Aveyron : entre déception et colère, les réactions après l'abandon du projet de reprise du site Sam

  • Le projet de reprise du site Sam à Viviez-Decazeville est abandonné.
    Le projet de reprise du site Sam à Viviez-Decazeville est abandonné. DDM - BHSP
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Bernard-Hugues Saint-Paul

Les réactions se succèdent dans le Bassin decazevillois suite à l’annonce lundi 18 juillet que le groupe industriel lotois MH Industries stoppait son projet de reprise du site SAM.

« On est abandonnés », résumait hier dans nos colonnes François Marty, maire de Decazeville et président de Decazeville communauté. Les réactions oscillent entre colère, déception et écœurement.
 

Jean-Louis Denoit (maire de Viviez) : « Je suis désabusé et écœuré. C’est un projet auquel on croyait ; un projet solide et construit et qui s’est avéré foireux essentiellement du fait du refus de Renault de faire l’effort nécessaire durant quelque temps pour maintenir une poignée de salariés sur les marchés Renault. Et derrière un Etat qui n’a pas poussé à la roue pour que les financements puissent suivre et que Renault s’engage durant quatre ans. Ce n’était pas le bout du monde pour une poignée de marchés. Je suis désabusé et écœuré. J’ai une pensée forte pour les salariés qui comptait pouvoir revenir travailler. Cela fait mal. C’est dramatique car il y avait une bonne piste ».
 

Pascal Mazet (conseiller régional PCF) : « Je suis déçu et en colère ! L’état et Renault sont des tueurs d’emplois français. Le renoncement de MH Industrie a la reprise de la fonderie SAM, est du seul fait que l’état Francais ne s’engage pas, et que Renault ne veut pas lui donner un chiffre d’affaires. Ils ont tout simplement décidé de fermer toutes les fonderies françaises. Une erreur stratégique incroyable en pleine crise ukrainienne ! La Région est seule à s’engager ! La Région va acquérir le site de la SAM, c’est l’engagement fort pour avoir une possible reprise par une entreprise afin de retrouver des emplois dans le Bassin. Nous allons étudier toutes les possibilités ! En tant que conseiller régional comme la présidente Carole Delga, je ne lâche rien, le combat pour une autre solution est ma priorité ».
 

Stéphane Bérard (conseiller régional PS) : « La présidente de Région Carole Delga avait pris des engagements suivis d’actes pour retrouver une activité de fonderie sur le Bassin et pour la réindustrialisation du territoire avec de l’innovation, notamment dans les locaux de la SAM. La Région poursuit l’acquisition des locaux de la SAM, pour être prête pour un autre repreneur ou si MH Industrie revenait vers nous pour compléter cette réflexion. Je suis déçu et très en colère vis-à-vis de l’Etat et de Renault, mais pas abattu. Il ne faut pas s’éloigner de la fonderie ; mais réindustrialiser le territoire et permettre au site SAM de retrouver une activité ».
 

Bruno Leleu (conseiller régional RN)  : « Comme nous l’avions déjà pressenti, et malheureusement prévu, la SAM fermera définitivement, après plus d’un an de faux espoirs et de déceptions successives. La défection par le groupe lotois MH industries de sa promesse de reprise du site semble être l’acte final de la malheureuse aventure de la société industrielle aveyronnaise, après les promesses pleines de bonnes intentions de Carole Delga lors de la dernière campagne électorale et l’abandon de l’Etat, pourtant actionnaire du principal donneur d’ordres, à savoir le groupe Renault. La stratégie de la société automobile française ressemble fortement à un gâchis industriel opéré sur notre territoire, et semble provoquer une certaine résignation chez nos « décideurs politiques » qui continuent à laisser pourrir et désindustrialiser nos territoires. Résultats : 333 emplois perdus, 1,2 million d’euros investis par le conseil régional en pure perte et un tissu économique local moribond. Pourtant, il n’est que temps de réindustrialiser la France, d’arrêter la casse économique et sociale – opérée notamment dans nos territoires périphériques et ruraux – mais aussi de préserver nos emplois. Cela devrait être le rôle de l’Etat ».

« Le gouvernement et Renault portent la responsabilité de cet échec »

Pour les ex-représentants CGT des salariés de SAM (Sébastien Lallier, David et Ghislaine Gistau) «Malgré l’investissement de MH Industries, de la Région et de la communauté de communes, Renault et l’Etat n’ont pas eu la volonté de soutenir ce projet. Comme vous le saviez tous, pour amorcer son projet MH Industries avait besoin du soutien de Renault en termes de chiffres d’affaires (8 millions d’euros) pour les trois ans à venir, le temps nécessaire pour travailler à démarcher d’autres clients".

"Malheureusement, force est de constater, que deux projets crédibles portés par des industriels français auraient pu voir le jour sur le site de la SAM, mais à deux reprises ils ont été rejetés par Renault avec la complicité et la passivité de l’Etat.

Pour celui porté par la société ALTY, (reprise de 250 salariés, maintien du bureau d’étude et des services supports….) il a été invoqué des raisons de conflits de personnes, concernant celui de MH Industries, alors que les premiers échanges laissaient entendre de la part de Renault, que le projet était sérieux, au final le constructeur français n’a pas apporté son soutien à ce projet d’avenir et l’état et le gouvernement ont laissé faire.

