Scaleway, les datacenters qui consomment 40 % d’énergie en moins

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    Scaleway, les datacenters qui consomment 40 % d’énergie en moins
Publié le
BPI France

Au cœur des problématiques digitales et de cybersécurité, les datacenters sont aujourd’hui des infrastructures incontournables de nos sociétés. Cependant, leur fonctionnement pose d’importantes questions environnementales. Rencontre avec Albane Bruyas, la chief operating officer (COO) de Scaleway.

"Une recherche sur Google consomme autant qu’une ampoule allumée pendant une minute", explique Albane Bruyas, COO chez Scaleway, premier fournisseur de cloud alternatif, fondé en 1999 par Xavier Niel. En plus de cette activité, l'entreprise conçoit des datacenters en Europe dans lesquels sont hébergées les données du cloud. Face à la puissance des équipements informatiques, les gestionnaires des datacenters doivent s’adapter afin d’optimiser leur consommation d’énergie. Scaleway a développé une méthode de refroidissement de ses serveurs qui nécessite une consommation d’énergie beaucoup plus faible que la moyenne. Interview de Albane Bruyas.

Big média : A quoi sert un datacenter et qui y stocke ses données ?

Albane Bruyas : Un datacenter possède trois fonctions principales : apporter une structure physique autour des serveurs qui stockent les données, fournir l’électricité et la connexion nécessaires à leur fonctionnement et enfin, développer une méthode de refroidissement. En effet, un serveur qui fonctionne en continu chauffe énormément et doit être maintenu à une température entre 24 et 27°C pour éviter sa surchauffe. Les clients d’un datacenter ont des profils très variés. Chez Scaleway nous avons deux types de clients. Il peut s’agir de plateformes de jeux ou de gros sites Web comme Veepee, Se loger, Brut ou encore Dailymotion. Mais nous hébergeons aussi les données de développeurs et de startups qui débutent directement dans le cloud.

BM : Quels sont les enjeux autour des datacenters aujourd’hui ?

AB : Le premier reste la cybersécurité. Nous devons nous assurer d’être toujours au plus haut niveau de sécurité. Ensuite, le marché du cloud devrait se multiplier par 10 d’ici 2030, comme le coût de l’énergie en un an. L’optimisation de la consommation d’énergie devient alors une question centrale. Je pense que c’est une bonne chose car cela oblige les fournisseurs de cloud à trouver des alternatives pour réduire leur consommation. Enfin, il y a un réel enjeu de souveraineté autour des data centers. On l’observe en ce moment, avec la situation en Ukraine et Internet qui se referme en Russie, les flux de données évoluent massivement vers la Pologne. Le prochain défi du secteur de la tech française sera donc de devenir autonome sur ses infrastructures.

BM : Vous avez développé une méthode de refroidissement qui vous permet "d'économiser 40% d'énergie". Comment fonctionne-t-elle ?

AB : Les datacenters classiques fonctionnent en cycle fermé, ils refroidissent en permanence le même air avec des climatiseurs, qui consomment 40% de l’énergie de ces installations. Chez Scaleway, notre idée a été d’utiliser directement l’air extérieur pour refroidir les serveurs. Grâce à des milliers de capteurs, nous savons exactement lorsqu’il devient trop chaud et qu’il doit être refroidi. C'est le principe du free cooling. Iloptimise la consommation d’énergie en activant le refroidissement de l’air que lorsque c’est vraiment nécessaire. Ensuite, lorsqu’il fait plus de 30°C, nous faisons couler une infime part d’eau sur des murs spécifiques, ce qui refroidit instantanément l’air qui passe à travers, grâce à un principe nommé ‘adiabatique’.

BM : Et qu’est-ce que l’adiabatique ?

AB : Il s'agit d’une réaction thermique qui repose sur le principe de l'absorption de la chaleur de l'air par l'eau lors de l'évaporation. C’est ce qui fait qu’on a froid quand on sort d’une piscine par exemple. Cela nous permet d’utiliser 90 % d’eau en moins qu’un datacenter qui fait tourner un climatiseur en continu. Pour le moment, nous sommes les seuls à utiliser cette technologie en Europe, il y a donc une très grande marge de progression.

BM : Un cloud durable est-il compatible avec une croissance pérenne ?

AB : Le volume de données a augmenté de 650 % entre 2010 et 2019, or la consommation d’énergie est restée stable, ce qui montre une démarche responsable globale sur le marché. S’il continue de croître, on peut tout à fait l’absorber en améliorant la manière dont on consomme. Cela passe par ailleurs par la réutilisation de serveurs qui seraient autrement jetés - réduisant ainsi l’e-waste et l’impact carbone de la fabrication de nouvelles machines - mais aussi par des produits cloud plus efficaces, comme le Serverless, qui ne consomme de l’énergie que lorsqu’on utilise. La frugalité chez Scaleway est en effet une approche globale. En parallèle, il faut que les clients soient davantage sensibilisés et exigeants vis-à-vis de leur fournisseur de cloud pour les inciter à changer. Aujourd’hui, on regarde le bilan carbone des produits dans l’industrie, cela va aussi venir pour les services sur le Web. Quand il faudra le calculer pour les datacenters, ils s’amélioreront, en conservant leur croissance.

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