Avec les DMA et DSA, l'Europe veut mettre fin à l'hégémonie des GAFAM

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    Avec les DMA et DSA, l'Europe veut mettre fin à l'hégémonie des GAFAM
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BPI France

L’entrée en vigueur des DMA et DSA, politiques européennes visant à encadrer les pratiques des géants du web, va-t-elle remettre en question la place des GAFAM au profit des entreprises européennes ? Explications. 

L’Europe œuvre pour ses pépites digitales. En 2020, la Commission européenne a proposé deux textes de lois : le Digital Market Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA) afin de réguler les marchés digitaux et favoriser la concurrence pour offrir d’avantage d’opportunités aux pépites européennes. Ces deux règlements, adoptés respectivement en mars et avril 2022, font écho à une directive européenne de l’année 2000 sur le commerce électronique, mais également au RGPD. Attention cependant, si ces textes sont adoptés ils ne sont pas applicables tout de suite. Il faudra attendre janvier 2023 pour l’application du DMA, qui limitera les pratiques anticoncurrentielles des GAFAM. Et janvier 2024 pour le DSA, qui s’attaquera lui aux contenus haineux et illicites en ligne. Ludovic de la Monneraye, avocat en droit du numérique au sein du cabinet Vaughan Avocats, revient sur ces réformes.

Big média : Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste le DMA ?

Ludovic de la Monneraye : Le Digital Market Act cherche à freiner la supériorité numérique des grandes plateformes. Elle vise les géants américains Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft (GAFAM), sans oublier Twitter et Tiktok. Ces plateformes sont tellement puissantes que l’Europe n’a pas d’autre choix que d’intervenir pour stimuler la concurrence et pousser ses pépites à se développer. Elles doivent également partager leurs algorithmes pour que des experts s’assurent qu’elles ne mettent pas en avant leurs propres produits. Google a déjà été sanctionné pour l’avoir fait avec ses comparateurs de prix.

Si les GAFAM ne respectent pas cette ouverture, ils se verront attribuer une amende à hauteur de 10% du chiffre d’affaires global de la société. Pour Apple, cela pourrait représenter une sanction de 36 milliards de dollars. La Commission se réserve également le droit d’interdire, sur le territoire européen, les services d’une entreprise ne respectant pas ces engagements.

BM : Que représente l’interopérabilité instaurée par ce texte de loi ?

LM : La Commission européenne est chargée d’imposer l’interopérabilité. Vous aurez donc la possibilité d’installer votre propre navigateur ou bibliothèque d’application sur un téléphone ou un ordinateur. Il sera possible, par exemple, d’installer des applications Android sur un iPhone. L’objectif est de donner davantage d’opportunités aux entreprises européennes. Prenons un cas de figure concret : si une startup française développe un moteur de recherche plus durable, celui-ci bénéficiera de la même visibilité que Chrome ou Safari.

Cette interopérabilité s’appliquera également entre les différents services de messagerie qui auront la possibilité de fonctionner ensemble. On pourra envoyer un message de WhatsApp vers Messenger ou de iMessage vers Instagram. Pour ce faire, les plateformes délivreront des API (application programming interfaces), une solution informatique permettant à des applications de communiquer entre elles et d’échanger mutuellement des données.

BM : Quelle différence avec le DSA ?

LM : Le Digital Services Act se concentre lui sur le contenu partagé sur les plateformes et impose un devoir de responsabilité sur la propagation de messages haineux ou illicites. Le but de ce texte est d’inciter à la création d’équipes de modération de contenu au sein des GAFAM, afin de trier, identifier et supprimer ces propos. Des boutons de signalement existent déjà pour les utilisateurs, mais cette réforme vise à ce que les plateformes fassent le ménage au préalable.

Les sanctions encourues : 6% du CA annuel mondial et un accès bloqué pour les utilisateurs européens. Si les sanctions relatives au DSA ne seront applicables que pour les GAFA, toutes les plateformes devront se conformer à ces règles.

BM : Face à la puissance de ces acteurs américains, pensez-vous que l’Europe parviendra à imposer ses directives ?

LM : La politique RGPD est en place depuis 4 ans et les résultats sont probants. On recense beaucoup de contrôles, d’amendes et la présence de bandeaux cookies sur tous les sites web. Je suis persuadé que l’interopérabilité et les modérations de contenu vont devenir incontournables dans les années à venir.

Ces deux directives ont été adoptées dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne. Les 21 et 22 juin 2022, l'Assemblée numérique européenne a marqué la fin de cette présidence française. Cette assemblée a été consacrée aux objectifs numériques européens pour 2030 que constituent la transition écologique numérique et les compétences européennes, en termes de technologies immersives notamment.

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