Nous sommes révoltés, consternés, scandalisés par cette annonce mais pas surpris, puisque Renault poursuit sa stratégie de fermeture et de vente de toutes les fonderies françaises, entraînant ainsi la disparition de toute une filière, pourtant essentielle à la souveraineté industrielle de la France. (Pour rappel : En 2021, fermeture de MBF à St Claude dans le jura, de FVM à Villers-la-Montagne en Meurthe-et-Moselle, des Fonderies du Poitou (Fonte et Alu à Ingrandes dans la Vienne) et dernièrement vente par Renault pour l’euro symbolique de la Fonderie de Bretagne à un fonds d’investissement Allemand. La Région va faire malgré tout l’acquisition des bâtiments fin juillet et continuer à tout mettre en œuvre pour réindustrialiser le site de la SAM. Il est évident que cela sera bien plus long que si le projet de MH Industries avait abouti. Nous devons rester fiers du combat que nous avons mené tous ensemble pour donner un avenir industriel au site de la SAM et plus largement au bassin de Decazeville. Ceux qui portent la responsabilité de cet échec, de la désindustrialisation du pays, c’est le gouvernement et Renault".

Le député Laurent Alexandre interpelle le ministre de l’Industrie

Ce mardi 19 juillet, lors des questions orales au gouvernement à l’Assemblée nationale, le député Nupes de la 2e circonscription de l’Aveyron, l’Aubinois Laurent Alexandre a interpellé le ministre de l’Industrie Roland Lescure : « Quel est l’avenir des fonderies en France? MFB dans le Jura, Fonderie du Poitou, Fonderie de Bretagne et maintenant la SAM en Aveyron: fermetures de sites, licenciements, délocalisations. Pourtant, la fonderie est un maillon indispensable de la souveraineté industrielle du pays et pour la bifurcation écologique. Pourquoi abandonner la SAM qui est la seule fonderie en France à posséder un bureau d’études ? Cette usine travaillait principalement avec Renault, pour des moteurs hybrides et électriques qui sont vantés comme l’avenir. Cette situation est inacceptable. Elle résulte du choix de Renault de délocaliser cette activité en Espagne et en Roumanie. Elle résulte du choix politique du gouvernement d’accepter cette délocalisation. L’État est en effet actionnaire de Renault. Cette décision a entraîné le licenciement de 333 salariés dans un territoire, le bassin minier de Decazeville, déjà meurtri par le déclin industriel et la fermeture de sa maternité et plusieurs centaines ailleurs. Nous avons appris lundi que le projet de reprise de l’activité de la SAM porté par un industriel français et soutenu par les collectivités locales a été retiré. Pourquoi ? Parce que l’Etat et Renault refusent de s’y engager. C’est un abandon lâche et cruel des populations concernées, des salariés mais aussi des intérêts économiques du pays. Comment pouvez-vous parler de réindustrialisation de la France et laisser délocaliser toutes les fonderies? La stratégie du gouvernement et de Renault est-elle qu’il n’y ait plus une seule fonderie en France? Vous engagez-vous à intervenir auprès de Renault pour assurer des commandes pour permettre la reprise de la SAM ?».

Le ministre a mis en avant l’accompagnement des salariés; l’étude sur la redynamisation industrielle du Bassin, l’action de Territoires d’Industrie et France Relance. Il affirmait que l’Etat avait accompagné le repreneur en finançant son PGE et en participant au financement de l’étude de faisabilité du projet. Il reconnaissait le manque de commandes suffisantes de Renault; mais a avancé la conjoncture internationale et la hausse du coût de l’énergie, pour expliquer l’abandon du projet de reprise.

Jean-Claude Anglars (sénateur) réagit pour sa part : « L’Etat a décidé de sacrifier la fonderie aveyronnaise. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’Etat refuse de lui donner une chance. MH Industries renonce à déposer une offre de reprise de l’usine de l’ex-SAM, faute d’engagement de Renault et de sécurisation de financement. Je tiens à exprimer mon soutien aux salariés de la métallurgie et leurs familles, aux habitants et aux élus du territoire qui subissent une nouvelle fois l’abandon alors qu’ils ne cessent de se battre pour le projet industriel du bassin de Decazeville. C’est tout un bassin d’emploi qui souffre, c’est le département de l’Aveyron qui est fragilisé et c’est l’avenir des territoires ruraux qui est en question. L’État porte une responsabilité indéniable dans les échecs successifs des projets de reprise du site de l’ex-SAM. Le renoncement de l’Etat, programmé depuis des mois, interroge. Ce mercredi 20 juillet, au Sénat, lors de la séance de questions d’actualité, je saisirai le ministre de l’Industrie : le gouvernement doit s’expliquer. »

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Les commentaires (1)
Anonyme13114 Il y a 1 année Le 19/07/2022 à 22:31

Le principal responsable est la CGT qui a torpillé l'offre de CIE AUTOMOTIVE.