Anne Blanc : « On est là pour gérer des dossiers compliqués »

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  • Anne Blanc continue à croire à une issue favorable pour Sam.
    Anne Blanc continue à croire à une issue favorable pour Sam. Centre Presse
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propos recueillis par guilhem richaud

Après une semaine chargée, avec notamment deux visites parlementaires, Anne Blanc, député de la 2e circonscription de l’Aveyron s’est confiée, dans sa permanence de Naucelle. Son rôle de parlementaire, la situation de Sam et sa position qui a froissé les syndicats et son envie, ou non, de postuler à un nouveau mandat, elle n’a rien éludé.

Il y a eu deux visites parlementaires la semaine dernière en Aveyron.Elles se multiplient depuis plusieurs mois. Qu’est-ce que ces échanges apportent à votre travail parlementaire et au département ?

Je pense qu’ils permettent d’avoir une caisse de résonance par rapport aux discours qu’on tient, nous, députés, aux ministres quand on est à Paris puisque l’un des rôles des parlementaires est de faire remonter la réalité des territoires. On a des échanges et une proximité élevée avec les ministres et les cabinets. Je pense que le fait que les ministres viennent le voir et le réentendre sur le terrain donne un autre poids aux problématiques qu’on peut exposer au niveau national. Les formats qui ont été organisés vendredi dernier avec la ministre du Logement, que ce soit à Saint-Chély, à Rodez ou à Naucelle étaient simples, sans solennité ni protocole, mais seulement dans l’échange spontané.

La ministre du Logement a beaucoup discuté avec les élus locaux. C’est important ?

C’est fondamental. Sur le logement, il y a de multiples problématiques. Ces échanges permettent aux ministres de voir la pertinence de leur décision à l’échelle locale. Un texte législatif s’applique à tous. On a la chance d’avoir un pays d’une grande diversité et ce qu’on décide à Paris qui peut être bon pour un secteur pose parfois des problématiques sur un autre territoire. Nous préparons la loi 3DS sur le sujet de la différenciation en fonction des territoires. Ce genre d’échanges permettent de prendre la mesure de l’enjeu de ce futur texte.

Ces visites, qui se multiplient depuis l’été, arrivent dans un contexte de fin de mandat. Vont-elles avoir des conséquences où est-ce seulement un moyen de faire campagne ?

Il ne faut pas se voiler la face, c’est sans doute les deux à la fois. C’est un moyen pour les ministres de rendre compte de l’action gouvernementale pendant les quatre ans et demi de mandat, mais c’est aussi un moyen de récolter et ressentir les problématiques locales. Les ministres de ce gouvernement se sont, depuis le début du mandat, toujours beaucoup déplacés. Quand ils sont sur le terrain on leur reproche de faire de la propagande et quand ils sont à Paris, on leur reproche de ne pas être sur le terrain. C’est une schizophrénie française.

Il y a une problématique très forte sur votre circonscription, celle de Sam, à Viviez, avec une échéance dans 15 jours qui pourrait être la dernière. Que vous évoque la situation ?

Je suis très inquiète parce qu’on a une date butoir le 19 novembre et qu’aujourd’hui même si on a encore un peu d’espoir avec deux candidats potentiels sur les rails, on n’a pas encore la certitude que des offres soient déposées et qu’elles correspondent aux attentes du tribunal.

C’est un sujet sur lequel vous avez été beaucoup bousculée depuis un an par les salariés notamment. C’est un dossier qui a été compliqué à gérer pour vous ?

On est là pour gérer des dossiers compliqués. Le sujet de Sam me préoccupe depuis les premières semaines du mandat en 2017. À l’époque, on était sur la reprise par Jinjiang. On avait mis beaucoup d’espoir puisqu’ils annonçaient des investissements importants, mais ils ne les ont pas faits. Je suis intimement convaincue qu’on a un savoir-faire dans cette entreprise, avec une fonderie qui a été un des fleurons de l’industrie française. J’ai essayé de trouver des solutions avec l’ensemble des acteurs. J’ai beaucoup travaillé avec les élus locaux, avec le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher aussi, qui s’est énormément investi. À un moment, j’ai fait part de mon sentiment. Je pensais que l’offre de CIE n’était pas parfaite, mais qu’il ne fallait pas la jeter trop vite. Qu’on devait rester en discussion pour la faire évoluer. De 150 emplois conservés au départ, on avait réussi à la faire grimper. Bien sûr, il n’y avait pas les fonctions supports et le bureau d’études, et c’était un regret, mais j’avais expliqué qu’il fallait faire attention à ne pas l’écarter trop vite. Ça n’a pas été compris et on a estimé que j’étais le perroquet du gouvernement. Mais avec tous les éléments que j’avais, je crois que c’était la meilleure position que je pouvais avoir. Il faut savoir que le gouvernement a sollicité 57 potentiels repreneurs pour leur demander de faire une offre. Parmi eux il y a eu qu’un seul candidat, CIE, qui en le tarabustant a bien voulu répondre. C’est pour ça que je pensais qu’il ne fallait pas rejeter directement CIE. Quand on est dans une négociation, chacun doit revendiquer ses intérêts, mais chacun doit aussi essayer de comprendre la problématique de l’autre. Je comprends les salariés Sam, mais s’il n’y a plus d’employeur, il n’y a plus rien. J’ai tout intérêt à ce que Sam vive, c’est l’intérêt du territoire. Ce que j’ai dit aux salariés, c’est que si on n’a pas CIE, on risque de n’avoir personne. Et si on n’a personne, ce sera la fin.

