Rodez. Soignants manquants, délais… comment soigner les services d'urgences en Aveyron ?

  • Les urgences de l’hôpital de Rodez ont enregistré 26 778 passages en 2020.
    Les urgences de l’hôpital de Rodez ont enregistré 26 778 passages en 2020. José A. Torres
Publié le
Xavier Buisson

Coincés entre un manque de médecins amené à croître et des difficultés de recrutement liées à la pénibilité du quotidien, les services d’urgences sont bien malgré eux dans la tourmente et tentent de s’adapter, aidés en cela par l’Agence régionale de santé, qui travaille sur plusieurs pistes pour désengorger les salles d’attente… et soulager les personnels.

Rodez, Millau, Saint-Affrique, Decazeville et Villefranche-de-Rouergue : dans les cinq services d’urgences que compte l’Aveyron, l’activité augmente chaque semaine de 10 à 20 % par rapport à la même semaine de l’année précédente. Avec, à la clé, un allongement des délais qui génère de plus en plus fréquemment l’agressivité de patients… et le recours des hôpitaux à la police.

Le week-end dernier à Rodez, les usagers des urgences devaient patienter entre 4 et 6 heures, pour les situations non vitales s’entend. "Des personnes qui ne supportent pas l’attente qu’ils ont parfois générée eux-mêmes", explique un praticien, face à une situation qui est la somme de plusieurs facteurs.

"Un métier désocialisant et qui attire difficilement"

À commencer, comme l’explique Franck Becker, délégué Occitanie du syndicat Amuf (Association des médecins urgentistes de France) et médecin urgentiste à Rodez et Decazeville, par la pénibilité du quotidien aux urgences : "Le métier d’urgentiste est un métier désocialisant, usant, qui diminue notre espérance de vie et qui attire difficilement ", explique-t-il. La discipline figure ainsi dans les dernières choisies par les jeunes médecins.

"Il y en a très peu, c’est un problème majeur, à Millau notamment où il nous manque deux médecins urgentistes. Nous nous attendons à avoir des difficultés cet été", renchérit Sylvie Marty, directrice des hôpitaux de Millau et Saint-Affrique.

"Les urgences sont un goulot d’étranglement, le seul endroit où l’on ne refuse personne alors que plusieurs milliers de patients sont sans médecin généraliste actuellement dans l’Aveyron", reprend le syndicaliste.

C’est donc, pour les parties prenantes, en amont qu’il convient notamment d’agir, en jouant sur l’attractivité. Mais aussi, plus concrètement, en "rapprochant la médecine de ville de l’hôpital pour permettre que les services d’urgence bénéficient d’un coup de main des généralistes… ou généraliser les dispositifs comme la Maison médicale de garde de l’hôpital Rodez, qui prend en charge des cas qui ne relèvent pas de l’urgence mais nécessitent une prise en charge rapide."

"Retourner la situation"

Une idée partagée par l’Agence régionale de santé qui, "préoccupée par le manque de ressources humaines et la difficulté à remplir les tableaux de garde", a activé une cellule d’urgence, comme l’explique son représentant. "Beaucoup des actes qui sont faits par les services d’urgences relèveraient de la médecine générale. Il y a un report sur les urgences de patients qui n’ont pas eu de réponse médicale en journée. Les Maisons médicales de garde sont à généraliser, ainsi que les Centres de consultations non programmées", poursuit l’ARS. Ces structures sont à même de réaliser de "petits actes" comme des radios conventionnelles, des sutures, la pose de plâtres, et nécessitent peu de matériel en comparaison avec les services d’urgences. L’agence entend jouer sur un autre levier, basé sur la solidarité départementale, avec le lancement, attendu pour les prochains mois, du logiciel Hublot. Explication : "L’idée est d’essayer de trouver des remplaçants dont on n’aurait pas besoin à un moment donné, pour les envoyer d’un établissement à l’autre".

Le logiciel permettrait de partager les agendas, une "solution collaborative pour partager les plannings, s’appuyant sur ce qui a été fait lors de la gestion du Covid", explique l’Agence régionale de santé

"La loi de l’offre et de la demande"

Cette dernière espère que l’arrivée de Hublot permettra de mettre fin à une situation ubuesque : "On assiste à une forme de surenchère. Quand les tableaux de gardes ne sont pas remplis, c’est la loi de l’offre et de la demande et les établissements se mettent involontairement en concurrence, même d’un département à l’autre", explique le représentant de l’ARS.

Le logiciel formalisera et facilitera une pratique déjà en vigueur puisque, comme l’explique Sylvie Marty, "un médecin du Saint-Affricain est dernièrement venu dépanner l’hôpital de Millau".

Dernier point à même de favoriser l’installation de médecins ou de fidéliser les urgentistes déjà en poste : l’incitation financière. "Partout en France, il faut rendre les urgences attractives pour les jeunes médecins, qui sont à la recherche d’un confort de vie, mais aussi travailler sur la retraite et la prise en compte de la pénibilité", affirme Franck Becker pour l’Amuf.

Tout cela afin d’éviter que des situations observées dernièrement dans les services de Bordeaux, Orléans ou Sainte-Marie-d’Oléron, contraints à fermer ou fonctionner en mode dégradé, ne se produisent dans l’Aveyron, avec des conséquences potentielles sur la santé de tous.

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