Bozouls. Aveyron : de l’eau dans le gaz pour le méga-projet de méthanisation

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  • La voie verte recoupéepour laisser passer les engins, et des riverains voient rougeà Bozouls.
    La voie verte recoupéepour laisser passer les engins, et des riverains voient rougeà Bozouls. OC
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Olivier Courtil

Des riverains et le comité Causse Comtal ont relevé des points d’achoppements au cours de l’enquête publique.

Dix ans déjà que le projet de méthanisation porté par la société Biever est dans les cartons à Bozouls. L’enquête publique, qui vient de se terminer, soulève quelques interrogations. Et beaucoup d’inquiétudes. Il en va notamment de la fameuse voie verte qui représente le lieu de balade des Bozoulais, largement empruntée également par les vélos. Celle-ci serait coupée pour permettre aux véhicules de se rendre sur l’unité de méthanisation. "Il y a au moins une centaine de personnes qui s’y promène par jour. On détruit la voie verte alors que l’on peut faire une entrée par la zone artisanale des Calsades, on dépense de l’argent public par le biais de la communauté de communes, le tout pour créer trois emplois", fulminent des riverains dont l’un d’entre eux, Norbert, à la tête des écuries du Dourdou, à vol d’oiseau à 500 mètres du projet, a mis en place une pétition.

Pétition sur la voie verte

Il est vrai que les observations émises lors de l’enquête publique ont des airs d’un inventaire à la Prévert : permis de construire déjà délivré, projet surdimensionné, risques de pollution, impacts paysagers, etc. " Il va falloir pomper 2 200 m3 d’eau sur le causse, en particulier la source de Bozouls, la grotte de l’Espoir et son ruisselet sans parler de l’impact déjà causé par la sécheresse. C’est une aberration. Quand on voit que le projet de Montbazens est à l’arrêt et que celui sur l’Aubrac est obligé d’ouvrir des pots de haricots pour faire fonctionner leur unité de méthanisation, il y a de quoi s’interroger", poursuit la poignée de riverains qui précise : " On n’est pas contre la méthanisation mais on s’oppose à l’accès. "

Cette inquiétude, soulevée par les riverains concernant le fonctionnement même de cette unité, est pointée du doigt par le comité Causse Comtal qui a émis de nombreuses observations auprès du commissaire enquêteur. "Ce projet prévoit 59 628 tonnes d’intrants, soit 260 tonnes par jour, ce qui représente trois fois plus que la préconisation de l’agence de la transition écologique (Ademe). Il va donc falloir alimenter cette usine. Outre les intrants d’origine agricole, produits dans un rayon de 28 km, d’autres intrants arriveront de l’ensemble du département de l’Aveyron majoritairement mais aussi des départements limitrophes, et repartiront sous forme de digestats soit les résidus de la méthanisation sur un territoire allant jusqu’à plus de 40 km. Quel bilan carbone de ces allers et retours incessants de poids lourds qui feront la navette ?" En effet, les riverains, qui ont mis en place la pétition sur la ligne verte, indiquent que les intrants pour alimenter l’unité sont envisagés de Camboulazet à Saint-Chély-d’Aubrac, voire la Lozère.

Si le comité Causse Comtal rappelle sa position favorable à la promotion et à la production d’énergie renouvelable, elle dénonce le manque de sérieux de l’étude. "L’unité est située sur les Grands Causses et non sur le Causse Comtal. Les risques de pollution de la nappe phréatique et des exutoires sont bien réels, et nous pouvons d’ores et déjà prévoir un bilan carbone désastreux. Les impacts environnementaux de ce projet gigantesque ne peuvent pas être passés sous silence."

Ce projet de central d’énergie renouvelable est séduisant. L’accès route de Gabriac fait débat mais nous avons prévu une alternative avec une entrée par la zone d’activités des Calsades. On ne sait pas encore le délai car une étude d’impact est en cours. La voie verte est déjà coupée même s’il ne faut pas multiplier les découpages. C’est un sujet sensible, je suis dans l’attente.

Jean-Luc Calmelly, maire de Bozouls

"On ne fait pas n’importe quoi"

Thierry Cabrolier, président de la société par action simplifiée (SAS) Biever, tient à se montrer rassurant sur ce projet. "La voie verte est déjà coupée, une future voie sera aménagée et treize véhicules y passeront par jour alors que 988 véhicules empruntent la route de Gabriac." Et de rappeler que ce projet fédère 55 agriculteurs sur un rayon de 15 km (Bozouls, Espalion, Rodelle, Gabriac), les Cuma, et des entreprises du territoire telles que Braley et la Sobac. "C’est un projet local qui apporte une valeur ajoutée au territoire." Et d’ajouter : "Je comprends la position de certaines personnes, nous avons tenu des réunions d’information sur le projet pour les rassurer et nous en ferons d’autres encore. On ne fait pas n’importe quoi." L’agriculteur annonce le choix du bureau d’études Sud Infra Environnement basé à Espalion. "J’ai la conscience tranquille. Le citoyen sera incorporé et c’est le collectif qui porte le projet."Le coût du projet est actuellement de 14 M€. La société Biever s’appuie sur une centaine d’actionnaires avec 60 % détenus par l’association Métha Causses et 40 % par Engie.
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