centenaire, cela ne veut pas dire, qu’on a une image de vieux machin, sourit Laurent Guerreiro, son directeur général. Notre entreprise n’a jamais été aussi dynamique et prête à se réinventer." Une évolution logique pour une entreprise qui a dans son ADN la recherche. Spécialisée dans la sélection et la création de nouvelles variétés parmi les 32 espèces sur lesquelles elle travaille, afin de s’adapter au mieux aux contraintes des agriculteurs, mais aussi aux attentes du marché, elle a très vite compris que tout le travail ne pourrait pas se faire de l’Aveyron, ni même de l’Hexagone. Le semencier compte donc désormais 20 stations de recherches et autant de filiales commerciales à travers le monde. "Nous avons encore un tropisme européen assez fort, reprend le responsable. Mais petit à petit, nous nous implantons dans de nouveaux pays." Avec à chaque fois, une équipe de chercheurs, puis, quand le travail a abouti, des commerciaux, pour vendre les semences qui ont été mises au point. L’expansion a commencé par l’Europe et s’étend, années après années vers l’Est, jusqu’à la Russie, où RAGT Semences vient, au cours de l’été, d’acquérir 49 % des parts de la société Rosagrotrade. L’aboutissement d’une stratégie de fond dans ce pays, qui est considéré comme le prochain pourvoyeur mondial de blé notamment. Et ce n’est pas pour rien que l’entreprise s’y intéresse puisqu’elle est actuellement leader européen sur le marché des céréales à paille (blé, orge, avoine, triticale…). "Avec le réchauffement climatique, de nombreuses terres vont devenir cultivables en Sibérie, reprend Laurent Guerreiro. Le sol là-bas est parfois considéré comme la meilleure terre du monde." Pour le moment, RAGT Semences n’en est pas encore là. Depuis quinze ans, elle avait développé un partenariat avec Rosagrotrade sur le maïs, le tournesol, le soja et le sorgho. Elle était effectivement le fournisseur exclusif de génétique occidentale sur ces espèces. Mais alors pourquoi passer à l’échelle supérieure et prendre la moitié des parts de l’entreprise ? "Parce qu’il fallait renouveler ce partenariat chaque année, reprend le directeur général. Et comme nous étions satisfaits de cette collaboration, nous avons décidé de devenir actionnaires afin de nous donner plus de visibilité et de lisibilité sur le marché." Et donc être prêt le jour où il faudra s’attaquer à la Sibérie.

Une séparation avec Monsanto pour garder son indépendance

Mais la Russie n’est pas le seul marché sur lequel RAGT Semences est actuellement très actif. À la fin de l’année 2020, elle a racheté Seed Force Nouvelle-Zélande et Seed Force Australie, qui lui permet d’asseoir sa position dans le Pacifique. "Nous étions partenaire minoritaire depuis 2006, reprend le dirigeant. Les actionnaires majoritaires historiques souhaitaient prendre leur retraite et passer la main. Nous nous sommes interrogés sur la position à adopter. Si nous ne nous positionnions pas, nous avions le risque de nous retrouver en compétition avec un de nos concurrents."

Quand elle ne prend pas des parts ou n’est pas directement implantée en son nom propre, dans des pays (Ukraine, Brésil, Royaume-Uni…), l’entreprise aveyronnaise, qui continue de produire 90 % de ses semences en Aveyron, noue des partenariats de recherche. C’est le cas avec l’Allemagne (lire pas ailleurs), mais aussi avec les États-Unis. Là-bas, à partir des années 1970, le semencier aveyronnais a d’abord travaillé avec le géant américain Dekalb, avant de se retirer en 1999, quand la multinationale a été rachetée par Monsanto. Pendant près de 30 ans, cet accord a permis de faire un pas de géant pour la recherche sur certaines espèces. Et en sortir a été coûteux puisque pour maintenir la même activité, il a fallu multiplier l’investissement par deux. Mais c’était nécessaire pour maintenir l’indépendance du groupe. Depuis, le groupe travaille avec Beck’s Hybrids, une société familiale au profil similaire au sien. Les deux entreprises ont monté un programme commun sur le maïs et se sont ensuite partagé le marché. En Chine, un marché en pleine expansion, mais où il est très compliqué de s’implanter pour une firme occidentale, c’est le schéma russe qui a été choisi. RAGT travaille avec un semencier local.

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C’est le nombre de pays dans lesquels RAGT Semences est installé, soit via des stations de recherche, soit pour des activités commerciales. L’entreprise, mène 45 programmes de recherche sur 32 espèces différentes qu’il faut en permanence faire évoluer pour s’adapter aux besoins des différents marchés.

