Millau. "La Pierre triste", une poétique tragédie grecque

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  • Federico Rossin, programmateur, a échangé avec les spectateurs.
    Federico Rossin, programmateur, a échangé avec les spectateurs.
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MIRALLES Corentin

Pendant un mois, le film documentaire est mis à l’honneur dans l’Aveyron. À Millau, la première séance avait lieu mardi soir. Rencontre.

Il y a des films qui nous transportent dès les premières images ; d’autres dont on attend jusqu’au générique un éventuel sursaut ; et ceux qui, sans prévenir, au beau milieu d’une scène d’apparence ordinaire, permettent à notre esprit de s’évader pour ne revenir qu’à l’apparition du mot fin à l’écran. La Pierre triste de Filippos Koutsaftis fait partie de ceux-là. Tout commence en mai 1988, lorsque le réalisateur se rend à éleusis, une petite ville de 25 000 habitants située dans la banlieue d’Athènes. Si aujourd’hui les usines dominent ses paysages et sa vie économique locale, cela n’a pas toujours été le cas.

Durant l’Antiquité, éleusis avait une grande importance mythologique car elle était le centre des Mystères, des rites religieux dédiés au culte de Démeter, déesse de l’agriculture et des moissons. De par son passé historique d’envergure, des vestiges sont régulièrement déterrés lors de travaux.

Un tournage de douze ans

Ces fouilles archéologiques, Filippos Koutsaftis les a suivies pendant douze ans. Sans relâche, le cinéaste a filmé l’évolution de cette ville, défigurée par la modernité et dont l’histoire millénaire n’a d’importance que dans les livres. à l’image de cette statue d’Eschyle, l’un des plus grands tragiques grecs, né à éleusis, transférée de place en place par les mairies successives, tel un vulgaire bibelot.

Ce film, magistralement poétique et résolument politique, est le témoin d’une époque qui s’en fout. Qui détruit des puits antiques pour construire des boutiques. Qui remplace des tombeaux par des McDo.

À travers la caméra et les mots de Koutsaftis, nous devenons les yeux des habitants d’éleusis qui observent leur ville changer, vite, si vite. Ici et là, le regard d’un couple de pêcheurs, de réfugiés d’Asie Mineure, d’étudiants en grève, d’un jeune ouvrier, d’un laitier, ou bien d’une secrétaire…

Mais par-dessus tout, Panayotis Farmakis, l’œil de la ville. Un sans-abri, qui vivait "sur la terre et sous les nuages" et qui aujourd’hui, comme beaucoup de vestiges d’éleusis, s’en est allé.

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