Parrainages : l'Aveyron, terre de conquête pour les "petits" candidats de la Présidentielle ?

  • Les maires des petites communes aveyronnaises subissent la pression des candidats dans la bataille des parrainages.
    Les maires des petites communes aveyronnaises subissent la pression des candidats dans la bataille des parrainages. José A. Torres
Publié le , mis à jour
Mathieu Roualdés

En 2017, moins d'un tiers des élus aveyronnais avaient offert un parrainage. Qu'en sera-t-il cette année ? Depuis des mois, la course est lancée, notamment pour les représentants départementaux des "petits" candidats pour qui franchir la barre des 500 sésames est souvent synonyme de "galère". 

En Aveyron, comme ailleurs, la course aux parrainages bat son plein. Et si pour les élus affiliés à un parti, offrir le fameux sésame à son candidat ne se discute pas, pour la majorité des 285 maires aveyronnais, c'est une tout autre histoire. Dans les villages, on se présente la plupart du temps "sans étiquette". Et à chaque présidentielle, le dilemme est le même : doit-on offrir un parrainage, au risque qu'il soit confondu avec un soutien, ou s'abstient-on ? En 2017, moins d'un tiers des élus du département ont joué le jeu. Les autres se sont abstenus. C'est le cas de Jean-Marc Calvet, édile de Rignac, et aujourd'hui à la tête de l'association des maires aveyronnais. "Je m'abstiendrai une nouvelle fois cette année. Beaucoup de mes confrères feront comme moi. En Aveyron, on est des politiques de consensus, on ne veut pas de divisions", explique-t-il.

Pourtant, depuis des semaines, voire des mois, sa boîte mail ne cesse de recevoir des propositions. La majorité sont issues de ceux qu'on appelle les "petits" candidats pour qui la recherche des 500 parrainages est à chaque fois un véritable chemin de croix. Au nom de la démocratie, ils ciblent souvent ces maires ruraux, apolitiques. Et ça marche. En 2017, c'est Jean Lassalle qui avait remporté la course aux parrainages dans le département, bien loin devant les "mastodontes" François Fillon, Marine Le Pen ou encore Emmanuel Macron. Maire de Mélagues, commune de 60 âmes dans le Sud-Aveyron, Jean Milesi fut de ceux qui avaient choisi le berger des Pyrénées. Il le fera de nouveau en 2022 et l'a longuement expliqué dans un communiqué de presse récemment. Il y met notamment en avant la vision de la ruralité du candidat face à "à tous ces songe-creux, germanopratins et assimilés, ignorants de la vie réelle du peuple laborieux des cités, et qui prennent le Pré-Saint-Gervais ou le bois de Boulogne pour les archétypes de la ruralité." 

"Il faut viser les petits villages, de moins de 2000 habitants"

Cette ruralité, ces coins reculés de l'Aveyron parfois à l'image des villages perchés de Corse, Armand Kleve a appris à les connaître grâce à cette course aux parrainages. Le trentenaire ruthénois milite depuis de longues années pour le Nouveau Parti Anticapitaliste et son chef de file, Philippe Poutou. Comme en 2012 et 2017, le Bordelais souhaite se représenter en avril prochain. Pour cela, ses militants aveyronnais comme Armand mettent le bleu de chauffe depuis plusieurs mois et ne compte plus leurs kilomètres. "J'en suis déjà à 3000", sourit le jeune homme engagé qui pratique encore le porte à porte pour gagner des parrainages ! Dans son viseur, "les communes de moins de 2000 habitants".

"Les plus grands villages, ce n'est pas la peine : soit les maires sont politisés, soit ils ont de trop grandes pressions sur les dotations à leurs communes et ne prennent pas le risque d'un parrainage", explique-t-il. Ces dernières semaines, l'homme a parcouru le Lévézou et le Ségala à la recherche de ces élus "dont on ne parle jamais". Et s'ils trouvaient les portes fermées à la mairie, Armand Kleve n'hésitait à aller directement au domicile de l'édile. "Et à 95% du temps, nous sommes bien reçus, assure-t-il. On ne parle pas vraiment de politique, on explique qu'offrir son parrainage à un candidat comme le nôtre, c'est faire œuvre de démocratie. Puis, les maires de ces communes dont on ne parle jamais nous expliquent leurs préoccupations souvent éloignées des débats nationaux. En ce moment, beaucoup sont sur le dossier de la fibre. Ils dénoncent aussi le bureaucratisme parisien qu'on retrouve à l'échelle de notre département". En 2017, Philippe Poutou avait recueilli 8 parrainages dans le département.

Qu'en sera-t-il cette année où à deux mois du premier tour, ils sont encore une vingtaine de postulants, déclarés ou potentiels ? Réponse le 4 mars à 18 heures, date et heure limites pour déposer les fameuses 500 signatures des élus au Conseil constitutionnel.