Aveyron : un septuagénaire relaxé après avoir abattu un chien ayant égorgé l'une de ses brebis

  • Le prévenu a subi sept attaques sur son troupeau depuis 2017 et était présenté pour "atteinte volontaire à la vie d'un animal domestique". 
    Le prévenu a subi sept attaques sur son troupeau depuis 2017 et était présenté pour "atteinte volontaire à la vie d'un animal domestique".  Centre Presse Aveyron
Publié le , mis à jour

Le tribunal judiciaire de Rodez a finalement retenu "l'état de nécessité" dans cette affaire, relaxant l'habitant de Saint-Geniez-d'Olt-et-d'Aubrac et reconnaissant, de fait, qu'il avait agi pour sa défense. Une décision, comme l'a déclaré la présidente du tribunal, qui n'est cependant pas "un blanc-seing pour tirer sur tout ce qui bouge" à l'avenir.

Stéphanie Boutaric, avocate de ce septuagénaire auteur d'un coup de feu mortel sur un chien en janvier 2020, avait fort à faire ce mercredi 15 février. "Face à moi, sept constitutions de partie civile... Il y a des assises en ce moment, une affaire de viol sur mineure, et la victime comparaît seule... L'animal est mieux défendu que l'humain. Vaut-il mieux mourir d'un coup de fusil ou égorgé ?", s'est-elle interrogée, en référence aux deux animaux qui ont perdu la vie ce jour-là.

"Je lui ai tiré dans l'arrière-train"

Rappel des faits par la présidente Sylvie Rouanne : le 11 janvier 2020, le prévenu se trouve sur sa propriété de Saint-Geniez-d'Olt, auprès de son troupeau d'une vingtaine de brebis. Il voit s'avancer un chien qui s'en prend aux animaux et égorge l'une des brebis. Il essaye d'intervenir face à un chien "agressif et menaçant", prend son arme et tire en direction du chien ; ce dernier sera retrouvé mort une heure plus tard, à proximité du cimetière de Saint-Geniez. L'animal aurait échappé à sa propriétaire qui s'adonnait au trail dans le secteur. Elle explique aux enquêteurs qu'elle l'a appelé et sifflé à plusieurs reprises, sans succès, avant d'entendre un coup de feu. 

"Je lui ai tiré dans l'arrière-train", reconnaît directement le prévenu, qui a déjà subi sept attaques sur son troupeau depuis 2017 et présenté ce jour pour "atteinte volontaire à la vie d'un animal domestique". 

Sept parties civiles sont représentées dans ce procès : la propriétaire du chien, un croisé beauceron-boxer, mais aussi six associations ou fondations de défense des animaux : SPA de Rodez, SPA nationale, 30 millions d'amis, Association Stéphane Lamart pour la défense des droits des animaux ainsi que les fondations Assistance aux animaux et Brigitte Bardot.

Des "déclarations divergentes"

Représentant la propriétaire du chien, Me Camille Jammes a mis en avant les "déclarations divergentes" de l'auteur du coup de feu, qui a affirmé à sa propriétaire "avoir vu le chien s'enfuir" et que "tout allait bien". "Il n'a jamais dit dans ses auditions que le chien avait été agressif avec lui", a souligné l'avocate, regrettant une réaction "totalement disproportionnée". Elle demande 2000 € de dommages et intérêts.

Me Guédon, pour la SPA de Rodez, l'a affirmé : "Il a volontairement tiré sur le chien. Pour lui apprendre la vie ? Non, pour lui apprendre à mourir". Un "geste inadmissible" de la part de cet homme qui avait, "évidemment", le fusil "avec lui". 750 € de dommages et intérêts lui seront demandés à ce titre. Me Bruce Flavier pour la fondation Brigitte Bardot, demandera 1100€ ("il aurait pu tirer en l'air pour l'effrayer, agir autrement. Il a choisi de le viser sciemment"). Pour 30 millions d'amis, ça sera 1600 € et la confiscation de ses armes et le retrait de son permis de chasser "au vu de la non-sélection des espèces prélevées". 

"Il a dit avoir visé l'arrière-train mais a touché mortellement au poitrail... Il aurait pu tirer en l'air ou dans l'herbe", explique la représentante de la fondation Assistance aux animaux, réclamant 3200 €. La SPA nationale demandera pour sa part 4000 €.

"Sans voix face aux demandes des parties civiles"

Le procureur de la République, soulignant qu'il est "puni de tuer un animal sans nécessité" et qu'il y aurait eu "d'autres moyens de le faire partir" a demandé à l'encontre du prévenu 800 €. 

"Effectivement, mon client a bien tué le chien", confirmera l'avocate du tireur Me Stéphanie Boutaric. Mais "il s'est senti agressé, en danger. Je plaide l'état de nécessité, il a tiré pour se protéger. Je demande la relaxe... et je suis sans voix face aux demandes des parties civiles". "Il n'y en a que pour le chien, ici, y a que le chien qui est défendu", a déploré à la barre le propriétaire du troupeau, autorisé à prendre la parole en dernier.

Après délibération, le tribunal décidera de relaxer le septuagénaire, reconnaissant "l'état de nécessité". "Le tir pouvait se trouver justifier", a expliqué la présidente Sylvie Rouanne, poursuivant : "Même si ce n'est pas un blanc-seing pour tirer sur tout ce qui bouge". 

L'homme était par ailleurs poursuivi pour détention sans déclaration d'arme, en l'espèce le fusil à pompe de calibre 16 qui lui avait servi à abattre le chien. Ce mercredi en début d'audience, il a fourni une déclaration de la préfecture datant de 1994 et attestant que le fusil était enregistré, ainsi qu'il l'avait déclaré aux enquêteurs. Il a aussi été relaxé pour ces faits.

Xavier Buisson
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Les commentaires (3)
Altair12 Il y a 1 mois Le 16/02/2023 à 09:55

C'est regrettable pour le chien ; mais surtout pour la brebis totalement inoffensive ; quant au berger il a bien le droit de défendre son troupeau !
De la bonne justice !

JanPier30 Il y a 1 mois Le 15/02/2023 à 16:45

Un bon jugement, mais les assos profiteraient aujourd'hui de la moindre occasion pour remplir le tiroir caisse aux dépends d'un éleveur qui a tout de même subi un vrai préjudice !
Personne n'a évoqué les souffrances de la brebis ni le stress engendré au troupeau, curieux pour des assos de défense des animaux ?!

Milsabords Il y a 1 mois Le 15/02/2023 à 15:47

"Il n'y en a que pour le chien, ici, y a que le chien qui est défendu", a déploré à la barre le propriétaire du chien, autorisé à prendre la parole en dernier." Ce ne serait pas plutôt le propriétaire du troupeau qui s'exprime ainsi ? Quant aux demandes des associations elles sont assez surréalistes et surtout opportunistes ...