Canicule : le méga feu en Gironde pose la question des moyens octroyés à la Sécurité civile
Alors que la base de Nîmes-Garons abrite depuis 2017 la quasi-totalité de la flotte de lutte nationale, des interrogations se font jour sur les moyens humains, l’entretien, la disponibilité des avions…
Le feu n’est pas encore circonscrit en Gironde que des débats sur la question des moyens sont engagés. L’essentiel de la flotte aérienne de la Sécurité civile française est basé à Nîmes-Garons, depuis son transfert de Marignane en 2017. Elle compte aujourd’hui 12 Canadair, 6 Dash et 3 Beechcraft de reconnaissance. Un 7e Dash est arrivé début juillet. Il circulera début août. Un 8e est attendu début 2023.
Suffisant ? En 2019, un rapport d’information du Sénat sur la lutte contre les feux de forêt estimait que cette flotte était "adaptée aux opérations de lutte". Mais aussi qu’elle était "vieillissante".
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Trois ans après, le constat est renforcé par une actualité brûlante. Si les Dash sont récents, l’âge moyen de nos Canadair oscille entre 20 et 25 ans et le vétéran en a 30. L’ancienneté des appareils, conjuguée à la cadence des largages (plus de 2 000 ces 14 derniers jours !), nécessite une maintenance régulière qui immobilise une partie de la flotte.
En Gironde, des voix se sont élevées pour s’étonner que seuls deux Canadair aient largué les premiers jours. "La critique est aisée après. Désormais, ce sont 6 Canadair et 3 Dash qui sont engagés tous les jours. Aller au-delà serait une bêtise, explique Christophe Govillot, porte-parole du Syndicat national du personnel navigant de l’aéronautique civile (SNPNAC). C’est sans doute difficile à comprendre de La Teste mais des avions doivent rester disponibles pour d’autres feux. Heureusement que l’on avait gardé des moyens à Nîmes car des catastrophes auraient pu arriver ailleurs !"
De justes répartitions
"Ces appareils à disposition ont aussi permis d’éviter que des feux ne dégénèrent dans l’Aude, l’Hérault, le Vaucluse et les Bouches-du-Rhône", renchérit le commandant Alexandre Joissard, porte-parole de la Sécurité civile.
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Davantage que le nombre d’appareils mis à disposition, ce sont ceux non mobilisables à l’instant T qui font débat. "Des pannes récurrentes ne sont pas forcément réparées par notre fournisseur de pièces détachées, s’agace Christophe Govillot. Il y a un contrat de maintenance avec des objectifs. Et pour le moment, il n’est pas respecté."
Du côté de la Sécurité civile, qui écarte l’idée de reproduire la base de Nîmes dans d’autres zones à risque pour des questions pratiques et de maintenance, on préfère "un appareil cloué au sol une demi-journée de plus que de mettre en danger la vie des pilotes".
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La solution à ce problème porte peut-être un nom : le DHC-515, des Canadair nouvelle génération. Au regard des nouvelles exigences imposées par le réchauffement climatique, l’Europe se serait positionnée pour en acquérir douze. Leur livraison, possible dès 2026-2027, permettrait d’intervenir sur tous les points chauds, sous commandement européen, renforçant ainsi rescUE, nouveau dispositif de ressources pour gérer les nouveaux risques et protéger les populations des catastrophes. Christophe Govillot prévient : "La France doit elle aussi se positionner sur ces appareils pour remplacer sa flotte vieillissante."
Conflit social déminé
En attendant, d’autres débats agitent la sphère de la Sécurité civile, notamment le nombre de commandants de bord. "On est 15. Il faudrait être 22 à 24", assure Christophe Govillot.
Le porte-parole du SNPNAC se consolera avec les avancées obtenues début juillet sur l’indemnisation des pilotes instructeurs, les formations et la reconnaissance du métier à risque, après un bras de fer et une menace de grève. Évitant un mouvement social au cœur d’un été de tous les dangers : déjà 27 000 hectares brûlés en 2022, soit davantage que toute l’année 2021 !
Rêves européens à Nîmes-Garons
C’est une ambition des premiers jours qui prend forme peu à peu : Nîmes-Garons, dans le Gard, n’est pas très loin de devenir un centre européen d’expertise pour la protection civile. Nîmes Métropole, qui a obtenu un financement européen de 500 000 €, évoque une perspective opérationnelle en 2023. Concrètement, le site pourrait accueillir des programmes de formation partagés et servir de centre d’entraînement pour les pilotes, de simulations de vols…
"Cela permettrait que tous les pays bénéficient des mêmes protocoles de formation et d’information", explique Franck Proust. Le président de Nîmes Métropole, qui nourrit de grandes ambitions européennes pour le site, évoque, à terme, "la fabrication de hangars destinés à accueillir des entreprises d’assemblage, d’innovation et de recherche". Il l’assure : "La marge de progression est énorme en matière de sécurité civile. La crise que nous vivons peut être un atout majeur pour notre territoire."
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