Aux États-Unis, devenir manager n’est pas toujours une belle promotion

  • Certaines entreprises américaines promeuvent leurs collaborateurs comme managers pour éviter de leur payer des heures supplémentaires.
    Certaines entreprises américaines promeuvent leurs collaborateurs comme managers pour éviter de leur payer des heures supplémentaires. Andreas Klassen / Unsplash
Publié le
ETX Daily Up

(ETX Daily Up) - Fini le temps où les entreprises n’étaient composées que du patron et de ses employés. Elles regorgent désormais de managers et chefs en tous genres, aux missions aussi diverses que variées. Toutefois, une nouvelle étude américaine tire la sonnette d’alarme sur ce statut hiérarchique que certaines sociétés utilisent à mauvais escient. Explications.


Y a-t-il trop de managers ? C'est la question que s’est posé le site de la chaîne britannique d'informations BBC en 2013. À l’époque, on comptait 5 millions de managers au Royaume-Uni. Il y a fort à parier que ce chiffre a considérablement augmenté en une décennie, conséquence de la multiplication des diplômes en management. L’engouement pour ces formations montre à quel point l’organisation des entreprises a évolué, et ce quel que soit le secteur d’activités. Résultat : les dirigeants s’appuient de plus en plus sur les managers pour diriger et fédérer leurs équipes.

Mais Lauren Cohen, Umit Gurun et N. Bugra Ozel ont constaté que de nombreux managers n’encadrent, en réalité, personne. Pire encore, leurs fonctions n’ont rien à voir avec celles d’un responsable. Ces chercheurs américains, qui enseignent respectivement à Harvard et à l’université du Texas, se sont penchés sur ce phénomène étonnant dans une étude réalisée pour le National Bureau of Economic Research. Ils y expliquent que beaucoup d’entreprises promeuvent leurs collaborateurs comme managers pour éviter de leur payer des heures supplémentaires.

4 milliards de dollars d'heures supplémentaires impayés

En effet, les employés qui touchent un certain salaire et qui occupent un poste de cadre ne peuvent pas bénéficier des heures supplémentaires, en vertu du Fair Labor Standards Act. C’est pourquoi des entreprises inventent des positions de managers pour contourner la loi fédérale américaine. Par exemple, un technicien de surface sera promu "carpet shampoo manager", tandis qu’un assistant administratif deviendra un "director of first impressions". Le rapport de Lauren Cohen, Umit Gurun et N. Bugra Ozel recense de nombreux intitulés de poste similaires entre 2010 et 2018. Ils auraient même augmenté de 485% durant la même période. Ces promotions frauduleuses auraient permis aux entreprises américaines de ne pas payer plus de 151 millions d’heures supplémentaires, ce qui représente un manque à gagner de 4 milliards de dollars pour les salariés. Les chercheurs ont remarqué que des entreprises de divers secteurs d’activité ont recours à cette pratique, y compris de grands groupes comme Meta (anciennement Facebook), Goldman Sachs ou encore JPMorgan Chase & Co. Il faut dire que le jeu en vaut la chandelle : le Ministère du travail américain a ordonné aux entreprises du pays de verser 226 millions de dollars d'arriérés de salaire durant l’année 2019. C’est nettement moins que les 4 milliards de dollars d’heures supplémentaires qu’ils doivent à leurs employés.

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?