Vous pensez qu’on est proche de la fin ?

On est proche de connaître l’issue. Est-ce que ça va être la fin ? Franchement, je ne l’espère pas. Tant que rien n’a été prononcé, j’y crois encore. J’y crois encore car il y a une forte mobilisation, mais aussi parce que tout le monde a donné des injonctions à Renault qui est une clé de l’histoire.

Sur le Bassin, il y a cette situation, mais aussi une dynamique avec la Mecanic Vallée, qui cherche pas mal de salariés, Snam, qui vient d’annoncer l’embauche de 600 salariés. N’est-ce pas paradoxal d’avoir une usine en grand danger et en même temps un Bassin dans lequel il y a beaucoup d’emplois vacants ?

Avec Sam, je regrette le risque de perdre un savoir-faire industriel. Je suis un peu moins inquiète sur l’emploi parce que beaucoup d’entreprises, dans de nombreux domaines recrutent. On est dans une société qui évolue et il faut accepter certains changements. On est peut-être dans une phase de mutation. Mais cela n’empêche pas que ce serait extrêmement dommage de perdre le savoir-faire des fonderies. Il y a deux sujets, l’un spécifique sur Sam et ses salariés et un plus global sur l’activité économique de notre département.

Justement, dans cette période de sortie de crise, on a l’impression que l’industrie aveyronnaise, en grande partie basée sur votre circonscription, en sort presque renforcée. Avec les opportunités du plan de relance, beaucoup d’entreprises ont lancé des projets de développement. Pensez-vous qu’à la fin de votre mandat, la situation économique de votre circonscription sera finalement meilleure que quand vous être arrivée ?

Je pense que finalement, la crise et sa gestion, mais également les questions qu’elle a fait se poser aux acteurs économiques aura peut-être eu des effets positifs. On ne pourra en être certain que dans quelques années avec davantage de recul, mais aujourd’hui, les indicateurs que l’on a sont bons. Beaucoup de carnets de commandes sont complets et on est plutôt sur une perspective favorable.

« Je ne me suis jamais dit que me représenter serait automatique »

Alors que la campagne présidentielle démarre petit à petit, au gré des annonces de candidatures, des élections interne et des tournées de promotion de livres de potentiels futurs candidats, celle pour les législatives 2022, programmées en juin, est encore un peu loin. Mais les sortants pensent forcément à l’avenir. Anne Blanc ne cache pas qu’elle s’est posé la question de la suite : "Oui j’y pense, forcément", confirme-t-elle.

Mais elle n’a pas encore pris sa décision. "Le mandat parlementaire ne m’a longtemps pas donné envie car je trouvais qu’on ne faisait pas suffisamment de terrain, rappelle-t-elle. C’est un constat que je confirme aujourd’hui. C’est difficile, quand on a été élue locale et qu’on a pu être acteur sur les projets, de basculer comme élu national. À chaque fin de mandat, je ne me suis jamais dit que me représenter serait automatique. Cela m’a toujours donné une grande liberté dans mon action. Là, je ne suis pas intimement convaincue que je vais repartir, mais je ne suis pas intimement convaincue non plus que je ne vais pas y aller. Je me laisse le temps de voir l’envie que j’aurai. Et ce n’est pas du tout lié à la réélection ou non d’Emmanuel Macron. Je crois que j’ai été présente sur le terrain et que si je me représente, j’ai des atouts pour être réélue."

Il faudra donc encore attendre un peu pour connaître sa décision. Quand ? "Dans le courant du premier trimestre 2022 je pense", annonce-t-elle.

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