 

L’Afrique prochain développement

Si l’Asie est un marché porteur, le prochain axe de développement se trouve en Afrique pour l’entreprise aveyronnaise. Déjà implanté commercialement au Maghreb où les variétés développées en Espagne sont prisées, RAGT cible maintenant l’Afrique noire avec des premières activités en Éthiopie, au Kenya, mais également en Afrique du Sud. "Mais nous devons prendre le temps d’étudier le marché et de valider des prérequis, termine Laurent Guerreiro. Avant de penser au business, il faut d’abord étudier le contexte réglementaire, les contraintes pédoclimatiques, les attentes des clients…" En Afrique, ce travail est en cours. Et nul doute que dans quelques années, le continent sera un nouveau terrain de développement pour la désormais très grosse entreprise familiale aveyronnaise.

 

Deux partenariats stratégiques avec l’Allemagne

Les échanges entre RAGT Semences et l’Allemagne sont solides. Depuis une dizaine d’années, l’entreprise aveyronnaise s’est alliée au semencier allemand NPZ pour travailler sur le colza en croisant les variétés génétiques. "On a décidé qu’on serait plus forts à deux. Parfois cela nécessite un peu de pédagogie pour expliquer à nos équipes commerciales pourquoi on fait ça, sourit Laurent Guerreiro. On considère qu’on n’a pas la taille critique d’une multinationale à 200 000 employés comme Bayer où BSF et qu’il faut connaître ses limites. Dans un certain nombre de cas, cela peut être bénéfique de s’associer à quelqu’un qui nous apporte, une expertise, une expérience ou une connaissance complémentaire à la nôtre. Pour NPZ, l’objectif est de faire des produits encore plus pertinents et qui répondent encore mieux aux attentes des clients. C’est toujours compliqué, car vous perdez une partie de votre indépendance. Mais aujourd’hui, ce partenariat fonctionne très bien depuis plus de 10 ans. Les années où on est un peu plus dans le creux de la vague, il permet d’être soutenu par notre partenaire qui a des produits plus innovants, et inversement les années où tout va bien. On peut se retrouver sur des marchés où ils proposent leur génétique et nous aussi, mais globalement, la mutualisation d’efforts de recherche en amont nous permet de réduire les coûts et de bénéficier d’un résultat performant à la fin."Une alliance avec le géant Bayer depuis le printemps dernierUne seconde alliance, beaucoup plus récente, a été passée avec le géant allemand Bayer. Au printemps, les deux entreprises ont en effet signé un accord de collaboration afin de développer des semences de blé hybride pour les marchés européens. "Certains de nos gros concurrents, comme Syngenta ou BSF sont dessus depuis plus de 8 ans, analyse le dirigeant de l’entreprise. Nous, on a travaillé dessus il y a quelques années, mais on n’était pas persuadés qu’ils seraient la solution miracle. Les premiers développements qu’on avait faits ne nous semblaient pas apporter plus aux agriculteurs que ce qu’on faisait au travers de nos sélections conventionnelles. Donc pourquoi venir dans une démarche qui va être coûteuse en termes de recherche et qui ne délivrera pas plus que nos lignées traditionnelles ?" Mais face au risque de voir les concurrents lancer de grandes campagnes de marketing auprès des agriculteurs et de ne pas avoir de réponse à apporter à ses clients qui seraient intéressés, RAGT, leader européen sur le blé, a fait machine arrière. Et persuadée que si ces produits arrivent à s’implanter sur le marché, cela se fera avec une offre globale et la solution technologique et chimique pour les exploiter au mieux "Nous avons la génétique qu’ils ne maîtrisent pas, reprend Laurent Guerreiro. Eux nous apportent, certes, un peu de financement, mais surtout l’outil digital. On n’aurait pas les moyens de le développer. Ils ont 1 000 salariés totalement dédiés à cet outil. Quand nous on met quelques dizaines de millions d’euros par an dans notre recherche, eux, ça se chiffre en centaines. C’est un moyen de faire bénéficier à ce programme de sélection des moyens qu’on n’aurait pas en interne." Là encore, quand les blés hybrides RAGT/Bayer entreront en phase de commercialisation un risque de concurrence entre les deux entreprises existe. Mais l’entreprise aveyronnaise sera gagnante quoi qu’il arrive : comme elle a apporté la génétique, une part des revenus des ventes de Bayer lui reviendra automatiquement…
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