La Palme d'Or à l'humour "Sans Filtre" arrive en salles

  • Palme d'Or à Cannes, "Sans filtre" arrive mercredi en salles.
    Palme d'Or à Cannes, "Sans filtre" arrive mercredi en salles. Courtesy of Plattform-Produktion
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ETX Daily Up

(AFP) - "Sans Filtre", satire des ultra-riches et des rapports de classe dans les sociétés occidentales, à l'humour aussi marxiste que corrosif, arrive mercredi en salles après avoir décroché la Palme d'Or à Cannes.

Croisement de "Titanic" et "La Grande Bouffe", le film a permis au Suédois Ruben Östlund d'entrer dans le club restreint des cinéastes double palmés à Cannes, aux côtés des frères Dardenne, Ken Loach ou Michael Haneke. Il avait déjà obtenu le titre en 2017 pour "The Square", attaque en règle contre la vanité qui peut entourer l'art contemporain.

Il embarque cette fois ses spectateurs pour 02h30 d'une croisière de luxe déjantée aux côtés d'un mannequin, Carl, et de sa petite amie, Yaya, top model et influenceuse, obsédée par son image et sa carrière.

La sortie du film a été percutée par la mort soudaine, à seulement 32 ans, fin août, de l'actrice sud-africaine qui interprète ce personnage principal, Charlbi Dean.

Pour son ultime rôle, elle côtoie à bord du yacht de "Sans Filtre" une galerie de richissimes personnages: oligarques russes alcooliques, charmant couple de retraités britanniques ayant fait fortune dans la vente de mines antipersonnel et autres odieux passagers... Ils harcèlent la cheffe de l'équipage de leurs caprices, tandis que cette dernière martyrise à son tour le petit personnel.

Mais une grosse tempête - dont ne se soucie guère le capitaine du bateau, un marxiste totalement ivre au moment crucial - va faire tanguer le navire et faire chavirer cet équilibre.

- "Garder sa contenance" -

Dans une sorte de "Titanic" inversé, où cette fois les plus faibles ne sont pas forcément les perdants, Ruben Östlund, 48 ans, décortique les ressorts de classe de fond en comble: les riches contre les pauvres, mais aussi les hommes contre les femmes, et les Blancs contre les Noirs.

Une préoccupation au centre de son oeuvre, a expliqué le réalisateur à l'AFP à Cannes. "Je pense que les humains sont très sensibles aux hiérarchies, nous sommes conditionnés pour le grand +jeu social+ dès notre naissance", assure-t-il, "chaque jour la question c'est +quelle est ma position dans la hiérarchie sociale?+".

Elevé par une mère communiste dans les années 70-80 quand "c'était vraiment un bloc contre un autre", le Suédois se dit "socialiste": "je crois en un état fort et une économie mixte".

Le personnage de Carl, auquel Östlund s'est "beaucoup identifié", ne cesse de rechercher "l'égalité" dans ses rapports, y compris avec sa compagne, plus célèbre et mieux payée que lui.

Avec lui comme avec d'autres protagonistes du film, Östlund excelle, comme dans "Snow Therapy" ou "The Square", à disséquer les petites lâchetés qui s’accommodent toujours mieux des convenances que de la vérité.

Une scène de mal de mer généralisé, scatologique à souhait, mettra à l'épreuve même les estomacs les plus blindés: "dans la scène où tout le monde vomit, c'est ce qui se joue: chacun essaie de garder sa contenance, de tenir sa fourchette", explique Ruben Östlund.

Harris Dickinson, qui joue Carl, renchérit: "c'est très provocateur, bien sûr, c'est politique mais au-delà de ça Ruben dans son scénario pousse à bout nos comportements, notre morale, notre sens de la bienséance".

Même le personnage de Yaya, résignée à devenir une "femme-trophée", "peut paraître superficiel, mais en fait je pense qu'elle a peur de son avenir, dans une industrie où vous avez une très courte carrière", avait assuré à l'AFP Charlbi Dean, à Cannes.

Volontiers caricatural et outrancier, Ruben Östlund prend bien soin d'égratigner aussi les faibles, aussi méchants et médiocres que les puissants. Et prompts à abuser à leur tour du pouvoir dès qu'ils l'obtiennent.

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