Le lait bio bientôt moins cher que le lait ordinaire ?
L'explosion de l'offre de bio conjuguée à la baisse de la demande des consommateurs pousse le prix du lait traditionnel à la hausse ainsi qu'à la chute depuis plusieurs mois du cours de la filière bio.
Parmi les produits alimentaires qui subissent l'inflation, le lait traditionnel figure tout en haut de la liste. Poussé par la hausse des commodités et des coûts de production, cette denrée vient de dépasser la somme de 395 € les 1 000 litres, contre 327 à la fin de l'année 2021. La hausse est telle qu'elle pourrait faire passer le cours du lait traditionnel au-dessus de celui du bio.
D'autant plus que le bio voit de son côté son cours chuter depuis plusieurs mois. Il s'établit actuellement à 452 € les 1 000 litres. Les quatre principaux collecteurs (Biolait, Sodiaal, Agrial et Lactalis) appliquent depuis le début de l'année des tarifs en baisse de 5 à 15 euros les 1 000 litres par rapport à l'an dernier. Pour rappel, en 2021, l'écart entre le tarif du lait bio et du lait conventionnel était de 134 €, en faveur du lait bio.
Baisse de la consommation et augmentation de la production de lait bio
Ce croisement des courbes s'explique avant tout par une baisse de la consommation de lait liquide bio. « La crise que nous vivons est avant tout due à un tassement de la demande », confirme Eric Guihery, secrétaire national lait de la Fédération nationale de l'agriculture biologique (FNAB). Selon FranceAgriMer, sur la période 2019-2021, la consommation de l'ensemble des produits laitiers bio a reculé. Les fromages frais, les yaourts et le lait liquide, avec respectivement des reculs de 15,8%, 9,1% et 4,7%, sont les catégories qui paient le plus lourd tribut. « La demande reste encore élevée pour certains produits comme les fromages, mais leurs poids restent encore trop faibles pour compenser la baisse des autres catégories », observe Eric Guihery.
La situation est d'autant plus problématique qu'en parallèle, la production de lait bio ne cesse d'augmenter. « Les agriculteurs qui ont commencé leur conversion en 2018 arrivent seulement sur le marché », explique Jean-Marc Chaumet, directeur économie au Centre National Interprofessionnel de l'économie laitière (CNIEL). Toujours selon FranceAgriMer, sur les deux premiers mois de 2022, la collecte serait en hausse de 4,3%, après une année 2021 marquée par une augmentation de 10,6%, et une année 2020 là aussi en progression de 11,7%. « Les dernières conversions massives devraient arriver à l'automne 2022 », pointe Eric Guihery.
Face à ce déséquilibre, nombreux sont les opérateurs à devoir déclasser le lait bio pour le commercialiser en lait traditionnel. Conséquence : ils sont aussi de plus en plus nombreux à demander la suspension des conversions. Après Sodiaal et Lactalis, c'est Agrial, qui fin avril dernier, a suspendu les nouvelles transitions. Les mouvements de déconversions restent eux encore très marginaux. « À titre personnel, je n'ai connaissance que d'un éleveur dans ce cas », précise Eric Guihery. Bien qu'historique, ce croisement des cours devrait rester très temporaire. « Le lait bio est une production très saisonnière. Il y a, historiquement, une forte baisse des cours entre mars et juin », remet en contexte Jean-Marc Chaumet.
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