Education nationale : la mixité sociale en question dans les écoles et collèges aveyronnais
Les indices de position sociale des collèges (IPS), que l’Education nationale a été contrainte de rendre publics, confirment que le privé concentre les élèves les plus favorisés. L’Aveyron n’échappe pas à la règle.
Que se cache-t-il derrière l’IPS, l’indice de position sociale, brandit aujourd’hui par les syndicats d’enseignants pour dénoncer la ségrégation sociale qui règne dans certains établissements ? Cet indice était jusqu’alors seulement connu des chefs d’établissements et des cadres de l’Éducation nationale. Sa mise à disposition du grand public, après une longue bataille juridique de trois ans menée par un journaliste indépendant, Alexandre Léchenet, permet de mieux saisir ces enjeux de ségrégation sociale et scolaire.
Cet indice a été créé en 2016 par les statisticiens de l’Éducation nationale afin de décrire le milieu social moyen des élèves d’un établissement. L’indice se construit à partir des professions et catégories socioprofessionnelles des parents d’élèves auxquelles un coefficient est attribué.
Par exemple, un élève dont les parents sont professeur des écoles et ingénieur obtiendrait un IPS de 179. Tandis qu’un autre, avec deux parents au chômage, serait à 54. Le ministère estime ainsi que plus l’indice est élevé, plus l’élève évolue dans un contexte familial favorable aux apprentissages. L’IPS d’un établissement est la moyenne de l’IPS des élèves. "Même s’il s’agit d’un outil statistique avec une marge d’erreur et que cet outil est aussi critiquable, il n’en reste pas moins intéressant pour illustrer les dysfonctionnements de l’école", explique Sébastien Ségur, d’Unsa Éducation.
Mixité plus importante dans les collèges ruraux
Au niveau national, les établissements privés sont surreprésentés dans le groupe des IPS supérieurs à 130. Alors que l’on compte 14,1 % d’écoles privées sous contrat, elles ne constituent que 3,2 % des écoles ayant un IPS inférieur à 90 mais 60,3 % des écoles avec un IPS supérieur à 140. Un constat que l’on retrouve pour les collèges aussi. En Aveyron, les syndicats d’enseignants relèvent "de grandes disparités" et "des écarts conséquents dans des villes comme Rodez, Villefranche-de-Rouergue et Millau".
À Rodez par exemple, la fourchette de l’IPS est comprise entre 125 et 74 pour les écoles et 117 à 92 pour les collèges. Le taux moyen est de 97 dans les écoles publiques et de 113 dans les écoles privées.
"Toutefois, on note que la mixité est plus importante dans les collèges ruraux. Ce sont bien souvent les seuls établissements implantés dans les zones rurales, note Sophie Héran, du syndicat Unsa. Mais, dans les villes, comme il n’existe pas de carte scolaire, on se retrouve avec une mixité qui interroge."
"Les écarts entre les écoles sont parfois très importants, rajoute Sébastien Le Gall, secrétaire départemental du syndicat. Alors que la mixité est favorable à tout le monde. Pour autant, la mise en place d’une carte scolaire pourrait être une solution. Faut-il encore qu’une volonté politique existe. Dans les discours, la volonté de mettre en place une école mixte et inclusive est affichée. Mais dans les faits, c’est tout le contraire. Au lieu de diluer les élèves qui présentent des difficultés scolaires dans plusieurs établissements, ils se concentrent dans certains."
Expérimentation
Et les syndicats "d’afficher certaines inquiétudes quant au socle républicain qui est mis à mal ". Pour Dominique Roblot, présidente de l’Union départementale des délégués départementaux de l’Éducation nationale (DDEN), "nous sommes au-delà de la querelle qui peut exister entre le public et le privé. Tout le monde a un rôle à jouer pour une école plus juste et moins inégalitaire."
Dans au moins deux villes en France, Paris et Toulouse, une expérimentation a été menée pour tenter d’effacer ces disparités. Avec un certain "succès puisque les élèves de classes sociales favorisées reviennent dans l’enseignement public, trois ans après la mise en place de ces mesures", reprend Sébastien Ségur. Reste encore à publier l’IPS pour les lycées. "Il se pourrait que la question des inégalités soit encore plus marquée", analyse-t-il.
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