Aveyron : des galets faits maison pour essaimer l’année jacquaire

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  • Atelier de fabrication à Golinhac avec le graphiste Benoît Blein pour donner naissance à des pierres avec l’espoir d’essaimer de main en main pour un bout de chemin.
    Atelier de fabrication à Golinhac avec le graphiste Benoît Blein pour donner naissance à des pierres avec l’espoir d’essaimer de main en main pour un bout de chemin. CP - OC
  • Quelques exemples.
    Quelques exemples. CP - OC
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Olivier Courtil

À l’initiative de l’association « Sur les pas de Saint-Jacques », les habitants des villages traversés par le GR65 peignent des pierres pour les poser sur le chemin et en partager l’esprit.
 

Après deux années marquées par la perte de lien, l’association Sur les pas de St-Jacques, qui assure la promotion du GR65 du Puy-en-Velay à Livinhac-le-Haut (Haute-Loire, Lozère, Aveyron) a pris le taureau par les cornes en initiant un projet symbolique où la fraternité est à marquer d’une pierre blanche. Blanche et rouge aux couleurs de la Via Podiensis. « Il nous a semblé opportun de relancer une dynamique entre les habitants, accueillis et accueillants, membres de l’association », explique Marguerite Salles, membre de l’association qui pilote ce projet.
Pour ce faire, sept ateliers se sont tenus de Nasbinals à Livinhac, regroupant des habitants des trente et une communes, pour peindre des galets qui seront déposés sur le chemin en juin. « L’ambition est de créer une communauté d’échanges sur les réseaux sociaux qui permette de partager la vie du chemin et de former une chaîne en prenant un prétexte artistique symbolique fort, le galet », poursuit Marguerite Salles.

« Trouve mon galet Saint-Jacques »

Du narcisse de Nasbinals au château d’Estaing en passant par une bête sculptée à Espeyrac, chaque pierre est un totem portant au recto un motif et au verso un village traversé par le chemin avec l’indication « Trouve mon galet St-Jacques », pour suivre son aventure sur la page Facebook. Benoît Blein, graphiste installé à Rodez, accompagne les peintres en herbe pour donner chair à leur pierre.

« C’est une proposition artistique qui donne de la cohérence. Chaque commune a son image permettant aux habitants de se mobiliser et renforcer leur lien. C’est le principe des arts graphiques, on fait quelque chose d’universel avec un motif dans le temps et dans l’espace. On retrouve l’énergie tellurique », résume l’artiste qui a effectué le chemin à l’âge de 13 ans, et se souvient de son passage à Golinhac où il se trouve pour animer l’atelier. « J’avais pris un chocolat chaud dans un café au centre du village. Tu te souviens de tes pas. » Car le chemin marque à vie. Retrouver le lien, au sein des habitants, entre accueillis et habitants, tel est l’enjeu et le jeu façon petit Poucet sur le chemin.

« C’est itinérant, participatif, le caillou sur le chemin doit vivre sa vie », partage Alexandre Bénézet, maire de Golinhac, mettant aussi la main à la pierre. « C’est une vitrine pour la commune avec une vraie économie et une ouverture pour le village. On entend parler Espagnol, Anglais, cet échange est une ouverture sur le monde », ajoute-t-il.

Les petites mains des villageois du chemin s’affairent donc, avec envie. « On renseigne le marcheur, on lui remplit sa bouteille d’eau, c’est le partage, la sensibilité, on est fier du chemin », confie Régine. Le jacquaire prendra sa pierre avec un bout de vie d’ici pour se rendre là-bas. « J’espère qu’elles vont cheminer, c’est très symbolique. Ces pèlerins qui viennent nous touchent, il nous tarde de les voir, on s’ennuie sans eux », avoue Lucienne, mémoire vivante d’Estaing et femme de cœur comme tous les participants faisant leur pierre, chemin faisant. Du petit Poucet au petit Prince, c’est la fraternité qui se construit en passant le relais comme une chaîne d’union invisible, mais pas pour le cœur. « La pierre n’a point d’espoir d’être autre chose que pierre. Mais de collaborer, elle s’assemble et devient temple », a écrit Antoine de Saint-Exupéry. Quelque six cents pierres seront disséminées. Le plan est donné, reste à le mettre en pratique cet été.

Repères

  • 18 000 à 22 000 marcheurs empruntent chaque année le tronçon du Puy-en-Velay le Conques du chemin de Compostelle.
  • 31 communes sont affiliées à l’association « Sur les pas de Saint-Jacques » qui couvre 3 départements (Haute-Loire, Lozère, Aveyron).
  • 280 à 300 hébergeurs sont répertoriés sur le guide de l’association qui paraît tous les 2 ans dont cette année.
  • 60 jours, tel est le temps prévu pour relier Puy-en-Velay à Compostelle.
  • 1998, année où les chemins de St-Jacques de Compostelle ont été inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.
  • 71 édifices et 7 linéaires classés en France.
  • 2 linéaires de Nasbinals (Lozère) à Saint-Chély-d’Aubrac et de Saint-Côme-d’Olt à Estaing sont inscrits à l’Unesco.
  • 4 ponts (Saint-Chély-d’Aubrac, Espalion, Estaing, Conques) et 1 abbatiale (Conques) aussi inscrits.

 Pourquoi année jacquaire en 2022 ?

Une année est dite « jacquaire » lorsque le 25 juillet, la fête de Saint-Jacques tombe un dimanche. Cet événement rare se produit une douzaine de fois par siècle. La dernière fois, c’était l’an dernier. En raison de la situation sanitaire exceptionnelle, le pape François a décidé qu’elle serait prolongée jusqu’à fin 2022.
 

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