Retraites : la réforme que Macron pourrait payer cher

  • Le Président de la République a le soutien des LR… peut-être pour la dernière fois.
    Le Président de la République a le soutien des LR… peut-être pour la dernière fois. MaxPPP
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Christelle Bertrand

Ce mardi 10 janvier Élisabeth Borne présente à 17h30 le projet de réforme des retraites. Si le gouvernement a obtenu le soutien des LR et peut donc espérer faire voter le texte sans 49.3, le ressentiment dans l’opinion reste fort.

Le monde macroniste retient son souffle. Passera ? Passera pas ? La mère des réformes, le tant attendu texte sur les retraites, doit être annoncée à 17 h 30 ce mardi par la Première ministre, Élisabeth Borne, lors d’une conférence de presse qui s’annonce très suivie. Si les grandes lignes sont d’ores et déjà connues, la présentation officielle marque une étape majeure et provoque des sueurs froides à toute la majorité. D’où les retards pris sur le calendrier initial afin de se donner quelques jours pour convaincre syndicats et opposition.

Les vacances de Noël n’ont rien changé à la position des premiers. Pire, des annonces malencontreuses sur l’assurance chômage, à deux jours de Noël, ont fini de braquer Laurent Berger, le patron de la CFDT, qui a redit son opposition à un report de l’âge légal et a mis en garde l’exécutif contre un embrasement social. "La CFDT est prête à appeler les salariés à se mobiliser. Sous différentes formes : manifestations, initiatives dans les secteurs professionnels, appels à des débrayages… ", a-t-il prévenu.

Pourtant, au sein de la majorité, le sentiment d’inquiétude, ce lundi, était mâtiné d’une certaine confiance. "On ne peut pas savoir ce qui va se passer, confiait un sénateur proche du gouvernement. Mais on parle tellement des retraites depuis des mois, on a tellement dit que ça allait mal se passer, que les gens l’ont déjà digéré. Il y a beaucoup de résilience chez les Français."

Divisions chez LFI

Cette confiance se nourrit de deux nouvelles données. Tout d’abord, les quelques jours de “rab” que le gouvernement s’est accordé en décembre ont permis d’obtenir l’accord du nouveau patron des LR, Eric Ciotti. "Ciotti, c’est un dealer", confiait un élu en décembre. Il ajoutait : "Tout ce qu’il veut, c’est la mairie de Nice. Si Borne lui offre la tête d’Estrosi, qui a eu la mauvaise idée d’aller chez Edouard Philippe à Horizons, il topera." Et Eric Ciotti a topé. Les LR ne devraient donc pas voter contre la réforme, ni à l’Assemblée ni au Sénat.

Autre paramètre : les divisions chez LFI. Alors qu’en décembre la majorité aurait pu craindre une forte opposition des Insoumis, la nomination contestée, notamment par les jeunes militants, de Manuel Bompard à la tête du parti a nettement affaibli sa capacité à mobiliser.

Cette semaine, deux meetings sont prévus à Paris, un premier, mardi soir, autour de François Ruffin et Fabien Roussel et un second ce week-end qui rassemblera Clémentine Autain, François Ruffin, Alexis Corbière, Éric Coquerel ou encore Raquel Garrido. Aucune de ces deux réunions publiques n’associera la direction du parti.

Mais si la réforme des retraites se présente sous de meilleurs augures qu’en 2022, elle n’en reste pas moins explosive. "Les choses peuvent rapidement s’envenimer", observait, lundi, un soutien de la majorité qui ajoutait : "Je crains surtout une difficile digestion des mauvaises nouvelles à venir sur le prix de l’énergie et notamment les taxes de copropriété qui vont augmenter, mais aussi les zones à faibles émissions qui vont imposer aux gens de changer leur voiture. Nous sommes assis sur un baril de poudre."
Et un ministre d’abonder "ce qui m’inquiète le plus, c’est le ressentiment des classes moyennes qui ont le sentiment que l’on ne tape que sur ceux qui travaillent. Il ne faut pas les braquer car en 2027, l’élection se jouera sur cet électorat".

Une ultime menace pèse sur la majorité. Elle porte sur les autres textes de loi prévus à l’agenda de l’Assemblée. "Macron a obtenu le soutien de Ciotti pour cette fois mais ça veut dire que les LR ne voteront aucun autre texte, sinon il n’y aurait plus de différence entre eux et la majorité", soulignait, lundi, un élu qui se demandait comment, dans ces conditions, faire passer les textes sur le nucléaire et l’immigration. La réforme des retraites pourrait donc coûter cher, à long terme, à la majorité.