Comment la pâte à tartiner reste une garniture indémodable pour les crêpes

  • La pâte à tartiner compose la deuxième garniture préférée des Français pour dévorer des crêpes.
    La pâte à tartiner compose la deuxième garniture préférée des Français pour dévorer des crêpes. Vuk Saric / Getty Images
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ETX Daily Up

(ETX Daily Up) - Jeudi 2 février, c'est la Chandeleur ou le délicieux prétexte pour faire sauter les crêpes... et de sortir la pâte à tartiner ! Après le sucre, voilà la garniture préférée des Français*. Véritable produit chouchou des Français, le Nutella ne compose pourtant pas l'unique choix. Dans la sphère gastronomique, on s'est approprié les codes de cette pommade sucrée si convoitée, au travers des recettes de chefs qui évincent l'huile de palme et font valser divers ingrédients de base pour décoller l'image d'un produit soi-disant industriel.

Dans les nombreuses épiceries que les chefs pâtissiers et chocolatiers ont concoctées pour compléter les plaisirs des becs sucrés, la pâte à tartiner compose un must-have que tout un chacun s'approprie. C'est comme si on ne pouvait pas faire sans elle, ou du moins que l'on n'avait pas poussé la réflexion de ce nouveau business commerçant jusqu'au bout si cette recette régressive n'apparaissait pas dans la sélection. Il faut dire qu'entre les Français et la pâte à tartiner, c'est une longue histoire de plaisir qui dure.

Même si les becs les plus fins auront du mal à l'avaler, on ne peut contredire la gourmandise des consommateurs tricolores pour la marque Nutella. Au premier semestre 2022, la célébrissime recette de Ferrero fut l'une des marques les plus vendues en grandes surfaces. Selon les chiffres de l'institut NielseniQ, le pot d'un kilo a généré 39,7 millions d'euros de chiffres d'affaires, soit l'article le plus plébiscité, quand on évince du classement les boissons. Et la portion de 825g arrive pour sa part troisième, avec 31,1 millions d'euros de chiffres d'affaires. Lors du premier confinement au printemps 2020, Nutella avait gagné près d'un million de consommateurs français, au moyen notamment de coups marketing via les réseaux sociaux. La fameuse crème de noisettes italienne lancée en 1964 avait alors enregistré des ventes record.

Elaborée en 1946, la recette puise son origine dans la confection d'un ingrédient que les grands chefs pâtissiers mettent aujourd'hui souvent en avant : le gianduja. C'est le cousin italien du praliné, c'est-à-dire une pâte de chocolat et de fruits secs - notamment des noisettes et des amandes que l'on broie finement jusqu'à l'obtention d'une pâte épaisse. C'est la graisse végétale qui permet d'amalgamer et d'obtenir le résultat final. L'ancêtre du Nutella s'intitulait le Giandujot et se présentait sous la forme d'une brique à trancher. La préparation devient crémeuse en 1951 lorsque Ferrero décide de la rendre plus pratique à consommer. Le produit s'appelle SuperCrema et n'adoptera son nom populaire que treize ans plus tard.

Des pâtes à tartiner écolo

Si l'on ne peut nier la participation du Nutella à la popularité de la pâte à tartiner, force est de constater que la recette trouve davantage de modernité sous la spatule de nombreux pâtissiers. D'abord, ils prouvent que l'huile de palme n'est pas indispensable, ce qui doit ravir les organismes de défense de l'environnement qui pointent du doigt cet ingrédient au coût de revient très rentable dont la production peut engendrer la déforestation et par conséquent l'extinction d'espèces animales comme les orangs-outans.

Pour redorer le blason de la pâte à tartiner, les chefs misent sur des composants de qualité. Dans le cas de la recette traditionnelle à base de noisettes, nombre d'entre eux ne passent pas à côté de celles originaires du Piémont. Ces noisettes italiennes très convoitées, compte tenu de leur saveur intense, sont présentes à 53% dans le pot concocté par le grand chocolatier Patrice Chapon (15 euros le pot de 150g). Comme s'il voulait nous assurer un moment encore plus régressif, l'artisan connu pour sa recette de mousse au chocolat insère des noisettes entières caramélisées à l'intérieur du pot avant d'en parsemer aussi au-dessus et de refermer le couvercle. A Aubenas, en Ardèche, Pierre Chauvet monte la présence des noisettes jusqu'à 60% pour proposer un goût puissant, mais a choisi une variété de la région du Levant pour dompter le coût de la recette (8,50 euros les 250g). Le chocolatier ajoute une pointe de fleur de sel pour titiller les papilles en fin de bouche. A Lyon, la référence chocolatière Bernachon démontre que la pâte à tartiner est un produit de qualité avec 60% de noisettes du Piémont et assemble pas moins de dix variétés de fèves de cacao pour sa bien nommée Bernachoc' (12,50 euros les 200g). De quoi prouver que la recette est une question de savoir-faire !

De l'originalité dans les recettes

Surtout, les pâtissiers se sont réapproprié la pâte à tartiner longtemps représentée par Nutella en revisitant la recette, à l'aide de divers ingrédients et en démontrant surtout que l'on pouvait varier les plaisirs des fruits secs. Avant son arrivée à l'hôtel Four Seasons George V, le talentueux pâtissier Michaël Bartocetti avait dépoussiéré au Shangri-La Hotel le principe du praliné, en utilisant de la cazette, de petites noisettes en provenance du Morvan qui peuvent être broyées lorsqu'elles sont fraîches et devenir de la fleur de cazette. L'ingrédient se présente sous forme d'une poudre granuleuse. Avenue George V, le chef ne manque pas d'idée et a ajouté de la fève de Tonka à une pâte à tartiner à base de chocolat au lait 40% du Pérou, commercialisée à l'occasion du pop-up éphémère de Noël dernier.

A la manufacture de chocolat, Alain Ducasse confectionne la pâte à tartiner avec 43,5% de cacahuètes (18 euros) tandis que le pâtissier Christophe Michalak vante les mérites d'une recette à base de noix de pécan (mais celle que l'on peut acheter dans ses boutiques est bien à base de noisettes ; 13,90 euros). La palme des pâtes à tartiner les plus originales revient au boulanger Benoît Castel qui rappelle ses origines bretonnes en mariant l'amande au sarrasin (12,60 euros) alors que l'ex-chef de Fauchon Christophe Adam (8,50 euros) prouve qu'on peut aller jusqu'à évincer le chocolat noir ou au lait en préférant le blanc. Le pâtissier y ajoute des pistaches d'Iran.

*Etude YouGov réalisée du 19 au 20 janvier 2021 auprès de 1.008 Français âgés de 18 ans et plus.

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