À la tête de l’Alouette à Paris, le Decazevillois Christopher Austrui vole de ses propres ailes

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  • L’équipe de L’Alouette.  Une bande de copains  visiblement heureux de travailler  ensemble.
    L’équipe de L’Alouette. Une bande de copains visiblement heureux de travailler ensemble. L'Aveyronnais - Emmanuel Pons
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A Paris, Emmanuel Pons

Arrivé à Paris presque par hasard, il aurait pu s’installer à Taïwan mais le sort a voulu que Christopher Austrui, originaire du Bassin, se fasse sa place dans la capitale. Où il est, avec son associé Nicolas Boutigny, à la tête de L’Alouette et depuis peu de La Cantine La Planque.

Christopher Austrui est un type résolument sympathique. Généreux et accueillant, à l’image de son restaurant L’Alouette, bel établissement installé dans le XIIIe arrondissement de Paris. L’enfant du Bassin – son père est de Decazeville et sa mère de Livinhac-le-Haut mais né dans la Loire en 1986 alors que son père travaillait dans les assurances – a été à l’école à Decazeville, au collège Ramadier puis au lycée d’Aubin avant de décrocher son bac pro électricité au Greta de Rodez. À 18 ans, tout juste diplômé et des fourmis dans les jambes, il passe son permis. "Ensuite, j’ai acheté la 306 de mon copain Julien. Il me l’a vendue 4 000 €. J’ai dû emprunter 3 000 € à la banque. Mais 15 jours après, je l’ai plantée !", sourit-il. Plus de voiture, un crédit à rembourser…

À Paris pour se "refaire"

"Alors je suis monté à Paris. On m’avait dit qu’il y avait moyen de gagner de l’argent rapidement dans les cafés si on travaillait dur." Le jeune homme débarque donc à la capitale, valise à la main, bien décidé à se refaire. "J’ai été pris au Père Tranquille où j’ai bossé 6 jours sur 7 et 12 heures par jour, raconte-t-il. En un mois, j’ai pu rembourser la banque !" Retour en Aveyron pour un petit mois de repos avant de remonter à Paris où son frère aîné Ronald tient déjà le restaurant… L’Alouette. "J’étais logé au 5e étage juste au-dessus. Les copains de mon frère voulaient tous me prendre chez eux. J’ai fini au Gambetta dans le XXe. J’y ai passé 2 ans et c’est là que j’ai rencontré Nicolas Boutigny qui est mon associé actuel", se souvient l’Aveyronnais qui avait alors 20 ans.

C’est aussi à cette période qu’il rencontre Jill Lin, une jeune Taïwanaise. "J’étais très amoureux mais je ne parlais pas un mot d’anglais", précise-t-il. Et encore moins le chinois. "Elle me dit : "Viens me rejoindre à Taïwan". Et oh surprise !, je découvre, une fois sur place, qu’elle est mariée et qu’elle a deux enfants !", raconte-t-il sans se départir de son sourire. "Mais je te l’avais dit !", lui assure alors la jeune femme.

Le sourire et la bonne humeur  communicative de Christopher Austrui,  à l’image de son restaurant :  chaleureux et agréable.
Le sourire et la bonne humeur communicative de Christopher Austrui, à l’image de son restaurant : chaleureux et agréable. L'Aveyronnais - Emmanuel Pons

Qu’à cela ne tienne : le jeune homme décide de rester avec son amoureuse. "Les deux premières semaines, on les a passées à Taïpei, la capitale. Puis on a passé une semaine à Kaohsiung (2e ville du pays, NDLR). C’était génial, tout le monde m’acceptait, voulait me parler." Après trois semaines, Christopher rentre en France. "Je suis arrivé à Paris à 6 heures du matin et je bossais à 8 heures, au Gambetta. J’étais déprimé, se rappelle-t-il. Jérôme, mon manager, me dit : "Tu y retournes ! Tu n’as rien à perdre ! Du travail, il y en aura toujours à Paris"."

Professeur d’anglais à Taïwan

Et voilà notre Aveyronnais reparti pour Taïwan. Cette fois-ci avec un visa étudiant. Il prend des cours de langues trois heures par jour cinq jours sur sept. "L’anglais est venu très vite et le chinois aussi", dit-il. Et pour gagner un peu d’argent, il donne même des cours d’anglais (!) au bout de deux mois : "Quand ils m’ont demandé ma formation, j’ai présenté mon diplôme de natation des Dauphins de Decazeville", rigole-t-il "J’ai enseigné dans au Bushiban, c’est l’école après l’école pour les enfants de 4 à 16 ans. Au début, j’avais une classe de vingt gamins de 4 ans. J’ai vraiment galéré ! Ensuite, je suis allé dans une autre école où on faisait plus de jeux pour apprendre. Tout le monde pensait que mon anglais était parfait, s’amuse-t-il. Ça a été une sacrée expérience !" "A la fin, j’avais même sept ou huit classes, j’étais payé l’équivalent de 20 € de l’heure ; pour là-bas, c’est énorme !" École le matin, cours au Bushiban l’après-midi et fête le soir : telle est alors la journée type du jeune expatrié.

