Architecte à Marseille, la Rignacoise Célia Cadène fait le pari de l’écoconstruction

Abonnés
  • Célia vit et travaille à Marseille, la "ville rebelle" qu’elle apprécie.	Célia vit et travaille à Marseille, la "ville rebelle" qu’elle apprécie.
    Célia vit et travaille à Marseille, la "ville rebelle" qu’elle apprécie. @CC
Publié le

Diplômée en architecture, la native de Rignac s’est spécialisée dans l’écoconstruction, "une nécessité" dans un monde fini. rencontre.

Elle a rapidement hésité entre le design et l’architecture. Mais tout aussi rapidement, c’est l’architecture qui s’est imposée. "Le côté constructif était depuis longtemps ancré en moi, valide Célia. Plus petite, j’étais plutôt celle qui jouait au Kapla ou avec des Lego."

Une vocation précoce pour la native de Rignac qui, à peine majeure, décide de laisser les parquets derrière elle – elle avait intégré la section sport-études basket à Baraqueville – pour les bancs de l’école nationale supérieure d’architecture de Marseille.

Une "révélation" pour la jeune femme qui vient aujourd’hui de boucler sa cinquième année avec une préférence marquée pour l’écoconstruction. "Il faut savoir que le secteur de la construction est le 3e plus gros pollueur de la planète. Il est donc devenu évident que l’on ne pourra pas construire demain comme on le fait aujourd’hui" pose l’architecte diplômée, qui devra encore valider une sixième année pour être finalement inscrite à l’ordre de la profession.

En attendant, elle ne chôme pas. Loin de là. Convaincue que l’avenir de l’architecture passe par une nécessaire prise en compte des enjeux et particularités territoriales, confirme Célia. "Après-guerre, nous avons développé énormément de béton. Un matériau incroyable qui a permis de reconstruire de manière très rapide et très efficace mais cette utilisation s’est malheureusement peu à peu standardisée. On retrouve aujourd’hui les mêmes immeubles à Marseille où j’exerce mais aussi en Inde, aux États-Unis… Ce qui pose problème car ces bâtiments ne s’adaptent pas assez aux climats. Sans parler des difficultés d’approvisionnement qui vont s’amplifier à l’avenir ou de la pollution engendrée."

Face à ces nouveaux défis, la profession s’arme peu à peu d’outils susceptibles de répondre aux problématiques de demain. À ce titre, l’écoconception, le réemploi ont vraisemblablement de l’avenir. "Revenir à des méthodes constructives plus écologiques est une nécessité, poursuit Célia qui en plus d’exercer dans un cabinet marseillais, se consacre à des chantiers participatifs. Elle vient aussi de faire tamponner son diplôme en écoconstruction délivré par l’organisme agréé de formation Le Gabion.

Un Pritzker "inspirant"

Spécialisé en restauration du patrimoine et en écoconstruction, Le Gabion œuvre depuis 1993 à la conservation du patrimoine et des savoir-faire, la promotion de l’écoconstruction, la recherche et l’expérimentation sur tous les projets visant à favoriser l’écologie dans le secteur du bâtiment. "Un must" commente l’archi qui comme d’autres de sa génération aime donner à la théorie, une application plus manuelle, charnelle presque.

"On est très nombreux à revenir à la réalité du chantier, à la réalité constructive. J’en connais qui travaillent en menuiserie, en ameublement, en maçonnerie. Je pense qu’on est très nombreux à se sentir un peu éloignés des réalités du terrain quand on est en école d’archi, très théorique finalement."

En reprenant la direction du chantier, tous retrouvent un peu du bon sens qui a été celui des ancêtres constructeurs menant "un travail pour la justice sociale, l’environnement et l’utilisation intelligente des matériaux."

Des termes repris par le comité Pritzker – qui en 2017 a récompensé le travail du cabinet RCR pour le musée Soulages à Rodez – à l’adresse du Burkinabé Diébédo Francis Kéré. Le lauréat 2022 dont l’attention s’est portée sur "la durabilité, tant en termes d’environnement que de communauté humaine". Pour le comité de la plus haute distinction du monde de l’architecture, "l’utilisation intelligente de matériaux locaux demeure la dernière solution pour s’adapter et répondre au climat naturel".

"J’espère changer le paradigme, pousser les gens à rêver et à prendre des risques. Ce n’est pas parce que vous êtes riche que vous devez gaspiller du matériel. Ce n’est pas parce qu’on est pauvre qu’on ne doit pas essayer de créer de la qualité", s’est félicité Keré. Un nouveau mantra pour la jeune architecte qui voit dans cette nomination, le début d’une nouvelle ère. "Il y a encore un nombre incalculable d’acteurs à convaincre de la nécessité de l’écoconstruction. Tant chez les clients, les assurances, les banques que chez les architectes eux-mêmes. Le travail qui reste à faire est vertigineux. Mais je suis plutôt optimiste, peut-être aussi un peu naïve, mais je sais qu’on va vers le mieux."

Cet article est réservé aux abonnés
Accédez immédiatement
à cet article à partir de
1€/mois
Aurélien Delbouis
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?