Saint-Saturnin-de-Lenne. St-Saturnin écrit ses mémoires à l’encre de l’oralité

  • "Parler du temps passé."
    "Parler du temps passé."
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Olivier Courtil

Des anciens du village se retrouvent au café pour remonter le cours de l’histoire au gré de leurs souvenirs.

Michel, Alexandre, Gilbert, Louis, Marie-Thérèse, Georgette, Nadine, Maurice, Pierre, François ne demandent qu’à agrandir le cercle des anciens qui se retrouvent sous le nom du "Parladis", en écho au patois local. Ce noyau dur se retrouve chaque mois, en principe le vendredi après-midi, au café associatif "Le Saint-Sat" pour donner vie à l’établissement et à leur village plus largement au gré de leurs souvenirs. D’une pierre trois coups : faire travailler leur mémoire. Et celle-ci s’avère comme les méandres du Lenne. "On part d’un thème et on laisse libre cours à la conversation", avance Marie-Thérèse, à l’initiative de ce projet avec Louis, tous deux furent dans l’enseignement. Nadine, épouse de Louis, fait office de scribe avec Marie-Thérèse car les paroles seront retracées sur le marbre du prochain bulletin municipal.

De la légèreté

Ce jour-là, le premier thème porte sur la famille Brun. Des fragments nourrissent les échanges. L’humour est au rendez-vous face à ce vaste chantier. On n’est aussi pas sérieux quand on est vieux, vient en écho au vers de Rimbaud. "Je sors du Crédit (Agricole, NDLR)", lance Louis, originaire de La Roque Valzergues, hameau médiéval. "Bon, champagne !", lance à l’unisson les compagnons de la mémoire de Saint-Saturnin. "Parler du temps passé, aimer se retrouver", sort unanimement de leurs bouches. Ces bouches qui remontent leur histoire, au temps de l’oralité, de l’altérité, et non des écrans. De la famille Bru qui tenait un café, Saint-Saturnin en comptait quatre en ce temps-là. "Danse ce que tu veux, je joue ce que je veux", entend-on en patois. La traduction perd de la saveur mais la joie du souvenir demeure. Des souvenirs dont chacun amène sa pierre. "Léon cuisinait les lièvres. Il disait : faut être quatre dont deux qui ne les aiment pas !" Le sel était alors à portée de main, dans la poche, pour croquer un lapin cru.

"Récupérer les souvenirs"

Des réminiscences qui donnent de l’eau au moulin de Saint-Saturnin qui en a justement compté deux. Le passé est brumeux comme l’avenir. Les traces se confrontent.

Les bribes ne sont pas convergentes. "On continue à enquêter et à récupérer les souvenirs", propose Marie-Thérèse pour passer à un autre thème. Elle en profite pour lire une lettre manuscrite, telle une relique, sur le départ de Fernand Bru du club des Aînés, "Fleur des causses", qui existe depuis plus de 40 ans. Le temps s’écoule et la fouace préparée par Marie-Thérèse accorde une pause dans ce café qui a gardé son mobilier et ses tableaux du siècle dernier, propice à ce travail de mémoire. Un travail guidé par la bienveillance et la légèreté. Comme un caractère de La Bruyère, l’un narre une anecdote d’un villageois qui venait à l’église pour voir la fille dont il était amoureux. Tout ne peut pas s’écrire. Que ce soit dans la grande histoire comme dans la petite. Ce qui compte c’est de partager les tranches de vie. Et l’amour aussi. Comme Nadine prenant la main de son époux. Le temps comme le vent emportera tout. Comme le train qui ne passe plus. Qu’importe. "On est heureux aujourd’hui et on chante", disent-ils en évoquant la vie des familles, les histoires de couples, la gloire du cochon qui se mesurait à l’épaisseur du lard. Pour plus de goût, plus de saveurs. Cette époque qui ne comptait pas les heures pour se parler avec le cœur. On a l’impression de voir son père, d’entendre son grand-père. On est tous des frères.

"Le Parladis" est à la recherche d’une personne qui peut écrire le patois, et de toutes personnes intéressées par la vie du village. Contacter Marie-Thérèse Gay au 06 95 74 96 34.

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