Après une année, son ami (et futur associé) Nicolas Boutigny débarque à Taïwan pour trois semaines de vacances. "On loue un camion pour faire le tour de l’île. Je voulais lui montrer le côté super cool de Taïwan", se souvient-il. Les deux compères rentrent enfin à Paris avec la ferme intention de travailler le temps de mettre de l’argent de côté et de vite retourner à Taïwan pour y ouvrir un restaurant. Ils retrouvent donc l’île et leurs amours où ils font beaucoup la fête et dépensent une grosse partie de leurs économies. C’est la fin de l’expérience taïwanaise. Christopher Austrui a 22 ans et toute la vie devant lui.

Première gérance à Paris

"À ce moment-là, je bosse pour Jean-François Sanhes – un autre Aveyronnais – à L’Églantine à Nation et Nicolas au Prosper, dans le même quartier, pendant une année. Puis au Royal Opéra dans le quartier de l’Opéra et lui à Madeleine." Tout s’enchaîne alors pour le jeune homme. "Au Royal Opéra, j’ai commencé comme garçon, ça m’a mis le pied à l’étrier. Au bout de trois ans, j’étais directeur. Puis, j’ai pris ma première gérance, avec Nicolas, au Balto, quartier Saint-Germain dans le VIe. J’avais 25-26 ans", se souvient-il. "C’était bien, pour commencer, car c’est une petite affaire avec 20-25 couverts. On s’est fait la main." Mais les associés apprennent vite et visent plus grand. Et prennent donc la gérance de L’Alouette – 90 couverts plus 70 en terrasse – le 1er janvier 2015. "On a une clientèle très familiale ici, décrit Christopher. Beaucoup de gens du quartier, des habitués et aussi pas mal de touristes étrangers qui logent au Marriott", un hôtel d’un millier de chambres, l’un des plus gros de Paris. Des clients auxquels sont proposés notamment des produits aveyronnais tels que le cochon de la Maison Mas, le veau de Régis Garric à La Salvetat-Peyralès… Servis par un personnel agréable et efficace dans un cadre accueillant où tout rappelle l’Aveyron : les casiers à bouteilles d’Espalion, le panneau de signalisation indiquant Decazeville…

Une équipe fidèle depuis des années, toujours sur le pont et bichonné par Christopher Austrui : "Tu es dans la restauration mais tu as le droit d’avoir du temps pour toi", insiste-t-il. Une philosophie à l’image de ce jeune entrepreneur aveyronnais, et qui doit beaucoup à son parcours dans le métier. Travailler dur, certes mais aussi profiter de la vie, avec sa compagne Chloé Rino, une jeune avocate francilienne – rencontrée en 2019… à L’Alouette – et leur fils Martin âgé de 14 mois.

Retour au pays ?

"Quand j’ai rencontré ma compagne il y a trois ans, je lui ai dit : "Dans 10 ans, on rentre en Aveyron". Il en reste sept", sourit-il qui fête ce 31 octobre ses 36 ans. "Idéalement, j’aimerais avoir une ou deux affaires que je laisserais en gérance à Paris et on viendrait s’installer à Livinhac."

Alors peut-être aurons-nous la chance, dans quelques années, de découvrir une nouvelle adresse où bien manger dans le Bassin ? Avec Christopher Austrui aux manettes…

L’Alouette, 18, rue du Champs de l’Alouette 75013 Paris – Téléphone : 01 43 36 32 48

La Cantine La Planque est située 6, place Félix-Eboué dans le XIIe arrondissement.
La Cantine La Planque est située 6, place Félix-Eboué dans le XIIe arrondissement. L'Aveyronnais - Emmanuel Pons

La Cantine La Planque, une affaire montée pendant le confinement

"C’est la seule affaire que le Covid a sauvée", plaisante Christopher Austrui. La Cantine La Planque, du nom du lieu-dit à Livinhac où habite sa grand-mère, située 6, place Félix-Eboué dans le XIIe arrondissement – "un endroit magique" – a été rachetée avec son associé Nicolas Boutigny en octobre 2019, soit quelques mois avant le premier confinement. "C’était moche, avec une clientèle de marginaux, se souvient Christopher. Au début, on voulait le prendre comme il était et faire des travaux plus tard."

Mais en mars 2020, la France est confinée et les restaurants ferment leurs portes. Pas le meilleur timing pour lancer une affaire. "Au bout de deux semaines, j’en peux plus. Je prends une masse et j’explose tout le café ! Je téléphone mon associé. Il me crie : "T’es taré !" Au bout de deux jours, je le rappelle : "Allez, on se remotive" On a acheté tout ce qu’il fallait et on s’est lancé dans les travaux."

Un copain architecte propose alors ses services, d’autres viennent donner un coup de main, dont John qui a pris ensuite la direction et Gabriel qui est le responsable. La Cantine La Planque est depuis devenue un bistrot coquet avec ses 40 places plus 80 (l’été) ou 20 places (l’hiver) en terrasse.

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