Le bœuf wagyu, de Kobé à Najac

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  • La passion des bœufs wagyuest portée par toute la famille,ici Émilie, Nina et Hugo.
    La passion des bœufs wagyuest portée par toute la famille,ici Émilie, Nina et Hugo. JPC
  • Émilie Lafon travaille son bœuf wagyu au piano de sa table najacoise "Tartines et compagnie". Émilie Lafon travaille son bœuf wagyu au piano de sa table najacoise "Tartines et compagnie".
    Émilie Lafon travaille son bœuf wagyu au piano de sa table najacoise "Tartines et compagnie". JPC
  • Nina heureuse au milieu du troupeau de wagyu et de limousines.
    Nina heureuse au milieu du troupeau de wagyu et de limousines. JPC
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Les luxuriantes prairies des confins du Rouergue craquent de bonheur avant cet été bucolique. Elles se situent presque à des années-lumière du Mont Fuji, "montagne sacrée" du Japon. Un peu comme Najac avec Kobé, autre ville mythique du "Pays du soleil levant." Quoique ! Grâce à la détermination d’Émilie et Fabrice Lafon, couple de jeunes éleveurs aveyronnais, le bœuf wagyu, élevé à Kobé, cohabite désormais avec le troupeau de limousines. Un challenge doublé d’une belle aventure.

Là-haut, à quelques encablures de la rivière Aveyron, sur les terres de la ferme de Testas, à Najac, un étrange ballet se dessine. Quelques cris d’appel en occitan et des bœufs wagyu à la robe noire, tranchant avec le roux des limousines, arrivent au grand galop. Les voir apparaître pourrait laisser penser que les marécages de Camargue se sont déportés un poil plus au nord ouest de l’Hexagone.

Mais il n’en est rien. Car en regardant de plus près, impossible de ne pas mesurer combien les deux races n’ont qu’un poil de couleur en commun.

"Un pari un peu fou"

Pour le reste, tout est parti de la volonté de Fabrice et Émilie Lafon de diversifier leur élevage. "J’avais envie de partir sur autre chose qui n’était pas courant chez nous", tranche Émilie. Un reportage télé et quelques rencontres plus loin avec les pionniers de cet élevage en France, le couple a jeté son dévolu sur le bœuf wagyu, appellation de la race qui donne le très haut de gamme bœuf de Kobé. Il a fallu mettre en place toute une organisation doublée d’un schéma d’élevage débutant par l’achat d’embryons, d’abord posés sur des limousines pures race. La réussite n’étant pas vraiment au rendez-vous, "c’est le risque lorsque tu travailles sur du vivant", les interrogations posèrent la suite.

Jusqu’à l’achat d’une génisse de pure race wagyu, puis deux, qui après les tâtonnements inhérents à la démarche porteront, enfin, leurs veaux. "Nous aurons deux autres naissances d’ici la fin de l’année", jubile Émilie consciente que leur démarche s’apparentait à un pari un peu fou. Au final, après beaucoup de temps passé et un lourd investissement, les premiers résultats sautent aux yeux de l’évidence.

"Une gentillesse incroyable"

Guapo, Fuki, Okydon Tokyo, Saka… Chaque animal porte haut son prénom. Comme un jeu pour Nina et Hugo, les enfants d’Émilie et Fabrice, qui en baptisent certains des prénoms sonnant pour le moins japonais. Dès qu’ils voient la petite famille, les bœufs élevés en plein air accourent du fin fond de leur parc pour se faire caresser. "Ils sont d’une gentillesse incroyable", sourit Émilie. Et d’ajouter : "Nous avons une femelle, c’est un chien, elle adore les caresses entre les oreilles…" Et ils auront encore du grain à moudre, car d’ici la fin de cette année, deux autres veaux de Kobé, qui naîtront sur la ferme, viendront rejoindre la grande famille. Apportant un peu de la force tranquille et de la sérénité du "Pays du soleil levant", là où le Mont Fuji surplombe les vastes terres…

"C’est l’excellence de la viande"

Intarissable sur ses bœufs wagyu, Émilie Lafon reste très lucide. "Nous savons que c’est un produit de niche, au tarif pouvant paraître excessif en raison de sa rareté et de son excellence." Si elle le compare à la truffe, elle met bien sûr en évidence le long travail qu’exige la démarche. Vrai bœuf castré entre deux et quatre mois, puis sevré à sept mois, le wagyu sera patiemment engraissé trois ans durant avec de la luzerne produite sur la ferme, puis avec un mélange composé de céréales et de lin.La viande, très persillée et tendre à souhait, se démarque de celle des autres viandes bovines. "Certes, la race veut ça, mais la nourriture fait le reste", défend-elle. Lorsqu’on goûte le wagyu pour la première fois, la découverte gustative éclate.Arrivé dans l’Hexagone il y a une quinzaine d’années, le wagyu (littéralement "vache du Japon"), à la chair délicate et goûteuse, dont la déclinaison la plus célèbre est le bœuf de Kobé qui n’est élevé qu’à Kobé et protégé désormais par une identification géographique protégée, s’est fait une petite place au soleil dans les pâtures françaises et s’invite aux plus grandes tables. De nombreux chefs sont tombés sous le charme des saveurs délicates de sa chair. C’est également dans cette optique que travaille Fabrice, plus côté élevage, et Émilie sur le plan commercial (pour la contacter appeler le 06 33 36 17 43). "Notre objectif est de proposer nos produits aux chefs du territoire", insiste-t-elle. Nicole Fagegaliter, cheffe étoilée de l’auberge du Vieux Pont à Belcastel, est en contact avec elle.Émilie Lafon a proposé cette viande à la carte de sa table najacoise, "Tartines et compagnie", où elle décline les produits issus de la ferme de Testas directement du producteur au consommateur.Mais il faut s’armer de patience, le dernier bœuf à avoir été commercialisé, c’était au printemps. Pour le prochain, il faudra attendre avril 2023.
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